COP28 : les pays de l'Union européenne tentent de faire passer leurs mesures environnementales

Alors que s'ouvre la COP28 à Dubaï, l'Irlande essaye de s'attaquer aux data centers tandis qu'en Allemagne le parti écologiste, au gouvernement depuis deux ans, traverse une passe difficile.
Article rédigé par Sébastien Baer - Clémence Pénard
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5 min
Le vice-chancelier allemand, Robert Habeck, leader du parti écologique, Les Verts. (MICHAEL KAPPELER / DPA)

En Allemagne, les Verts étaient pourtant en position de conquérir la chancellerie en 2021. Ils étaient devenus incontournables, portés par la thématique de la protection du climat et récoltant jusqu'à 28% des intentions de vote, à leur apogée. Mais depuis leur entrée au gouvernement, les relations avec les libéraux du FDP, troisième partenaire de la coalition et défenseurs acharnés de la rigueur budgétaire, sont particulièrement compliquées et marquées par des querelles fréquentes.

Les Verts apparaissent souvent comme le parti de l’interdiction, avec une image de donneur de leçons. Dans les enquêtes d’opinion, le parti n’est plus qu’à 12%, son pire score depuis 5 ans et parmi les 126 000 adhérents, beaucoup reprochent aux leaders leurs positions changeantes et leurs renoncements.

Les Verts paient donc au prix fort leur participation au gouvernement alors qu'avant d'être au pouvoir, ce sont eux qui bousculaient. Ils sont victimes des compromis auxquels ils doivent se résigner, notamment sur la décarbonisation et le droit d'asile. Le parti doit aussi parfois avaler des couleuvres et accepter la prolongation des centrales nucléaires ou la réouverture des centrales à charbon.

Des querelles au sein de la coalition

Un homme, en particulier, cristallise le mécontentement : le vice-chancelier et ministre de l’Économie, Robert Habeck. Il est la cible permanente de l'extrême droite et il est accusé de s’attaquer aux libertés individuelles au nom de la lutte contre le réchauffement climatique. Sa mesure certainement la plus impopulaire est la loi chauffage, prévue pour janvier 2024. Elle impose aux nouvelles chaudières de fonctionner avec au moins 65% d’énergie renouvelable. Un projet jugé coûteux pour les ménages dans un contexte d’inflation et que le numéro 2 du gouvernement a dû revoir.

Les déboires financiers du gouvernement ne vont pas arranger les affaires du parti écologiste, puisque l'enveloppe de 60 milliards d'euros, économisée pendant la crise sanitaire et que la coalition voulait affecter à la transition écologique, a été invalidée par le Conseil constitutionnel. Désormais, dans chaque ministère, les équipes épluchent les dépenses, poste par poste, en quête d’économies. Cela met en péril plusieurs projets portés par les Verts pour protéger le climat.

Pour sortir de ce mauvais pas, les Verts plaident pour la suspension du frein à l’endettement, à savoir la règle qui limite le déficit à 0,35% du PIB chaque année. Cela permettrait à la coalition de retrouver un peu d’air et de financer des projets, mais là encore, les Verts font face au refus catégorique de leurs partenaires du FDP.

Ils restent donc deux solutions pour trouver l'argent manquant. La première serait d'augmenter les impôts et les taxes. La deuxième serait de réduire les moyens dédiés à la protection du climat. Cette dernière ne ferait décidément pas les affaires des Verts, mais c'est la plus probable.

L'Irlande, pays des géants de la tech et du numérique

Les data centers constituent une nouvelle menace pour l'environnement. Ces gros centres de données regroupent serveurs, disques durs et autres routeurs, absolument nécessaires au fonctionnement des entreprises liées à Internet comme Google, Amazon, Meta ou encore Microsoft, qui ont choisi de s’installer à Dublin grâce à une taxation plus qu’attractive.

Il y a une trentaine d’années déjà, l’Irlande a lié son destin à ces GAFAM. Depuis une petite décennie, les annonces de nouveaux chantiers de data centers s’enchaînent à un rythme effréné. De quoi offrir à la République irlandaise le titre de premier hébergeur européen de ces centres de données. Actuellement, il y en a 82 dans le pays, et tous, exceptés cinq d’entre eux, se trouvent dans la région de Dublin.

"C’est beaucoup par rapport à la taille de l’Irlande et disproportionné par rapport à la population, explique Barry McMullin, professeur à l’École de génie électronique à l’Université de Dublin. Les émissions de dioxyde de carbone directement associées à la consommation d’énergie des data centers sont très importantes, explique-t-il. Honnêtement, il y a aujourd’hui un conflit entre la poursuite d’objectifs économiques et le simple respect de nos obligations environnementales mondiales."

Quand ils sont construits, ces data centers modifient aussi évidemment le paysage et ont un impact direct sur la faune et la flore. Ensuite, d’énormes quantités d’eau sont utilisées, pour les refroidir, afin d’éviter la surchauffe. Enfin, leur consommation en énergie est gigantesque, ce qui ferait même craindre des pannes d’électricité cet hiver, prévient le régulateur irlandais de l’énergie.

Des politiques demandent la mise en place d'un moratoire

Brid Smith, membre du parti d'extrême gauche People Before profit, explique que "dans la plupart des pays européens, les data centers ne peuvent pas consommer plus de 4,5% du réseau électrique national. En Irlande, on est à 18%. Lorsque c’est passé à 11% à Singapour, qui est une économie assez semblable à la nôtre, ils se sont stoppés à 11%. Ils ont dit maintenant, c’est trop, on ne peut pas aller plus, donc plus de centres de données."

Si le gouvernement irlandais réfute l’idée d’un moratoire, il mise tout de même sur une dispersion des data centers pour soulager la pression sur le réseau électrique. Dans les prochaines années, les futures constructions devraient donc plutôt voir le jour sur la côte ouest du pays.

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