Cet article date de plus de dix ans.

"Réparer les vivants", de Maylis de Kerangal

Quatre ans après Naissance d'un pont, prix Médicis 2010 et best seller, le nouvel opus de cette orfèvre de l'écriture est déjà en tête des ventes. Comment résister à Maylis de Kerangal, cette grande écrivaine qui dès la première page vous cloue avec une phrase de 32 lignes, un flot, une pulsation, c'est puissant et beau comme du théâtre antique, fluide comme un solo de danseuse, à peine terminé, on n'à qu'une envie recommencer à lire ce bijou.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
  (©)

Le sujet de Réparer les vivants  est dur, tragique même : la mort d'un adolescent et la question douloureuse du don d'organes.

Simon Limbres part faire du surf dans la Manche en plein

hiver, la nuit, quand il revient au Havre au petit matin, il a un

terrible accident sur la route. Son électroencéphalogramme est

plat, son cœur bat encore, et on suit la journée, presque minute

par minute. Ce cœur encore vaillant sauvera-t-il un ou une

malade ?

L'écriture de Maylis de Kerangal

bat au diapason de ce cœur et l'une des surprises de ce livre,

c'est la précision extrême du récit médical et bioéthique,

philosophique, inhérents au sujet.

Quand les parents arrivent à l'hôpital,

qu'ils ont à décider du don d'organe, Maylis de Kerangal décrit l'indicible, les cris

sont intérieurs, son écriture devient tellurique, à fleur de peau. C'est magistral.

Elle aère son récit de personnages délicieux,

comme cette infirmière de garde cette nuit-là, qui tremble encore

d'une étreinte charnelle, ce spécialiste de l'accompagnement des

familles, chanteur lyrique amateur, qui joue son rôle comme s'il

était sur scène, pose son corps et sa voix à chaque phrase, ce qui

est jubilatoire pour le lecteur, c'est de prendre autant de plaisir en

ayant conscience de la somme de travail qu'il y a dans chaque

page.

Le titre est emprunté à

Tchekhov Enterrer les morts, réparer les vivants  c'est dans

Platonov, on entend les tirades, on voit les corps se tordre comme

chez le regretté Patrice Chéreau, on se dit que Joël Pommerat en

ferait une pièce déchirante, c'est une tragédie, avec unité de

temps, de lieu et d'action.

Feuilletez Réparer les vivants, de Maylis de Kérangal, aux éditions Verticales.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.