Journée internationale des droits des femmes : quels sont les combats menés en Bolivie, en Gambie et en Inde ?
Dans le Club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se fait ou se passe ailleurs dans le monde. En cette journée internationale pour le droit des femmes nous partons en Inde, en Gambie et en Bolivie pour évoquer les questions des violences sexuelles et sexistes mais aussi du travail.
Ecarts de salaires, discriminations, violences sexuelles et sexistes renforcées avec la crise du Covid-19... En France, les femmes sont appelées à faire "grève de tout" et à manifester lundi 8 mars, journée internationale de lutte pour leurs droits. Quels sont les actions menées ailleurs dans le monde ? Le club des correspondants prend la direction de la Bolivie, de la Gambie et de l'Inde.
En Bolivie, une réforme pour raccourcir les délais de justice
La Bolivie enregistre des taux de violences envers les femmes parmi les plus élevés d’Amérique du Sud mais paradoxalement le pays est doté de plusieurs textes pour lutter contre ce fléau. Satisfaisantes sur le papier, ces lois peinent cependant à être appliquées.
Le parcours judiciaire de Cris Saavedra, 33 ans, est l’exemple parfait du combat que doivent mener les femmes victimes de violences en Bolivie. La jeune femme a subi des violences conjugales pendant cinq longues années. D’abord la plainte au commissariat, puis une année entière pour obtenir une ordonnance de protection, enfin la recherche d’un avocat qui ne soit pas malhonnête. Cela fait maintenant trois ans que Cris a démarré la procédure contre son désormais ex-mari et pour le moment aucune condamnation n’a été prononcée. Outre une justice lente, Cris est surtout révoltée par la corruption du système. Son ex-mari, dit-elle, a graissé la patte de plusieurs fonctionnaires afin notamment de retarder les démarches ou faire perdre des documents importants.
Face à ce constat d’échec le législateur va tenter de réécrire la loi pour une vie libre de violences. Le texte qui recense les violences machistes va être réformé. Parmi les priorités, il y a le raccourcissement des délais devant la justice, c’est essentiel car beaucoup de femmes abandonnent face aux méandres des tribunaux et les agresseurs restent impunis. Dans le projet de réforme il est également question des mesures de protection des victimes, afin qu’une femme battue ne se transforme pas en une femme tuée sous les coups de son conjoint.
En Gambie, une documentariste défend la parole des femmes victimes de violences sexuelles
Toufah Jallow est une jeune Gambienne qui a accusé en 2019 l'ancien président Yahya Jammeh de l'avoir violée. Devenue une figure féministe dans son pays, elle sort lundi 8 mars un documentaire avec sa fondation de lutte contre les violences sexuelles et de genre. Le film dénonce le fait que la commission Vérité et Réconciliation de Gambie, chargée de mettre en lumière les crimes commis sous le régime de Yahya Jammeh, ne s'intéresse que très peu au vécu des femmes.
Toufah Jallow demande à la commission de réexaminer la manière dont les histoires de femmes ont été traitées. Elle souhaite, par exemple, que les violences sexuelles basées sur le genre ne constituent pas seulement une agression en soi mais soient traitées comme une question transversale afin de démontrer le système de prédation sexuelle mis en place par l’ancien président. "Le documentaire est intitulé : 'Pour qui tu te prends ?'. Un titre tiré de mon expérience personnelle quand Yahya Jammeh m’a demandé pour qui je me prenais avant de me violer. Beaucoup de victimes doivent répondre à cette question non seulement posée par leur violeur mais aussi par la société une fois qu’elles ont parlé de leur viol".
Avec sa fondation, Toufah Jallow a aussi réalisé des vidéos de réalité inversée où les femmes dominent la société. Des vidéos en langues locales de déconstruction des normes pour sensibiliser sur le sexisme et selon elle, elles sont essentielles pour repenser les rôles de genre dans la société gambienne.
En Inde, conduire un taxi n'est plus réservé aux hommes
En Inde, pays très patriarcal, les femmes brisent un nouveau plafond de verre en devenant chauffeuses de taxi, un métier généralement réservé aux hommes. Une association appelée Azad, ce qui signifie liberté en hindi, forme ces femmes de milieux populaires pendant de longs mois, à conduire, bien sûr, mais à s’exprimer aussi, et à se défendre si besoin, à prendre confiance en elles, et c’est souvent une vraie transformation qui s’opère.
With increasing job loss & diminishing opportunities for work in the current COVID times, our East Delhi trainees have paved their way towards dignified livelihood options while riding e bikes for India’s largest online food & grocery store @bigbasket_com pic.twitter.com/88ab4jq0kc
— Azad Foundation (@FoundationAzad) October 27, 2020
En conduisant un taxi, ces Indiennes se réapproprient l’espace public."La plupart des gens pensent qu’une femme ne peut pas conduire un taxi, mais moi j’adore cela, raconte Deepa, une chauffeuse de 30 ans. Avant cela, je n’avais conduit aucun véhicule, pas même un vélo. Donc je suis très fière." Ce service est maintenant disponible à l’aéroport de New Delhi. Les formations ont débuté en 2008 et plus de 2 500 femmes ont appris le métier. Elles travaillaient jusqu’à présent pour des particuliers ou des entreprises.
Ce service offert uniquement depuis l'aéroport de New Delhi est vraiment utile, explique Mme Kakoli, une cliente arrivée de nuit : "C’est clairement mieux que les autres taxis. Je préfère que ce soit une femme qui me conduise, surtout la nuit, dans cette ville que je ne connais pas et qui n’a pas bonne réputation." Ce service de chauffeuses est présent dans quatre villes du nord de l’Inde. Et devient une nouvelle manière de faire changer les mentalités dans une région très patriarcale.
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