Vie privée - vie publique, plus de frontière
Après la quenelle, voici donc
... la querelle !
La machine, qui s'est mise en
route vendredi après la publication des photos dans Closer , est lancée à
plein régime. Elle nous ramène, quelle ironie, six ans en arrière, c'était le 8
janvier 2008, quand les journalistes
accrédités à l'Elysée se demandaient qui allait poser à Nicolas Sarkozy la
question "Carla Bruni". Les médias ont alors été accusés de se
vautrer, de ne pas s'occuper des vrais problèmes de la France, alors que - et
ce n'est pas le moindre des paradoxes- les sujets people font un tabac.
La vie privée du président sera abordée demain ?
François Hollande n'y
échappera pas. L'Elysée s'y est préparé ce week-end. L'affaire est sur la place
publique. Soit dit en passant, Closer ,
traité de torchon, taxé de voyeurisme par certaines bonnes âmes, est un succès en
kiosque. Le public se l'est arraché. Le magazine a fait le sale boulot, pour
permettre à la belle presse d'adopter pendant quelques heures une posture
indignée, avant de s'emparer une fois de plus d'un thème très rentable.
La vie privée fait vendre des
journaux en crise. Face à la pression économique, combinée à la montée en
puissance de l'information continue sous toutes ses formes, radio, télé,
Internet, réseaux sociaux, plus rien ne résiste au rouleau compresseur. La frontière entre vie privée et vie publique s'est effondrée.
Et même si ce devrait être la
norme, il n'y a plus le "président" d'un côté, et le "citoyen"
de l'autre. Nicolas Sarkozy, rattrapé par une vie privée, dont il avait fait
une arme de conquête, avait mis un terme au débat qui devenait fou en épousant
Carla Bruni. François Hollande aura beau jeu de se réfugier derrière la nécessaire
protection de la vie privée, le sujet, sans clarification, va lui coller à la
peau. Ça ne va pas s'arrêter : à qui appartient l'appartement, pourquoi
Valérie Trierweiler a-t-elle été hospitalisée, quel est le rôle de la place
Beauvau, les articles virevoltent tous azimuts. La question n'est plus de
savoir si ce débat assommant est digne, mais comment en sortir ? La marche
de l'information est ainsi faite, vous pouvez repousser la réalité, elle revient
comme un boomerang.
Le président n'a pas droit à une vie privée ?
Bien sûr que oui. Et le
sondage IFOP du JDD vient rappeler que les Français dans leur très grande
majorité le pensent aussi, ce qui est très rassurant. Mais l'opinion est aussi
exigeante que versatile : le chef de l'Etat sera inévitablement épinglé
sur son comportement, si le bilan n'est pas bon en fin de mandat. C'est ce qui
s'est produit pour son prédécesseur. François Hollande a d'ailleurs mené une
campagne à succès sur ce thème très fédérateur qu'aura été la "normalité".
Il l'a fait dans un premier temps contre Dominique Strauss-Kahn, avant sa chute
à New-York - DSK et ses amis doivent bien se marrer aujourd'hui - puis contre
Nicolas Sarkozy, pour faire basculer la présidentielle, avant de se voir à son
tour rattrapé par des photos volées.
Cette pseudo-affaire nous ramène
à la règle qui prévaut pour tous, politiques, mais aussi artistes, journalistes :
il n'est plus possible pour les personnalités publiques d'échapper au secret.
L'information est un marché, la transparence balaie tout, et se moque des
principes d'un autre temps. Il faut le savoir avant , pour s'éviter le
désagrément de devoir gérer après . Rassurez-vous,
la vie normale reprendra vite ses droits.
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