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Le billet vert. Climat et fake news : pourquoi l'action climatique a pris autant de temps à se mettre en place

L'hebdomadaire "Le 1" sort mercredi un numéro spécial intitulé "Climat et fake news". Dans lequel les climatologues français expliquent qu'ils ont eu les plus grandes difficultés à faire admettre leurs travaux sur le réchauffement de la planète.

Article rédigé par franceinfo, Anne-Laure Barral
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Les températures battent des records à Valence (Drôme), le 23 juillet 2019. (FLORENCE GOTSCHAUX / FRANCE-BLEU DRÔME-ARDÈCHE / RADIO FRANCE)

Les climatologues français expliquent qu'ils ont eu les plus grandes difficultés à faire admettre leurs travaux sur le réchauffement de la planète, en particulier les modélisateurs : ceux qui nous donnent des prévisions sur l'évolution du climat. Mardi, justement, une équipe de chercheurs du CNRS, de Météo France et de l'Institut Pierre-Simon Laplace a présenté un nouveau modèle climatique plus précis et plus inquiétant, selon lequel à la fin du siècle on pourrait atteindre une hausse de 7°C de la température moyenne si rien n'est fait.

La modélisation du climat est vraiment un savoir-faire de la recherche française. Elle s'ajoute au modèle américain, britannique. Les Indiens, les Chinois travaillent aussi sur leur propre modèle. Tous ces chercheurs mettent leur travaux en commun dans les rapports du Giec. Ce modèle va donc alimenter le prochain rapport des experts du climat prévu en 2021. Hervé Le Treut en est l'un des pionners. Ce mathématicien a participé aux premiers rapports du Giec, le groupe des experts internationaux sur le climat. 

Hervé Le Treut, un pionner de la modélisation climatique

 
Ce mathématicien de formation témoigne dans Le 1 pour expliquer pourquoi l'action climatique a mis autant de temps à se mettre en place et comment la science du climat a été attaquée de toutes parts lors des premières conclusions du Giec et surtout de la COP15 à Copenhague. Il y a 40 ans, lorsque Hervé Le Treut a commencé, même au sein de la communauté scientifique, la climatologie n'est pas bien comprise, pas bien reconnue. Très vite, il y a ceux qui ne veulent pas être convaincus et leurs marchands de doutes qui trichent avec des études bidons.

En science le doute c’est bien, c’est même nécessaire pour faire avancer la recherche. Le Giec parle à l’époque de "faisceau de présomptions". En toute bonne foi, certains scientifiques veulent refaire les calculs. Ils estiment que certaines règles de la thermodynamique ne sont pas respectées. Et il a fallu du temps pour affiner les données et répondre à leurs doutes. Et puis il y a les exemples ravageurs comme sur le Groënland. Les Vikings l'auraient appellé ainsi "Terre verte" parce qu'il faisait déjà plus chaud à leur époque. L'analyse de carottes de glace montre que le climat du Groënland n’a pas beaucoup changé depuis les Vikings. Mais Hervé Le Treut explique que cet exemple lui est encore très souvent ressorti. Il admet qu’il fallait être armé scientifiquement pour voir ces faux arguments. Les décideurs y ont été plus sensibles et on préférait inviter Claude Allègre sur les plateaux, plus connu, plus charismatique, alors qu’il est géochimiste et pas climatologue.

Développer la culture scientifique

La climatologie attire beaucoup de chercheurs, aujourd’hui. Mais la question reste : la culture scientifique progresse-t-elle au sein de la société et des décideurs ? En voyant Donald Trump on peut en douter. De toute façon, tout le monde n'aura pas le niveau master en sciences du climat ou en thermodynamique des fluides pour comprendre si quelqu'un est de mauvaise foi ou pas dans ses arguments face aux constats des rapports du Giec. Le Giec avec son résumé pour décideurs tente de rendre accessible ses recherches au grand public.

Mais au sein de la communauté scientifique, la vulgarisation pose de réels problèmes de conscience parce que les chercheurs préfèrent garder les nuances quand le public veut de la simplification. Aujourd'hui, le débat en France porte moins sur le constat face au réchauffement climatique que sur les solutions à mettre en place. Il suffit parfois à certains de ne pas vouloir d’éoliennes en face de chez eux parce qu’ils trouvent ça moche ou trop bruyant, pour contester des décennies de recherche sur le réchauffement climatique.

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