Discours sur l'état de l'Union européenne : qui est Peter Müller, plume allemande d’Ursula Von der Leyen ?
L’intrus de l’actu donne chaque soir un coup de projecteur sur une personnalité qui aurait pu passer sous les radars de l’actualité.
Peter Müller est la plume d'Ursula von der Leyen, l'auteur par exemple de ces mots sur la Russie : "Je veux être très clair, ces sanctions ne pas près d'être levée. L'heure est à la détermination, pas à l'apaisement, cela doit être très clair." C'est simple, volontairement sans punchline pour être traduisible en 22 langues.
Evidemment, un discours comme celui sur l'état de l'Union d'Ursula von der Leyen, mercredi 14 septembre, est un travail collectif, de longue haleine. Plusieurs mois de travail durant lesquels chaque Direction générale envoie les sujets qu'elle veut pousser sur l'énergie, l'agriculture, la défense, les affaires étrangères. Le tout malaxé, trituré, priorisé par les conseillers politiques mais celui qui mets les mots, c'est bien le "Speechwriter", la plume. J'apporte cette précision parce que le porte-parole de la Commission européenne s'est ému, voire offusqué, qu'on puisse, ici en France, s'intéresser à un seul homme de ce collectif. Pourtant, dans l'organigramme et sur les comptes Twitter ou Linkedin de Peter Müller, il est écrit "Speechwriter". Des réseaux sociaux qu'il manie visiblement plus facilement que d'autres au sein cette Grande Muette qu'est la Commission et pour cause, Peter Müller est un ancien journaliste, chef du bureau européen de l'hebdomadaire Der Spiegel, autorité de la presse allemande.
Un journaliste réputé rigoureux
Peter Müller est allemand, bavarois, âgé de 49 ans. Il a des études de droit en Bavière, un passage à Harvard, et même brièvement en Chine. Carrière de journaliste sans accroc qui passe par les plus grands titres. Une année au Handelsblatt, quatre à Die Welt (de 2004 à 2008) où il couvrait la politique. Et puis dix ans pour Der Spiegel. Il débarque à Bruxelles en 2015, se passionne pour les institutions européennes. Journaliste réputé rigoureux, dit-on notamment chez les députés Verts à qui j'ai pu parler. Couleur politique impossible à déterminer et personnalité plutôt discrète en public. "D'habitude, me disait l'une de ses anciennes consœurs, les confrères du Spiegel la ramenaient un peu, lui pas du tout."
Cela n'empêche pas sa plume d'être parfois caustique, façon Spiegel, notamment à l'époque de Jean-Claude Juncker, le luxembourgeois. Peter Müller critiquant notamment la promotion express de son chef de cabinet Martin Stanmayer révélée par Jean Quatremer, le correspondant de Libération. D'où l'étonnement de certains confrères, notamment Jean Quatremer en apprenant en plein confinement, et un an après l'entrée en fonction d'Ursula Von der Leyen, qu'il passe de l'autre côté. "Il y avait une rumeur sur le fait que l'un des correspondant du Spiegel à Bruxelles allait passer du côté de la Commission mais cela ne m'a pas moins surpris. Le fait qu'il passe au service d'une institution qu'il était censé couvrir et surtout critiquer.
"Est-ce que cela va pousser à l'avenir des fonctionnaires à parler à des journalistes dont ils ne savent pas si le lendemain ils ne vont pas passer au service de la Commission européenne ?"
Jean Quatremer, journaliste à "Libération"à franceinfo
Un éternel débat qui divise les journalistes. À la commission ou au Parlement européen, Peter Muller est loin d'être le seul à avoir basculé dans la communication. Il fait partie de ces correspondants étrangers qui ne veulent plus rentrer au pays. À Der Spiegel, les perspectives étaient incertaines ? Finalement il accepte le job. "Nous l'avons embauché pour ses talents d'écriture, de communiquant mais surtout parce qu'il connait les institutions, il connait les finesses politiques, les erreurs à ne pas faire", justifie de son côté Eric Mamer, le porte-parole d'Ursula von der Layen
C'est en tout cas encore un Allemand, parmi l'entourage allemand d'une commission présidée par une Allemande. Il s'agit d'ailleurs une critique récurrente faite à Ursula von der Leyen. Mais Peter Muller, nouveau venu auprès d'un chef de cabinet ou d'un communiquant à ses côtés depuis 20 ans, est dit-on l'un de ceux, si ce n'est celui qui, au cœur du réacteur, pousse le plus pour l'ouverture aux autres nations. Il vit dans le quartier européen d'Ixelles, femme francophone, quatre enfants qui se débrouillent en français. Lui-même le comprend, un vrai signe d'ouverture, qui selon un autre de ses anciens confrères, fait de lui la meilleure porte d'entrée pour la France auprès d'Ursula von der Leyen.
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