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Édito
Mort de Nahel : pourquoi le débat sur le maintien de l'ordre reste toujours compliqué en France

La mort de Nahel a relancé le débat sur la question du maintien de l’ordre. Et plus que jamais, la nuance est difficile à faire entendre. L'édito politique d'Agathe Lambret.
Article rédigé par franceinfo, Agathe Lambret
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des émeutiers face à un camion de CRS, à Marseille le 30 juin. (CHRISTOPHE SIMON / AFP)

Le sujet n'est pas tant la mise en garde du haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme qui s’alarme des "profonds problèmes de racisme parmi les forces de l’ordre" françaises, mais surtout les chiffres : il y a eu quinze morts après des refus d’obtempérer depuis début 2022. Il y a aussi les images de bavures qui tournent en boucle sur les réseaux sociaux, et cette tentation facile de quelques-uns de faire de ces cas une vérité absolue. 

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Autre sujet : la défiance installée entre une partie des jeunes et la police. 30% seulement des 18-24 ans déclarent que la police leur inspire de la "confiance", selon un sondage Ifop réalisé après la mort de Nahel.

L'embarras du gouvernement

Face à cela, le gouvernement semble embarrassé et a du mal à répondre clairement. Face au communiqué de syndicats de police se disant "en guerre" contre des "nuisibles", Gérald Darmanin botte en touche : "Je ne suis pas là pour polémiquer", balaye-t-il. Et c'est tout un gouvernement qui n’a pas su poser des mots sur la cagnotte polémique de soutien au policier mis en examen, instrumentalisée par un proche d’Eric Zemmour, mais qui est aussi révélatrice d'une partie de l'opinion publique. Comme si l’exécutif avait peur d’émettre la moindre nuance sur la police.

Dans le même temps sur France Inter, le secrétaire général du syndicat Unité SGP police-FO n’hésite pas, lui, à prendre ses distances avec le chef de l’Etat en assurant que "les policiers aujourd'hui ont perdu totalement confiance dans le Président".  

La nuance et la remise en cause

On a donc l’impression que ce débat est compliqué. Voire impossible. Or, cela s'explique : il y a déjà la puissance de la police, un taux de syndicalisation proche de 90%. Il y a également son caractère essentiel aussi, a fortiori dans un pays habitué des contestations sociales. Une menace de lever le pied, comme l’avaient fait les policiers en plein mouvement des "gilets jaunes" en décembre 2018, est la hantise du gouvernement. La profession a aussi des raisons légitimes d’être en souffrance, chaque mot doit donc être pesé. Christophe Castaner, qui avait réclamé la "tolérance zéro" contre le racisme dans la police n’a pas tenu deux ans à Beauvau, par exemple. 

Et puis s’il y a des questions légitimes sur la formation des policiers ou les méthodes de maintien de l’ordre, le débat est vicié tant les positions sont radicalisées de part et d’autre, entre ceux, incapables de nuances, qui disent "la police tue" et ceux qui ne souffrent pas d’entendre la moindre remise en cause.

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