"Réparer les vivants", de Maylis de Kerangal
Le sujet de Réparer les vivants est dur, tragique même : la mort d'un adolescent et la question douloureuse du don d'organes.
Simon Limbres part faire du surf dans la Manche en plein
hiver, la nuit, quand il revient au Havre au petit matin, il a un
terrible accident sur la route. Son électroencéphalogramme est
plat, son cœur bat encore, et on suit la journée, presque minute
par minute. Ce cœur encore vaillant sauvera-t-il un ou une
malade ?
L'écriture de Maylis de Kerangal
bat au diapason de ce cœur et l'une des surprises de ce livre,
c'est la précision extrême du récit médical et bioéthique,
philosophique, inhérents au sujet.
Quand les parents arrivent à l'hôpital,
qu'ils ont à décider du don d'organe, Maylis de Kerangal décrit l'indicible, les cris
sont intérieurs, son écriture devient tellurique, à fleur de peau. C'est magistral.
Elle aère son récit de personnages délicieux,
comme cette infirmière de garde cette nuit-là, qui tremble encore
d'une étreinte charnelle, ce spécialiste de l'accompagnement des
familles, chanteur lyrique amateur, qui joue son rôle comme s'il
était sur scène, pose son corps et sa voix à chaque phrase, ce qui
est jubilatoire pour le lecteur, c'est de prendre autant de plaisir en
ayant conscience de la somme de travail qu'il y a dans chaque
page.
Le titre est emprunté à
Tchekhov Enterrer les morts, réparer les vivants c'est dans
Platonov, on entend les tirades, on voit les corps se tordre comme
chez le regretté Patrice Chéreau, on se dit que Joël Pommerat en
ferait une pièce déchirante, c'est une tragédie, avec unité de
temps, de lieu et d'action.
Feuilletez Réparer les vivants, de Maylis de Kérangal, aux éditions Verticales.
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