Le trou de ver, la nouvelle star de la physique

Entre Interstellar et les films de Marvel, le trou de ver reste l’objet le plus fantasmatique de la SF – cette porte cosmique est très pratique pour voyager instantanément entre deux endroits éloignés de l’Univers. Et si le trou noir central de notre galaxie était en fait un trou de ver ?
Article rédigé par franceinfo - Hervé Poirier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le trou de ver, l’objet le plus fantasmatique de la science fiction : un tunnel spatiotemporel qui relie deux endroits éloignés de l’Univers, une sorte de porte cosmique. Toute une communauté de théoriciens et d’observateurs s’intéresse de plus en plus au sujet. (Illustration) (BRUCE ROLFF/STOCKTREK IMAGES / GETTY IMAGES)

Hervé Poirier, rédacteur en chef au magazine scientifique Epsiloon nous embarque aujourd'hui dans la science-fiction. Et si le trou noir central de notre galaxie était en fait un trou de ver ? Et s’il y en avait partout ? Et si c’était la clé pour comprendre l’espace-temps ?

franceinfo : Vous voulez nous faire passer à travers un trou de ver ?

Hervé Poirier : C’est totalement délirant, oui. Le trou de ver, c’est l’objet le plus fantasmatique de la SF. On en voit dans Interstellar, dans les films de Marvel ou dans les vieux comics : c’est ce tunnel spatiotemporel qui relie deux endroits éloignés de l’Univers, une sorte de porte cosmique, souvent représentée par un cercle de feu : dans les scénarios, c’est très pratique pour voyager.

À la base, c’est une idée d’Einstein, qui se demandait ce qui se passe si on fait interagir deux trous noirs. Les équations relativistes montrent que cela crée une connexion, une sorte de pont : si on rentre par l’un, on ressort par l’autre. Cela a inspiré les auteurs de SF, mais pendant longtemps, pas les physiciens.

Les rares études tendaient à montrer que la structure n’est pas stable ; la porte ne reste ouverte qu’une fraction de seconde ; pas même une particule ne peut le traverser. Sauf qu'aujourd'hui, cette star de cinéma est en train de devenir un objet central de la physique.

Qu’est-ce qui a changé ?

Le déclencheur a été un article de 2016, qui montrait pour la première fois qu’il pourrait en fait exister des trous de ver stables et traversables. Depuis, des dizaines d’articles ont été publiés sur le sujet, et signés par de grands physiciens. Il a par exemple été montré récemment qu’un trou de ver suffisamment grand peut être traversé par un humain, qui se prendrait une accélération de 10G – supportable – et se retrouverait propulsé en quelques secondes, à des dizaines de milliers d’années-lumière – avec toutefois le risque de se faire griller par des particules qui arrivent dans le sens inverse…

Ces études théoriques portent sur des modèles d’univers simplifiés : pour décrire avec précision un trou de ver, il faut marier la mécanique quantique et la relativité générale, ce qui reste encore aujourd’hui hors de portée. Mais un lien profond est en train de tisser avec l’intrication quantique, qui décrit la propension de deux particules à rester connectées l’une à l’autre, même lorsqu’elles s’éloignent. C’est fascinant. Le trou de ver est devenu le nouveau laboratoire de la physique théorique.

Et ça pourrait vraiment exister ?

Les observateurs commencent à se poser sérieusement la question, grâce aux détecteurs de trous noirs qui ont déjà été déployés. D’après leur analyse, un trou de ver ressemblerait à un trou noir, mais avec une signature singulière, une sorte d’oscillation caractéristique. Et si le trou noir central de notre galaxie était en fait un trou de ver ? Et si, en entrant dedans, on se retrouvait immédiatement propulsé à l’autre bout de l’univers ? La question est délirante. Mais ce n’est plus de la SF !

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