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Vingt ans après sa mise en circulation, comment est perçu l'euro aux Pays-Bas et en Bulgarie

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qu'il se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction les Pays-Bas, où l'euro suscite la défiance de certains, et la Bulgarie, qui aimerait rejoindre le club de la monnaie unique d'ici 2024.

Article rédigé par franceinfo - Damian Vodénitcharov et Antoine Mouteau
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
La Banque centrale européenne, a Francfort, en Allemagne, le 30 décembre 2021. (DANIEL ROLAND / AFP)

Il y a vingt ans, les Français et Européens découvraient l'euro, nouvelle monnaie unique. Une monnaie rejetée par certains, comme aux Pays-Bas, ou plébiscitée par d'autres États, comme la Bulgarie, qui espère passer à l'euro à l'horizon 2024.

Au Pays-Bas, la zone euro suscite la méfiance de certains Néerlandais

Vingt ans après son introduction, une partie des Néerlandais rejettent l’euro. Du moins, reste-t-il encore des nostalgiques de l’ancienne monnaie nationale, le florin. C’est en tout cas, ce que rapportaient ces derniers jours plusieurs quotidiens néerlandais, dont le journal de l’Est du pays, De Gelderlander, qui est allé à la rencontre de citoyens chez qui la simple évocation du mot florin fait remonter beaucoup d’émotions. On y trouve des collectionneurs passionnés, ou encore un propriétaire d’un vieux jukebox qui ne s’allume qu’en y introduisant des florins. Au journal, certaines personnes âgées assurent toujours convertir leurs achats dans cette devise… Cette nostalgie serait bien réelle : selon la Banque centrale néerlandaise, les Néerlandais conservent encore chez eux près de 26 millions de billets en florins. Et le mois dernier, surfant sur ce regret de l’avant-euro, la Koninklijke Nederlandse Munt, l’équivalent pour la France de la Monnaie de Paris, a réédité des pièces de florin de collection, en or et en argent. Mais le paradoxe, selon plusieurs économistes néerlandais et une étude européenne datant de 2019, c’est qu’en fait, les Pays-Bas sont après l’Allemagne l’un des pays d’Europe à avoir le plus profité de l’euro.

Cette revendication existe sur la scène politique. Ainsi, il y a encore quelques années, l’extrême droite de Geert Wilders, notamment, l’évoquait encore. Pendant la campagne des législatives de 2017, par exemple, en guise de prospectus, des partisans de Wilders distribuaient aux passants des faux billets en florins à l’effigie de leur leader. Depuis, la revendication est plus discrète et cette option semble de moins en moins réaliste. Sauf qu'aux Pays-Bas subsiste toujours une méfiance envers la zone euro. Ainsi, en 2020, au début de la crise sanitaire, une grave dispute a opposé le ministre des Finances Wopke Hoekstra et les pays du sud, France incluse. Il accusait alors ces derniers de mal gérer leurs budgets et, entre les lignes, de vivre aux crochets des Néerlandais. Et tandis que certains s’attendaient à un nouveau gouvernement pro Union européenne, c’est ce même Wopke Hoekstra qui devrait finalement être le prochain ministre des Affaires étrangères.

La Bulgarie espère passer à l'euro d'ici 2024

La zone euro n'a pas cessé de s'élargir et la Bulgarie, le pays le plus pauvre de l'Union, avance dans la démarche d'adoption de la monnaie européenne. Le pays espère passer à l'euro à l'horizon 2024. Pourquoi tant d'empressement ? La réponse n'est pas très claire. L'ancien Premier ministre Boïko Borissov, qui a lancé la démarche, évoquait une intégration européenne plus poussée. Le gouvernement Borissov espérait ainsi tirer un profit politique de l'adoption de l'euro, perçue comme le privilège des pays riches.  L'argument des économistes est que l'adhésion à la zone euro va stabiliser le système bancaire bulgare et immuniser en quelque sorte les banques contre la faillite. L'une des plus grosses banques du pays a en effet fait faillite en 2014, suite à une rivalité entre deux oligarques influents. Cette faillite a profondément secoué les finances nationales.

Les Bulgares sont pourtant loin d'être convaincus : 66% pensent que le pays n'est pas prêt à adopter l’euro, 77% craignent une flambée des prix. Les opinions des experts sont divergentes : certains disent qu’il y aura certainement une augmentation des prix, mais que "les consommateurs rejetteront les prix élevés". Reste à voir comment ? Les détracteurs, eux, craignent un ralentissement considérable de la croissance économique et une flambée de l'endettement public. Un autre argument est que cela fait 25 ans que la Bulgarie a perdu sa souveraineté monétaire, en adoptant un taux de change fixe suite à une période d'hyperinflation en 1997. La valeur du lev bulgare, l'unité monétaire de la Bulgarie depuis 1881, était d'abord liée à celle du deutsche mark, puis à celle de l'euro dès 1999. Un euro vaut presque deux levs bulgares, et cette valeur sera maintenue à l'introduction de la monnaie unique européenne. L'euro est également déjà présent dans l'économie bulgare : les prix de location ou d'achat d'immobilier sont calculés en euros et beaucoup de Bulgares préfèrent épargner en euros. Au niveau purement technique, la Bulgarie remplit les critères d'adhésion : les candidats à l'adhésion à la zone euro doivent respecter une série d'indicateurs économiques, comme la stabilité des prix ou les niveaux de déficit public. La Bulgarie et la Croatie font partie du mécanisme de taux de change européen en 2020, qui est considéré comme l'antichambre de la zone euro.

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