Un credo pour temps de guerre
Pendant les quatre années de la Grande Guerre, les Français ont chanté – et beaucoup chanté. Mais l’écrasante majorité des chansons écrites pendant et à propos de cette immense épreuve collective n’ont pas été enregistrées et ont disparu des mémoires.
Nous avons exhumé les partitions de ces chansons, oubliées depuis près d’un siècle dans les bibliothèques et les archives : grands succès des vedettes de l’époque, chants des régiments, hymnes patriotiques ou comptines apprises aux enfants, mais aussi chansons antimilitaristes circulant sous le manteau, manifestations de la plus hystérique haine du Boche ou refrains des troupes coloniales…
Ces chansons ont été enregistrées par les voix du Chœur et de la Maîtrise de Radio France, et forment la matière de ces chroniques qui explorent les pensées, les colères, les rêves, les espoirs et les désespoirs des Français pendant la guerre.
"Je crois au sang de la blessure et à l’eau du bénitier"
Aujourd’hui, écoutons ce Credo patriotique, dont on doit trouver encore la partition dans les archives de beaucoup de paroisses catholiques.
C’est l’œuvre de Henri Lavedan, membre de l’Académie française, qui le publie en 1916, et qui est mis en musique par Alfredo Barbirolli, compositeur d’origine italienne qui a donné à la France beaucoup de valses, de fox trot et de tangos tout légers mais qui trouve ici des accents très patriotiques.
"Je crois au sang de la blessure et à l'eau du bénitier, au feu de l'artillerie et à la flamme du cierge" . Cette alliance du feu de l’artillerie et de la flamme du cierge, c’est une figure rhétorique de la guerre sainte – ce qui peut surprendre un chrétien d’aujourd’hui, qui n’a plus l’habitude que la Chrétienté utilise Dieu dans les canons…
C’est aussi la thématique de Prière avant la bataille, texte abondamment célébré pendant la guerre, écrit par le lieutenant Dussauze, mort pour la France en septembre 1915.
Prière avant la bataille
(poème du lieutenant Henri Dussauze)
France, de vous je tiens ma vie
Il vous la faut, reprenez-la
J’ai tout quitté pour venir là
Où votre gloire me convie
Sur ma table mon livre dort
Ouvert où se tut ma pensée
Bien des pages restaient encor
Après la page délaissée
Ma fille, au son d’un clair refrain
Arrangeait des fleurs dans un vase
Mon fils, lutin qui rit et jase
Jouait par terre avec son train
Les yeux sombres de mon aimée
Scintillaient d’effroi, de fierté
Et de tendresse inexprimée
France pour vous j’ai tout quitté
Matins joyeux, soirs embaumés
Jardin en fleur, maison chérie
Tous mes amis, tous mes aimés
Mon paradis c’est ma patrie
France, si je vous donne tout
Exaucerez-vous ma prière ?
Votre grande œuvre de lumière
L’accomplirez-vous jusqu’au bout ?
En vous j’ai mis mon espérance
De justice et de vérité
Je vais mourir pour vous, ô France
Vous vivrez pour l’humanité
Dans cette chronique, vous entendez des extraits de : Le Credo patriotique par le Chœur de Radio-France (1916, enregistrement de 2014)Extrait de Prière avant la bataille de Henri Dussauze, 1915 (lu par Jean-Yves Chilot)Le Credo patriotique par le Chœur de Radio-France (1916, enregistrement de 2014)
Retrouvez en intégralité les chansons des chroniques des semaines précédentes sur le site La Fleur au fusil de RF8, la radio numérique de Radio France.
La Fleur au fusil est aussi un livre sur les chansons de la Première Guerre mondiale, qui paraîtra en septembre et que vous pouvez déjà précommander sur le kiosque Radio France.
Vous pouvez également suivre l'actualité de cette chronique
Professeurs, lycéens et collégiens, France Info et l’Éducation nationale ont créé ensemble un site où vous pouvez trouver une centaine de chroniques sur des chansons chargées d’histoire, Ces chansons qui font l'histoire.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.