Une "femme surpuissante" qui "sait se réinventer en permanence" : comment la chanteuse Taylor Swift a bâti son empire musical

Entre des ventes de disques mirobolantes, des records qui s'enchaînent et une armée de fans, il ne se passe pas un jour (ou presque) sans que l'on parle de Taylor Swift. Que ce soit d'ailleurs pour sa musique, sa vie privée ou ses affaires. Si la chanteuse américaine de 33 ans a une carrière à faire pâlir n'importe qui, elle a connu un début de carrière compliqué par les moqueries et déceptions.

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Mais sa capacité à toucher différents types de public, son combat pour son indépendance musicale et bien sûr ses millions de fans partout dans le monde, font d'elle ce qu'elle est aujourd'hui : une "femme surpuissante" et incontournable.

À la frontière entre la country et la pop

Pourtant, sa carrière débute sur une humiliation. Le 13 septembre 2009, à 19 ans, Taylor Swift devient la première artiste étiquetée country à remporter un MTV Music Awards avec le prix de la "meilleure vidéo féminine". Mais pendant qu'elle reçoit sa récompense sur scène, Kanye West lui arrache le micro des mains, lui coupe la parole et déclare notamment : "Taylor, je suis très heureux pour toi, je te laisserai finir après, mais Beyoncé a fait l'un des meilleurs clips vidéo de tous les temps !" Une séquence humiliante, mais qui va forger sa stature, son caractère et sa popularité. Parce qu'aujourd'hui, Taylor Swift, ce sont dix albums solo, plus de 50 millions de disques vendus, des records de ventes et d'écoutes à la pelle.

Aujourd'hui, elle est aux côtés de Beyoncé, la pierre angulaire de l'industrie musicale, suscitant admiration et jalousie. Au point que le quotidien USA Today vient de poster une annonce en vue de recruter un reporter spécialement chargé de suivre son actualité. "En termes d'influence, elle a tout ce qu'il faut et elle est vraiment énorme aux États-Unis. C’est-à-dire qu'elle est vraiment partout, c'est une femme surpuissante", explique Sophie Rosemont, journaliste et autrice notamment du livre "Girls Rock". "Taylor Swift, elle jette ce pont entre ce terreau country qu'elle voulait absolument apprivoiser, maîtriser, et la pop." Et d'estimer que la chanteuse est très vite devenue "une femme à la tête très dure, sans doute aguerrie par bien des déceptions et moqueries".

On s'est quand même beaucoup moqué d'elle et je crois que ces moqueries qu'elle a subies lui ont constitué une cuirasse en béton armé.

Sophie Rosemont

à franceinfo

De la country de ses débuts, à l'indie rock de ses derniers albums, Taylor Swift transforme en or tout ce qu'elle touche. Le tout, animée d'une sorte d'esprit de revanche très américain. "La notion de revanche, c'est quelque chose qui semble animer beaucoup Taylor Swift. Après, elle ne va pas forcément parler de revanche, mais de karma par exemple", analyse Morgane Giuliani, journaliste et autrice de Féminismes et Musique, à paraître le 27 octobre. Justement, l'un des titres de son dernier album s'appelle Karma.

"C'est quelqu'un qui sait se réinventer en permanence, je pense que c'est aussi pour ça qu'on se retrouve avec une artiste aussi importante aujourd'hui, c'est parce qu'elle a pu toucher différents types de public parce qu'elle a su toucher à différents types de musique", résume toujours Morgane Giuliani.

Une tournée à près de 150 dates

Taylor Swift, c'est aussi cette chanteuse qui a décidé il y a quelques années de réenregistrer ses premiers albums, pour en récupérer les droits. Des droits rachetés par le magnat de l'industrie musicale Scooter Braun quand il a acquis son ancienne maison de disques. Dans son combat pour son indépendance musicale, elle réenregistre donc ses titres un à un, avec à chaque fois le même résultat : des records et des chansons numéros un à chaque sortie.

Sans oublier une tournée hallucinante. Les chiffres de The Eras Tour - toujours en cours - font tourner la tête : près de 150 dates programmées pour l'instant, plus d'un milliard et demi de dollars de revenus avec la seule billetterie et quatre dates complètes à Paris... Ce sont donc 160 000 spectateurs qui vont se succéder pour la voir sur la scène de La Défense Arena, en mai prochain.

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Autre illustration de sa puissance, elle a forcé un blockbuster annoncé, la suite de L'Exorciste, à décaler sa date de sortie en salles pour éviter la concurrence avec le documentaire racontant cette tournée, Taylor Swift : The Eras Tour, qui doit sortir aux États-Unis dans deux semaines.

Ses fans, l'une de ses grandes forces

Le pouvoir de Taylor Swift vient aussi de ses fans, qui s'appellent les "Swifties". Par exemple, à Paris, ils organisent chaque mois des croisières sur la Seine pour chanter à tue-tête ses plus grands tubes.

D'autres enseignent même la "littérature version Taylor Swift". À l'université de Gand, en Belgique, c'est ce que fait la professeure Elly McCausland, qui se définit bien volontiers comme fan : "Malheureusement, j'ai trop de demandes et je dois refuser beaucoup de monde."

Elle pique donc l'intérêt de ses étudiants en master, qui étudient les textes de la chanteuse, en les faisant entrer dans une longue tradition littéraire. "Dans ses chansons, elle cite ou fait allusion à de nombreux ouvrages classiques ou a des auteurs. Et elle parle souvent du fait d'écrire, d'être une autrice. Elle fait partie d'une large tradition de littérature anglaise et elle est consciente de la manière dont elle y contribue." "On lui colle la réputation de ne chanter que sur l'amour et les cœurs brisés, mais en réalité, c'est totalement faux", ajoute l'enseignante.

En juillet dernier, elle est devenue la première femme à classer quatre albums, dont le dernier, Midnights, dans le Top 10 des ventes aux États-Unis. Et ce n'est même plus une surprise.