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Le décryptage éco. Travail, emploi : les bonnes idées du modèle scandinave

A gauche comme à droite, les réformistes s’intéressent de près au modèle social scandinave. Le décryptage de Vincent Giret.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Une agence pour l'emploi à Taarnby, au Danemark. (FRANCIS DEAN / CORBIS VIA GETTY IMAGES)

Les trois pays qui composent la Scandinavie – la Suède, le Danemark et la Norvège –, ont beaucoup choses à nous apprendre, et que sur certains points, ils nous ressemblent. A chaque campagne électorale, il est bon d’aller observer nos voisins, et tout particulièrement ceux qui réussissent sans pour autant renverser la table ou imaginer des solutions extrêmes. Il y a au moins trois bonnes raisons de regarder de près ces trois pays nordiques.

1. Une baisse du chômage malgré une croissance faible. Quand on voit d’abord qu’un pays comme le Danemark ne fabrique une petite croissance, 1% en 2016, c’est à dire légèrement en dessous de la France, mais qu’il est pourtant quasiment au plein emploi.

2. Des pays qui reviennent de loin. Ces pays affichent de très bonnes performances aujourd’hui, mais ce n’a pas toujours été le cas dans le passé : le Danemark a eu lui aussi par exemple, plus de 10% de chômage. Ce qui prouve que de bonnes réformes, pilotées dans la durée, peuvent transformer radicalement des situations et obtenir des résultats tangibles.

3. Un modèle de protection sociale proche du nôtre. Ces pays partagent avec la France une certaine idée du modèle social, de l’égalité et de ce qu’est un Etat providence, qui va de pair avec un niveau élevé de prélèvements obligatoires.
Sur tous ces aspects, la France est plus proche culturellement du modèle scandinave que du modèle anglo-saxon.

La flexi-sécurité, avec des droits et des devoirs

Ces pays ont d’abord fait un diagnostic qui a montré qu’ils souffraient de problèmes très similaires aux nôtres : forte dualité du marché de l’emploi, niveau très élevé du chômage de longue durée qui frappait massivement les salariés les moins qualifiés. Les Scandinaves ont modifié en profondeur les règles du marché du travail et ils l’ont fait dans un certain consensus. Ils ont inventé ce qu’on appelle la fameuse "flexi-sécurité" plus adaptée à nos économies modernes. Et les deux mots comptent : il y a plus de flexibilité, mais il y a aussi davantage de sécurité. C’est tout le secret. 

Côté flexibilité, le point le plus sensible, c’est qu’il n’y a plus de différence entre CDD et CDI et il est aussi facile de licencier que d’embaucher. Côté sécurité, les indemnités chômage sont très généreuses et sur une durée d’au moins deux années. Mais il y a des contreparties qui font la force du système : une remise à niveau des compétences, avec un système de formation extrêmement efficace, et un suivi individualisé et hebdomadaire, avec un rendez-vous obligatoire, toutes les semaines après d’un conseiller de Pôle emploi. Enfin, après quelques mois, les chômeurs sont fortement incités à accepter une offre de poste se présentant, même si elle ne correspond pas tout à fait à leurs souhaits ; c’est le principe, sacré dans les pays scandinaves, des droits et des devoirs.

Des syndicats très présents

Il y a un point de différence culturelle très fort avec la France : chez nous les syndicats sont en général assez faibles, peu représentatifs et de culture majoritairement protestataire. Dans les pays scandinaves, les syndicats sont forts, très représentatifs, mais aussi très engagés dans le pilotage pragmatique du système social, au plus près du terrain. La plupart des modalités concernant les conditions de travail sont ainsi définies, non pas au niveau national, mais par des accords de branches ou d’entreprise.

Autre point important, les partenaires sociaux travaillent main dans la main avec le gouvernement pour actualiser en permanence le catalogue des formations offertes aux demandeurs d’emploi, afin de coller au plus près des réalités du marché du travail et des compétences recherchées par les entreprises. A l’image du Danemark, les Scandinaves mettent le paquet sur ce service public de l’emploi : ils consacrent par exemple pour la formation et l’accompagnement des chômeurs quatre fois plus, en proportion du PIB, que les pays de l’OCDE. C’est tout à fait spectaculaire. Dernier point : ces réformes sont évaluées et ajustées en permanence.

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