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Arte fête ses 30 ans : "Notre utilité n’a jamais été aussi forte", assure Bruno Patino, président de la chaîne

La chaîne franco-allemande célèbre lundi 30 mai son 30e anniversaire.

Article rédigé par Célyne Baÿt-Darcourt
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7 min
Bruno Patino, président d'Arte. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Le 30 mai 1992, les téléspectateurs français et allemands découvraient une nouvelle chaîne. Arte est née de la volonté du président François Mitterrand et du chancelier Helmut Kohl de sceller culturellement la réconciliation franco-allemande.

Les discussions ont été longues, notamment parce que l’Allemagne est un État fédéral. La culture n'est pas dans les prérogatives du gouvernement, il n’y a d’ailleurs pas de ministre dédié à ce domaine. Il a donc fallu que les représentants des 11 Länder (territoires qui composent le pays) se mettent d'accord. Ensuite le terme "culture" n'a pas le même sens des deux côtés du Rhin. En France, c'est l'art en général. En Allemagne, c'est plus vaste, ça comprend aussi les questions sociétales. Ça a pris des mois pour trouver un compromis et lancer Arte, qui signifie "Association relative à la télévision européenne".

Si au début, et pendant pas mal d'années, c'était soi-disant une chaîne pour intellos-bobos, avec des programmes assez pointus, parfois lunaires, Arte est devenue une marque accessible à tous, forte de ses 2,9% de part d’audience en 2021 (7e chaîne la plus regardée). "De plus en plus de gens ont un lien avec Arte. Ça veut dire que notre utilité n'a jamais été aussi forte. C’est aussi une fierté de voir que les plus jeunes nous regardent désormais. Nous avons 21 millions d’abonnés sur les chaînes sociales (Facebook, TikTok, Instagram, YouTube…). On fait plus de 100% d'augmentation sur les 15-34 ans entre 2019 et 2021", se réjouit le Président d’Arte Bruno Patino. Son utilité est-elle encore plus grande depuis le début de la guerre en Ukraine ?

"Dès sa création, Arte a été un dispositif franco-allemand tourné vers l'Europe."

Bruno Patino

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"Le traité interétatique nous donne comme objectif et comme mission de contribuer au rapprochement des peuples européens par la culture. Franchement, il n'y a pas de plus belle mission, je pense. 30 ans plus tard, l'Europe connaît à nouveau la guerre dans un territoire européen, ce qui nous donne une grande responsabilité. Certes, on n’est qu'une offre audiovisuelle, on se substitue pas à des choses beaucoup plus importantes, mais il faut qu'on prenne notre part au fait de contribuer au rapprochement des peuples et au fait qu'ils puissent mieux se connaître culturellement, en terme d'information et de récit", confie Bruno Patino.

Pour célébrer ce 30e anniversaire, la chaîne aurait pu piocher dans son catalogue pour proposer ce soir un des nombreux grands films qu’elle a coproduit (l’une de ses 14 Palmes d’Or à Cannes par exemple), mais elle a préféré le documentaire animé multi-primé Flee , l’histoire de l’exil d’un réfugié afghan : "On ne voulait pas regarder dans le rétroviseur, mais plutôt vers le futur. 'Flee' nous paraissait être d’abord une programmation inattendue, différente, surprenante. C’est aussi une coproduction européenne. Et puis c’est de l’animation donc une écriture nouvelle. Enfin, ça parle de la géopolitique par le prisme d'un destin humain. Et donc ça nous paraissait être à la fois totalement en résonance avec la situation du moment et être proche des valeurs défendues par Arte", déclare Bruno Patino.

L'avenir d'Arte n'est pas écrit

Une ombre plane toutefois au-dessus d’Arte : comment sera-t-elle financée à l’avenir ? En tant que chaîne publique, elle perçoit la redevance cette année pour la dernière fois. Dès 2023, cette taxe sera supprimée, comme l’a annoncé Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle. Le financement de l'audiovisuel public sera pris dans le budget de l'État, mais on ne sait pas à quelle hauteur.

"On est attentifs. Nous avons des ambitions et il faut nous en donner les moyens. La ressource allemande est orientée à la hausse et surtout garantie de façon pluriannuelle jusqu'à 2024. En France, nous avons une incertitude sur la nature et le niveau du nouveau financement. En tant que président d'Arte, je souhaiterais que l'élan français soit le même que l'élan allemand", conclut Bruno Patino.

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