Cet article date de plus d'onze ans.

Droit d'inventaire et devoir de mémoire

La droite reste divisée sur le droit d'inventaire. Un exercice dont les politiques ont du mal à s'affranchir.
Article rédigé par Jean-François Achilli
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

Cela mérite d'être souligné : c'est bien la première
fois que les ténors de l'UMP se seront mis à peu près d'accord sur un sujet
depuis le psychodrame de décembre dernier. Au pris d'une contorsion à l'extrême
de Jean-François Copé ou d'Alain Juppé approuvant sans réserve il y a une
semaine la décision de François Hollande au sujet de la Syrie, et posant
désormais leurs conditions. Cette unité de façade est un leurre : les
divisions profondes au sujet de l'héritage de Nicolas Sarkozy sont à peine
mises entre parenthèses par la crise syrienne, et vont vite revenir à la
surface.****

La messe est dite au
sujet du droit d'inventaire ?

"Ils ne vont pas le faire, ce sera un exercice a
minima
", prédisait hier un ancien ministre chiraquien. L'entourage de
Jean-François Copé jure qu'une convention sur le thème sera organisée à la
mi-octobre, mais à ce jour, rien n'a été mis en chantier. Le président de l'UMP,
en réponse aux déclarations de François Fillon et d'autres barons de la droite,
a fait preuve d'audace en lançant cette idée au cœur de l'été. Cette remise en
question a été vécue comme un crime de lèse-majesté par Nicolas Sarkozy et ses
amis. Le droit d'inventaire reste pourtant un passage obligé quand un parti veut
ouvrir une page blanche.

Cela vaut à droite
comme à gauche ?

Le concept a été inventé, popularisé lors de la campagne de
1995 par un Lionel Jospin, qui voulait s'affranchir de la figure tutélaire trop
encombrante de François Mitterrand, ce qui n'a pas empêché la gauche de perdre
trois présidentielles. Un proche de Nicolas Sarkozy, hostile à la démarche, n'y
voit que l'expression de stratégies personnelles. Les Français, dit-il, ne vous
élisent pas sur le passé, sur un bilan, mais sur des projets porteurs d'avenir.
Le fait de tuer le père n'est pas un programme en soi.

C'est quand même le
minimum que les politiques fassent leur autocritique ?

François Hollande, il y a trois ans, avait soldé les comptes
en commettant un ouvrage justement intitulé Droit d'inventaires ,
afin de regarder en face les échecs du PS. La suite est connue. Laurent
Wauquiez à l'UMP voit dans cette démarche une forme de modernité parce que
la politique, dit-il, ne se résume pas à "tarter" le camp d'en
face. Pour Xavier Bertrand, le vrai sujet reste toutefois ce que l'on n'a pas
fait.

Franchement, tout ça
est vraiment utile ?

Il en va du droit d'inventaire en politique comme du devoir
de mémoire dans l'histoire. La commémoration hier à Oradour-sur-Glane scelle
l'amitié entre deux peuples, jadis ennemis, qui ont su regarder en face leurs
crimes, ceux du nazisme, et son corollaire, la collaboration. Mais ce geste ne
garantit pas la stabilité du couple franco-allemand. A l'usage, c'est la même
chose, pour le droit d'inventaire, un acte nécessaire mais pas suffisant. Il relève
plus de l'intention, certes louable, voire de la posture, à destination de
l'opinion, que d'une réelle remise en cause des structures et des hommes, les
pouvoirs se succédant et reproduisant souvent les mêmes erreurs.

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