Témoignages
"L'ambiance est pesante, tout est bloqué" : l'inquiétude des cadres supérieurs avant le verdict des législatives

À quelques jours du scrutin des législatives, des cadres supérieurs confient leurs craintes vis-à-vis de la potentielle arrivée au pouvoir du Rassemblement national ou du Nouveau front populaire.
Article rédigé par franceinfo
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Les législatives auront lieu les 30 juin et 7 juillet prochains. (JEAN-MARC BARRERE / HANS LUCAS via AFP)

À quatre jours du premier tour des élections législatives, franceinfo continue de prendre le temps d’écouter les préoccupations, espoirs et colères des Français. Les journalistes Boris Loumagne et Valentin Dunate sont respectivement en Gironde et dans l’Yonne pendant deux semaines. Dernier épisode, cette fois, à l'aéroport de Bordeaux-Mérignac. franceinfo y a rencontré des cadres supérieurs, inquiets de l'arrivée au pouvoir du RN ou du Nouveau front populaire.

Ils sont ce que l'on pourrait appeler des "gagnants de la mondialisation", mais pour la première fois ils ont peur de perdre gros avec ces élections législatives. "L'image de la France était celle d'un pays plutôt libre et plutôt tempéré et là c'est vrai que c'est quand même incertain", témoigne notamment Hélène, directrice commerciale dans une PME spécialisée dans les revêtements de sol. Elle vient participer à Bordeaux à l'assemblée générale de l'UFTM, l'Union française des tapis moquettes.

Absence de visibilité

D'après elle, au sein de la profession, l'ambiance est morose. On craint, assure-t-elle, une perte d'influence de la France au niveau européen en cas d'arrivée au pouvoir du RN ou du Nouveau front populaire. "Par exemple pour les normes sur les produits textiles, on doit s'appuyer sur l'Europe, le classement feu par exemple, on découvre que c'est l'Australie qui décide, et il faut que cinq Européens puissent décider et faire poids vis-à-vis de l'Australie. Donc bien entendu l'Europe a son importance au niveau des métiers du bâtiment et des textiles", explique-t-elle. 

Quel poids aura donc la France dans quelques jours ? Quelle image renverra-t-elle également ? Hélène a déjà un début de réponse en observant la nature du débat politique actuel.

"C'est devenu une bataille qui est très très violente, très agressive, ce n'est pas du tout l'image de la France. Là il y avait des Belges, des Hollandais, tout le monde est plutôt gêné en fait."

Hélène, cadre dans une PME

à franceinfo

Cette cadre éprouve de la gêne mais aussi de la crainte. L'incertitude liée aux résultats des élections a totalement paralysé les projets en cours estime-t-elle. "Là l'ambiance est pesante au niveau visibilité, on sait que là actuellement c'est tout bloqué, travailler, facturer, les projets du bâtiment, pour l'instant tout est bloqué". Sérénité et visibilité, voilà ce qu'elle espère retrouver à l'issue de ces élections.

Programmes "utopiques"

Cette inquiétude du monde économique, on la constate chez un autre cadre supérieur qui travaille pour sa part dans la finance. Régis est Gérant de portefeuilles financiers dans une banque régionale. Il effectue des placements financiers pour des particuliers ou des entreprises et se trouve donc aux premières loges pour constater actuellement la fébrilité des marchés financiers.

"Les programmes des deux partis politiques aujourd'hui favoris très clairement font peur puisque ça pourrait avoir des impacts très concrets sur différents secteurs, comme celui des concessions autoroutières, des médias, des banques, éventuellement aussi des secteurs exportateurs comme le luxe ou l'automobile"

Régis, gérant de portefeuilles financiers

à franceinfo

Ces programmes font peur "dans le sens où si une certaine coalition décidait de prendre des mesures protectionnistes, inévitablement on aurait des incidences sur certains secteurs d'activité", poursuit Régis, "donc très clairement aujourd'hui les investisseurs s'inquiètent vraiment de l'arrivée au pouvoir de partis ayant des programmes pas du tout rationnels par rapport à leur perception de l'économie."

Si ses clients se disent inquiets, Régis, lui-même, est également préoccupé. Il suit de près la campagne électorale, lit les programmes, et est affligé par le caractère, dit-il "utopique" de certaines promesses du RN ou du Nouveau front populaire. 

"Ces partis font preuve de beaucoup de démagogie. C'est en tout cas ma perception en tant que citoyen, juge Régis. Malheureusement cette démagogie est possible parce que malheureusement beaucoup des citoyens ont une culture économique relativement faible et ne perçoivent donc pas tous les enjeux et incidences de ces programmes économiques sur leur vie au quotidien. Beaucoup de citoyens considèrent encore que l'Etat peut dépenser sans compter. Pourtant on a eu des exemples comme la Grèce qui a dû restructurer très massivement sa dette au détriment de l'ensemble des citoyens."

Pour éviter un destin à la grecque, Régis ira donc voter dimanche pour, dit-il, "un parti de gouvernement", comme la plupart de ses collègues et de ses clients.

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