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Édito
Projet de loi immigration : le coup de poker menteur dans tous les camps

La loi immigration n’en finit pas de diviser. L'article 3 qui vise à régulariser des sans-papiers sur les métiers en tension est au centre des débats. Pour résumer, tout le monde s’accuse de mentir, et en même temps tout le monde bluffe.
Article rédigé par Agathe Lambret
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
L'Assemblée Nationale, à Paris, le 15 mars 2023. (MYLENE DEROCHE / MAXPPP)

C’est l’article 3 de la loi, celui qui vise à régulariser des sans-papiers dans les métiers en tension qui cristallise les débats. D’abord, le gouvernement accuse la droite d’hypocrisie sur ce sujet. La preuve, Gérald Darmanin qui ironise lundi 30 octobre sur ces parlementaires, notamment LR, qui demandent en douce aux préfets de régulariser leurs nourrices. Même Olivier Marleix le patron des députés de droite l’a reconnu : il s’oppose aux régularisations, sauf pour l'hôpital de sa circonscription, parce que "les hôpitaux en ont besoin", déclare-t-il. Ce qui ne l’empêche pas de fustiger une loi qui constitue, selon lui, "un appel d’air", comprenne qui voudra.

La position de la majorité n’est pas beaucoup plus limpide. Déjà cet article 3 semble avoir été introduit non par conviction, mais pour donner des gages à l’aile gauche de la majorité, et tenir le "en même temps". Un artifice qui n’a pas tenu très longtemps puisqu’Olivier Dussopt, le ministre du Travail, censé être le garant de cet équilibre, a disparu du projet en cours de route.

Darmanin et Borne s’affrontent autour de cet article

Quant à la Première ministre, après avoir amadoué les meneurs de gauche de son camp, elle a convié le LR Bruno Retailleau à dîner pour lui dire tout le mal qu’elle pensait de cet article 3. Elle n’y est pour rien, lui a-t-elle dit en substance, elle pourrait y renoncer. Conséquence immédiate, Gérald Darmanin, qui lui aussi était prêt à renoncer à cet article, lui trouve soudain un nouvel intérêt. Pour le ministre de l’Intérieur, s’y accrocher, c’est contrer les tentatives de torpillage de la Première ministre qui aimerait bien le voir chuter sur ce dossier.

L’intérêt des travailleurs et l’intérêt des Français n’est pas l’essentiel. Trois semaines après l’attentat d’Arras, on a une loi qui propose de durcir les règles de l’immigration, et une sorte d’unanimité pour empêcher qu’elle soit votée. D’un côté des droites qui réclament pourtant plus de fermeté depuis des années et de l’autre, une majorité sourde qui s’accroche à un article qui empêche tout compromis. Cet article 3 est devenu le champ de bataille de deux ambitions à front renversé : Gérald Darmanin, issu de la droite, qui tient à cet article destiné à son aile gauche et Élisabeth Borne, issue de la gauche, qui se révèle plus à droite qu’on ne le pensait. Mais le sujet de l’immigration mérite sans doute mieux qu’une course au meilleur opposant ou l'énième épisode du match Borne-Darmanin, mieux que ce vaste jeu de poker menteur.

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