Quand Guy Lux ignorait ce qu'est le cannabis...(1969)
Retour à la fin de l’année 1969. Sur la première chaîne de l’ORTF et pour quelques mois seulement, est programmé quotidiennement un jeu qui deviendra mythique notamment grâce à sa parodie par Coluche, le Schmilblic. Un jeu qui consiste à découvrir un mystérieux objet pris en photo en très gros plan. Quelques semaines après le festival de Woodstock, Guy Lux a encore quelques lacunes culturelles à combler…
Guy Lux : " A quoi pensez-vous ?"
Joueur : " C'est un tuyau flexible bicolore en cannabis de pipe alsacienne (??) dite de brasserie (désolé je ne comprends pas !!)"
Guy Lux : "Y'a un moment que vous avez ajouté...c'est le 4ème mot. Répétez-nous cela..."
Joueur : "Dite de brasserie"
Guy Lux : "Non avant"
Joueur : "De pipe alsacienne..."
Guy Lux : "Avant"
Joueur : "Cannabis"
Guy Lux : "Cannabis ? Qu'est-ce que c'est ...? Avec un C comme Christian ?"
Joueur : "Oui..."
Si l’on considère que le Schmilblic et Guy Lux incarnent la culture populaire d’alors, le moins que l’on puisse dire est que le cannabis reste l’apanage de la contre-culture !
La consommation de drogue dite douce s’envole dans les années 1970. Et ce malgré la pénalisation des clients. La loi du 31 décembre 1970 punit d’une peine maximum d’un an d’emprisonnement la consommation de cannabis. L’une des plus répressives sur le sujet, beaucoup de pays s’attaquant seulement aux revendeurs. C’est dans ce contexte que le 18 juin 1976, le journal Libération affiche en Une un manifeste intitulé judicieusement : "L’appel du 18 joint", les signataires sont connus, ils vont de Bernard Kouchner à Isabelle Huppert en passant par Gilles Deleuze, Maxime Le Forestier ou Bernadette Laffont.
Aucune trace de cet appel dans les archives de l’INA. On ne parle pas de drogue en ces termes à la télévision et à la radio publique…
Un an et demi plus tard cependant, c’est du sommet que les choses bougent.
En janvier 1978, Monique Pelletier, pas encore au gouvernement, remet son rapport sur la drogue au président Giscard d’Estaing:
"Nous sommes contre la dépénalisation, mais déjà à Paris et dans les grandes villes, les usagers simples de haschich ne vont pas en prison. Nous proposons simplement que cette pratique soit généralisée à l'ensemble de la France pour des raisons évidentes. Ce n'est pas la manière de lutter contre la consommation de haschich. Il y a d'autres manières beaucoup plus efficaces qui sont la prévention et l'information."
Jugé d’abord trop laxiste, ce rapport sera finalement pris en compte par l’Elysée, mais si la prise en charge des toxicomanes et l'information feront des progrès, la pénalisation des drogues douces ne connaîtra pas d’infléchissement légal se heurtant sans cesse sur le débat plus large de la dépénalisation, qui ne fera jamais consensus au sein de la classe politique.
Et si depuis octobre dernier dans certain cas, les consommateurs pourront échapper aux tribunaux en payant directement une amende aux policiers, le but est d’abord et avant tout de désengorger les tribunaux…
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