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Les avancées et les inquiétudes suscitées par Crispr-Cas 9, les "ciseaux génétiques"

Elles ne pourront pas aller chercher leur prix Nobel de chimie à Stockholm à cause du Covid-19. Mais, aujourd’hui, un symposium international est consacré à la découverte d’Emmanuelle Charpentier et Jennifer Doudna sur la technique des ciseaux moléculaires Crispr. 

Article rédigé par franceinfo, Anne-Laure Barral
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Une chercheuse observe le processus des ciseaux génétiques dans un laboratoire de Berlin (Allemagne). (GREGOR FISCHER / DPA)

Les "ciseaux génétiques", appelés Crispr-Cas 9 découverts il y a près de dix ans, sont en fait des ciseaux à découper le code génétique. Ils permettent de séparer deux brins d’ADN et de remplacer ou de supprimer un gène. Quand les scientifiques américaine et française Jennifer Doudna et Emmanuelle Charpentier ont fait cette découverte, cela a ouvert la voie à de nombreuses recherches. Aujourd’hui des scientifiques américains, européens et australiens se retrouvent donc en visioconférence pour faire leur point sur leurs avancées. 

Un espoir contre les maladies génétiques

Crispr fait par exemple énormément avancer les recherches sur les thérapies géniques. Aujourd’hui, cette technique permet de traiter des personnes atteintes de myopathie Duchenne, une des maladies génétiques souvent évoquées lors du Téléthon.  L’Inserm a aussi pu réactiver un gène pour lutter contre la drépanocytose : une maladie du sang lié là aussi à un problème génétique. Par ailleurs, la société eGenesis travaille sur des porcs débarrassés de virus dangereux pour l'homme. Les animaux deviendraient alors de parfaits donneurs d'organes pour les patients en attente de greffe du coeur, du pancréas, etc...  

Quand Crispr tombe dans les mains d'un docteur Mabuse

La technique Crispr s'est développée dans de nombreux laboratoires dans le monde entier et il y a deux ans, un chercheur chinois, He Jiankui, a fait scandale après avoir annoncé l'avoir utilisée pour créer par fécondation in vitro deux bébés OGM résistants au VIH dont le père était porteur. D’après une enquête, dans la MIT Technology Review, le chercheur a forcé la main des parents qui voyaient dans cette manipulation génétique la seule façon d’avoir des enfants sans risque. En plus, aujourd’hui on ignore comment les bébés se portent et quelles autres conséquences génétiques a eu l’usage de Crispr sur eux. Le chercheur est toujours assigné à résidence en Chine

Les chercheuses plaident pour l'usage de leur découverte avec éthique

Emmanuelle Charpentier dans une interview au Point critique évidemment le non-respect de critères éthiques pour l'utilisation de ses ciseaux appliqués à la recherche pour les humains. En revanche, elle ne partage pas les doutes des associations paysannes et écologistes sur les plantes modifiées par Crispr-Cas 9 et considérées comme des OGM en Europe. Pour elle, son innovation permet de booster un gène de la plante, de reproduire de façon accélérée ce qui peut se passer dans la nature. Ce n’est pas comme créer des plantes mutantes avec un gène qui vient d’autres espèces.

Appliquée à l’agriculture, Crispr-Cas 9 permet de créer des cacahuètes sans allergène, du blé sans gluten, du riz plus résistant à la sécheresse mais aussi de supprimer les cornes des vaches ou de faire des troupeaux uniquement de mâles. Crispr-Cas 9 demande donc encore plus de méditer la phrase de Rabelais : "Science sans conscience n'est que ruine de l'âme". 

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