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Les souvenirs de Delphine Renard, une petite fille victime de l'OAS

Le 7 février 1962, en pleine guerre d'Algérie, une bombe explose chez André Malraux. Une petite fille de quatre ans, Delphine Renard, est grièvement blessée. Elle devient, malgré elle, le symbole des victimes du terrorisme. Aujourd'hui, dans un livre "Tu choisiras la vie", elle raconte l'évènement qui a changé sa vie.
Article rédigé par Jean Leymarie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
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Delphine Renard est au milieu de ses jouets, dans sa chambre, à Boulogne Billancourt. Elle est allongée, par terre, plongée dans une livre. Soudain, une énorme explosion retentit. La pièce vole en éclats. La petite fille pousse un hurlement. Elle s'en souvient comme si c'était hier : "j'ai les yeux fermés, collés par le sang, mon côté droit n'est plus qu'une bouillie". Les secours se précipitent. Les reporters, aussi.Paris Match publie la photo de l'enfant. Le magazine écrit : "Ce visage mutilé accuse l'OAS".

L'OAS, c'est l'organisation de l'armée secrète, qui commet des attentats pour empêcher l'indépendance de l'Algérie. Quand les Français voient cette photo, quand ils découvrent l'histoire de Delphine Renard, ils sont bouleversés.

Deux drames, en deux jours

Si la bombe a explosé chez elle, c'est simplement parce que Delphine Renard habite le même immeuble qu'André Malraux. C'est lui,  le ministre du général de Gaulle, qui était visé. Au moment de l'attentat, Malraux n'était pas chez lui.

Le lendemain, une manifestation a lieu à Paris. Le préfet de police, Maurice Papon, l'a interdite. Mais des milliers de personnes descendent malgré tout dans la rue. Elles protestent contre les attentats. La police charge les manifestants. Il y a des bousculades. Neuf personnes sont tuées au métro Charonne.

Deux drames, en deux jours. Après des mois de violence, après la répression du 17 octobre 1961, la guerre a atteint un niveau insupportable. D'ailleurs, les Français ne la supportent plus. Le conflit s'arrête quelques semaines plus tard. Les accords d'Evian sont signés le 18 mars 1962.

A 55 ans, elle trouve la force d'écrire sur l'événement 

Pendant ce temps-là, Delphine Renard va d'hôpital en d'hôpital. Dans l'attentat, elle a perdu un oeil. Elle subit des opérations en série. Elle grandit. Elle se construit, dans l'ombre de cette histoire. Parfois, dans la rue, des passants la reconnaissent : "Etes vous la petite Delphine Renard ? ". Elle n'aime pas beaucoup ça.

Elle suit des études brillantes. Elle devient critique d'art, puis psychanalyste. A 29 ans, elle perd son deuxième oeil. Encore une conséquence, tardive, de l'attentat. Aujourd'hui, Delphine Renard a 55 ans. Elle a trouvé la force d'écrire sur l'événement qui a bouleversé sa vie. Elle publie "Tu choisiras la vie" (Grasset). Et elle était ce jeudi matin l'invitée de France Info.

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