Que devient Martial Darbon depuis qu'il a lancé la marque de lait équitable "C'est qui le patron ?"
En septembre 2016, une cinquantaine de producteurs de lait, installés dans l'Ain, dont Martial Darbon, lançait la marque "C'est qui le patron ?", en proposant une brique équitable.
En septembre 2016, une cinquantaine de producteurs laitiers de l'Ain invente le lait équitable de la marque C'est qui le patron ?, une première dans l'Hexagone. Grâce à un accord passé avec Carrefour, les 51 producteurs, tous en grande difficulté financière, vendent la brique de lait à un prix fixé par le consommateur. Ce prix est de 99 centimes d'euro, dont 39 centimes perçus par les producteurs, au lieu de 21 ou 22 centimes auparavant.
Doublement des salaires des agriculteurs
Martial Darbon, président de la coopérative Bresse Val de Sâone, estime que c'est une initiative bienvenue en période de crise laitière : "On va pouvoir payer les arriérés de facture, et revenir à l'équilibre pour tirer les salaires parce que certaines exploitations étaient dans une situation catastrophique. Certaines étaient même sans aucun revenu."
Dix mois après son lancement, le dispositif est une réussite. D'autres enseignes se sont jointes à l'aventure initiée par Carrefour. Le réseau de distribution s'est donc étoffé. En l'espace de quelques mois, plus de 14 millions de briques de lait ont été vendues. C'est trois fois plus que l'objectif de départ. "C'est une petite merveille pour nous, explique Martial Darbon, exploitant installé entre Bourg-en-Bresse et Mâcon, Nous étions loin d'imaginer ce résultat. Cela a sauvé la totalité des exploitations. Certaines étaient en difficulté depuis plus de deux ans, nous avons descendu nos salaires jusqu'à 700/800 euros par personne. Aujourd'hui, on sort une paie de 1 500/1 600 euros."
Des dizaines d'exploitations sauvées
Ces exploitants donc rémunérés aujourd'hui 39 centimes par litre de lait. Lorsqu'il s'agit de savoir si c'est un prix juste, Martial Darbon ne sait pas si c'est le bon tarif, mais il explique que dans sa région "cela correspond à un cahier des charges qui permet de rémunérer correctement le producteur".
"Il y a des réparations que vous n'avez pas faites, des matériaux que vous n'avez pas changés... Quand je dois quitter mon exploitation, un vacataire me coûte 135 euros par jour, explique le président de la coopérative Bresse Val de Sâone pour expliquer comment ce prix fixé par le consommateur l'a aidé. Je ne connais pas de commerce durable s'il n'est pas équitable."
Ce prix permet de réécrire l'avenir.
Martial Darbonà franceinfo
Après quelques calculs rapides, Martial Darbon estime que les 18 centimes supplémentaires payés par litre aux producteurs suffisent à faire une différence colossale. "Sur mon exploitation, je sors 1 200 litres de lait par jour, donc vous faites 1 200 x 18 centimes. Cela fait grosso modo 150 euros par jour, soit 4 500 euros par mois ou 55 000 à 60 000 euros par an", assure Martial Darbon, convaincu que sans cette initiative, plus de la moitié des 51 producteurs de la coopérative aurait disparu.
Les producteurs reconnaissants
Martial Darbon exprime aussi sa reconnaissance vis-à-vis des consommateurs, qui ont accepté d'acheter des briques de lait C'est qui la patron ? un peu plus chères que les autres : "Le consommateur est beaucoup plus raisonnable que ce que l'on pense. Quand nous nous engageons à fournir un produit de qualité à un prix acceptable, le consommateur est capable de dire 'banco j'y vais'. (...) Ce sont eux qui décident de garder une France avec une campagne vivante, un monde d'élevage transparent, équitable, respectable, raisonnable."
Le 22 mai 2017, Martial Darbon a été reçu à l'Elysée : "C'est un petit moment vachement sympa de savoir qu'il y a des personnes qui s'intéressent à une petite poignée de gens qui ont essayé de se sortir de cette misère. Avoir pris le temps de nous faire faire le tour de l'Elysée, du ministère de l'Agriculture et de l'Assemblée nationale, c'est porteur d'un message d'envie d'avancer."
Les producteurs de lait du département de l'Ain ont fait des émules dans toute la France. Inspirés par la réussite de la coopérative laitière, d'autres producteurs ont reproduit le dispositif ailleurs. Du jus de pomme, des pizzas et du beurre bio sont désormais vendus à un prix équitable, fixé par le consommateur.
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