Reportage
Le halal, un marché en constante augmentation et diversification, qui "représente des milliers de milliards de dollars !"

Le marché du halal représente plusieurs milliers de milliards de dollars aujourd'hui et ne cessent de croître et de se diversifier, comme en témoigne le Sommet mondial du halal qui vient de s'achever en Turquie.
Article rédigé par Marie-Pierre Vérot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 104 min
Le marché du halal devrait représenter 10 000 milliards dans les cinq prochaines années. (Photo d'illustration) (RICCARDO MILANI / HANS LUCAS)

Le Sommet mondial du halal vient de s'achever en Turquie. Le halal est un marché très important qui représente 7 000 milliards de dollars aujourd’hui et devrait même monter à 10 000 milliards dans les cinq prochaines années. C’est l’un des marchés en plus forte croissance avec une augmentation de 7 à 8 % chaque année, d’abord parce que la population musulmane s’agrandit, que son niveau de vie s’élève, notamment en Afrique, ensuite parce que cette population désire de plus en plus de produits estampillés halal.

Paradoxalement, les plus gros exportateurs de ce type de produits ne sont pas des pays musulmans. C'est le Brésil qui est en tête, avec ses exportations de viande. Aucun pays musulman ne figure dans le top cinq.

Dans les allées du Sommet mondial à Istanbul, un producteur espagnol de vin aligne ses bouteilles. "Cela ressemble à du vin, nous l’avons voulu ainsi, mais ce n’est pas du vin, explique le producteur. Nous nous sommes adaptés au "style de vie" halal. C’est donc du vin sans alcool issu de nos vignes autochtones en Espagne. C’est d’ailleurs avec les mêmes vignes que nous produisons nos vins alcoolisés. Notre vignoble est géré de manière traditionnelle, en famille, depuis 1850 mais nous sommes ouverts aux innovations. C’est pour cela que nous nous sommes lancés dans le halal. On lit que ce marché représente non pas des milliards mais des milliers de milliards de dollars ! Nous voulons commercer avec les pays les plus importants pour le halal comme l’Indonésie ou la Malaisie. Nous disposons d’un certificat halal en tant que producteur qui nous permet d’exporter dans les pays musulmans." La Malaisie a d'ailleurs été pionnière pour créer cette certification halal dans les années 1970.

Le marché du tourisme halal

Depuis, le halal a gagné d’autres secteurs que l’alimentaire. Ainsi, il existe même un tourisme halal, comme l'explique Murat Yas qui enseigne l’économie halal à l’université Marmara. "Pour délivrer un certificat halal dans le tourisme, on va regarder si les hôtels fournissent de la nourriture halal ou non, s’ils servent de l'alcool, analyse le professeur. On va aussi vérifier si, dans les chambres, une flèche  indique la direction de la Mecque, s’il y a un tapis de prière, un Coran. Il ne doit pas y avoir de photos de femmes ou de peintures non-islamiques au mur. Les hommes et les femmes doivent avoir des piscines distinctes. Le personnel doit être vêtu de manière conforme aux préceptes de l’Islam. Il y a donc toutes ces règles pour les voyageurs musulmans parce qu’ils veulent aller en Europe, en Asie, en Amérique, en Afrique tout en préservant leurs valeurs."

"De nombreux pays proposent un guide pour les voyageurs musulmans afin qu’ils sachent où trouver de la nourriture halal, un hôtel halal, ou des hôpitaux accueillants pour les musulmans. C'est le cas à Tokyo, au Japon, par exemple. L'objectif est d'attirer plus de touristes, car les musulmans représentent environ 10% du total des voyageurs dans le monde."

Murat Yas, professeur d’économie halal à l’université Marmara

à franceinfo

Mais cela fonctionne aussi dans l’autre sens : les opérateurs de tourisme halal veulent également séduire les non-musulmans. "Bien sûr nous nous adressons aux voyageurs musulmans, mais cela n’empêche pas les non-musulmans de faire l’expérience du tourisme islamique, affirme Marina Muhamad du centre du tourisme islamique de Kuala Lumpur. Parce que nous sommes attentifs à l’accueil des familles, à la sécurité et pour labelliser un hôtel "accueillant pour les musulmans", nous faisons aussi attention à la durabilité, aux hôtels qui pratiquent le zéro déchet, le recyclage. Et nous étendons notre certification aux spas et centres de bien être mais aussi au tourisme médical." Un marché dont la Turquie veut d’ailleurs prendre la tête.

Halal et respect de l'environnement

La certification halal est parfois mise un peu à toutes les sauces, notamment pour les produits cosmétiques. "Ce ne sont pas des produits uniquement liés à l'islam mais aussi à l'environnement, explique Wassilia Ouldchik, co-organisatrice du Sommet. Quand on parle de cosmétiques halal, on parle de produits qui ne contiennent pas de produits chimiques, qui respectent l'environnement et donc c'est tout ce qui est bio, naturel. En fait, l'appellation peut changer d'un pays à l'autre, d'une culture à une autre. La certification halal sert plutôt à renforcer et faciliter les échanges commerciaux quand la destination est un pays de consommation musulmane."

D’ailleurs il existe une vraie compétition dans la certification halal. Les pays musulmans s’y sont mis et tentent de définir une norme commune pour imposer leur certification, un gros business.

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