Covid long : deux mécanismes pour l’expliquer

Quatre ans et demi après l'apparition du coronavirus, c’est un immense effort de recherche qui a été fait, qui dévoile plusieurs mécanismes qui maintiennent les symptômes du covid long, des semaines, voire des mois après l’infection. Les premiers essais cliniques débutent.
Article rédigé par franceinfo - Mathilde Fontez
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Temps de lecture : 4min
Royaume-Uni. 27 janvier 2024. Fran Haddock, 33 ans, et Dan Kenny, 35 ans, se sont rencontrés alors qu'ils étudiaient la médecine vétérinaire. Depuis que Fran a contracté le Covid, son monde s'est réduit à l'intérieur de sa maison à Oughtibridge (Sheffield). Elle est complètement alitée, nécessitant l'utilisation d'un fauteuil roulant pour se déplacer entre les pièces. (RHIANNON ADAM / THE WASHINGTON POST /  GETTY IMAGES)

Avec Mathilde Fontez, rédactrice en chef du magazine scientifique Epsiloon, on évoque, 4 ans et demi après la pandémie, 2 ans après l’apparition des premiers cas, cette forme chronique du covid, qu'on appelle le covid long.

franceinfo : Les chercheurs qui étudient cette maladie commencent à en comprendre les mécanismes…  

Mathilde Fontez : Oui, cela a été un long chemin pour en arriver là. Il faut se rappeler que lorsque les premiers cas de covid long sont apparus en 2020 – ces patients qui des semaines, des mois même après l’infection, retournaient consulter parce qu’ils étaient fatigués, parce qu’ils avaient des maux de tête, du mal à réfléchir. Lorsque ces cas sont apparus, on a d’abord cru que c’était psychosomatique. On a cru que c’était un traumatisme de l’infection qui durait, mais sans véritable cause sous-jacente. 

Sauf que devant la multitude de cas et la lourdeur des symptômes, un gros effort de recherche a été lancé. Aujourd’hui, on sait que le covid long touche 10 à 20% des personnes qui ont été infectées par le covid. On estime que la maladie touche 2 millions de personnes en France, 65 millions dans le monde. Et, enfin, deux mécanismes ont été découverts pour l’expliquer. 

C’est lié à la présence du virus qui reste dans le corps après l’infection ? 

En fait, pas directement : ce qui se dessine, c’est plutôt un dérèglement immunitaire, qui dure après l’infection. Le premier de ces mécanismes, a été découvert par une équipe de l’hôpital de Zurich, en Suisse. Les chercheurs ont analysé les cellules du sang des patients, et découvert fin 2023, une modification des protéines liées à une voie immunitaire, qu’on appelle le "système du complément".

Les chercheurs ont vu que ce système reste activé après la fin de la maladie, ce qui expliquerait beaucoup de symptômes du covid long, comme l’épuisement, la fatigue après l’effort, les difficultés de concentration.

Et le second mécanisme ? 

C’est une équipe de l’université de Pennsylvanie aux États-Unis qui a observé une baisse généralisée du taux de sérotonine dans l’organisme – là encore, à partir de l’analyse du sang des patients. Cette baisse s’explique notamment par une hyperactivité des plaquettes, et elle provoque des troubles du fonctionnement du cerveau, qui pourraient être à l'origine du sentiment de dépression et d'épuisement. 

De quoi commencer à lancer des essais cliniques, pour essayer de cibler ces deux mécanismes. Une quinzaine d'essais ont démarré – aucun en France pour le moment – avec des traitements différents de ceux utilisés pour le covid aigu : par exemple, avec des antidépresseurs, pour re-réguler la sérotonine. 

Bref, ça commence : on commence à comprendre le covid long. Et ces découvertes éclairent aussi le fonctionnement de notre immunité : comment le corps réagit à une infection, des mois après. C’est quoi une guérison, au-delà même du covid : puisqu’on découvre aussi des symptômes après d’autres infections, comme la grippe, ou même le rhume.

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