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Histoires d'Info. Macron a 39 ans, que faisaient ses prédécesseurs au même âge ?

Un trentenaire à l'Élysée, c'est du jamais-vu dans l'histoire de la Ve République. Retour sur le parcours personnel des anciens présidents de la République au même âge, à 39 ans.

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Les huit présidents de la Ve République : de Gaulle (1959-1969), Pompidou (1969-1974), Giscard d'Estaing (1974-1981), Mitterrand (1981-1995), Chirac (1995-2007), Sarkozy (2007-2012), Hollande (2012-2017) et Macron. (DSK / AFP)

Victorieux dimanche 7 mai de l'élection présidentielle, Emmanuel Macron n'a que 39 ans. Il est le deuxième chef de l'État le plus jeune depuis l'instauration de la République en France, se plaçant entre Napoléon Bonaparte, Premier consul à 30 ans en 1799, et son neveu Louis-Napoléon Bonaparte, élu président de la République à 40 ans en 1848. Rien que ça !

L'âge ne fait certes pas un programme politique mais nous sommes allés voir ce que faisaient les anciens présidents de la Ve République quand ils avaient, eux aussi, 39 ans. On est bien loin d’Emmanuel Macron.

de Gaulle, militaire au Levant

Charles de Gaulle a 39 ans en 1929. Il est commandant et vient d’être affecté à l’Etat major des troupes du Levant à Beyrouth, sous mandat français depuis 1920. De cette expérience, il écrira : "La France, qui a reçu la garde des pays du Levant, était particulièrement qualifiée pour cette tâche à cause de son rôle historique dans ces pays." Il est loin des affaires d’État qu’il ne découvrira que deux ans plus tard, lors de son retour à Paris.

Pompidou, maître des requêtes

Georges Pompidou, lui non plus, à 39 ans en 1950, n’est pas encore au cœur de la vie politique. Il est certes un conseiller proche du général de Gaulle, maître des requêtes au Conseil d'État mais encore aucun mandat électif.

VGE, ministre des Finances

En revanche, pour les présidents suivants, on commence à avoir quelques traces, à la fois dans les archives de l’INA et dans les hautes sphères politiques. Voici, par exemple, ce que disait Valéry Giscard d’Estaing en 1965 lors de la Foire des arts ménagers : "La France a été importatrice pendant très longtemps et c’est tout à fait anormal. Il n’y a aucune raison qu’un pays qui a notre degré de développement industriel et technique importe les produits de sa vie courante. Il est normal qu’il y ait des échanges dans les deux sens mais nous devrions être plutôt exportateurs."

Valéry Giscard d'Estaing lors d'une conférence de presse au ministère des Finances en 1965. (BETTMANN / BETTMANN)

On dit souvent qu’Emmanuel Macron est jeune de l’extérieur et vieux à l’intérieur, cette définition pourrait aussi s’appliquer à Giscard. À 39 ans, il parle déjà de manière très posée même s’il reflète malgré tout l’image d’une personne jeune et moderne. A cet âge, Giscard a déjà été élu député depuis près de dix ans, il est ministre des Finances et des Affaires économiques du gouvernement Pompidou après avoir été secrétaire d’Etat. C’est donc une personnalité politique de premier plan avec une grande expérience.

Mitterrand, député et président de l'UDSR

À 39 ans, François Mitterrand est président de l’Union démocratique et socialiste de la Résistance (UDSR). "En ce 18e jour de la campagne électorale, les candidats de l’UDSR, qui se présentent dans 37 circonscriptions de la métropole, ont déjà défini les raisons de notre combat", a-t-il déclaré en 1955.

François Mitterrand (gauche) lors d'un débat en vue des élections législatives en décembre 1955 à Paris, avec le communiste Jacques Duclos, le socialiste Guy Mollet et le député George Lafargue. (AFP)

Député depuis une dizaine d’années, il a déjà été ministre plusieurs fois depuis 1947 : ministre des Anciens combattants, ministre de l’Outre-Mer, ministre de l’Intérieur (il deviendra ministre de la Justice dès 1956). Là aussi, nous sommes en face d’un homme déjà bien intégré dans la vie politique, celle de la IVe République cette fois-ci.

Chirac, ministre et président de Département

En 1971, Jacques Chirac est président du Conseil général de Corrèze, ancien député de ce même département, ancien secrétaire d’État et tout récent ministre délégué aux Relations avec le parlement dans le gouvernement de Jacques Chaban-Delmas. Il lui faudra encore 24 ans pour entrer à l’Élysée. Il ne pensait sûrement pas que cela lui prendrait autant de temps !

Michel Debré et Jacques Chirac à la tribune pendant les assises nationales de l'UDR , à Strasbourg le 21 novembre 1971. (KEYSTONE-FRANCE / GAMMA-KEYSTONE)

Dans une interview réalisée cette année-là, il était déjà un homme pressé. Le journaliste l'interpelle en lui disant : "Depuis que vous êtes ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, on a écrit beaucoup de choses sur vous." Réponse de Jacques Chirac : "Un peu trop, un peu trop." Le journaliste lui demande s'il est vrai qu'il est "un bourreau de travail", qu'il passe ses "nuits dans les trains". Jacques Chirac réplique : "Vous savez, on exagère beaucoup dans ce domaine. J’essaie de faire face aux responsabilités qui sont les miennes, tant sur le plan parisien que sur le plan corrézien."

Sarkozy, maire et porte-parole du gouvernement Balladur

En 1994, Nicolas Sarkozy est déjà une personnalité politique importante. Maire de Neuilly, député, ministre du Budget et porte-parole du gouvernement d’Edouard Balladur, il est aussi déjà invité au journal de 20 heures. "Si la question que vous me posez c’est quel est celui qui, aujourd’hui, est le mieux à même de gagner ?, indique-t-il sur le plateau du 20 heures. Chacun de ceux qui nous regardent pourraient dire comme moi : Édouard Balladur. Est-ce que ça sera encore le cas demain ? Nous verrons bien. Mais vous savez, je ne suis pas motivé par un esprit partisan. Je crois que le patriotisme de parti doit être totalement mis de côté."

Nicolas Sarkozy et Édouard Balladur en juin 1994 lors d'un meeting. (GILLES BASSIGNAC / GAMMA-RAPHO)

Porte-parole d'Édouard Balladur, il le sera également lors de sa campagne présidentielle à venir. Cela lui ouvrira une période de traversée du désert, ce qui reflète son implication dans la vie politique.

Hollande, député de Corrèze

François Hollande, un peu plus âgé que Nicolas Sarkozy, fête ses 39 ans en 1993. Même s’il est dans les couloirs du parti socialiste depuis 1981, peu de mandats pour lui. Il est juste député de Corrèze à l’époque et s’engage auprès de Michel Rocard en vue de l’élection présidentielle de 1995. Voici ce qu’il dit à cette époque : "Il faut que, dès le 28 mars, on donne un contenu à l’initiative de Michel Rocard, c’est-à-dire un contenu en terme d’idées et d’approfondissement de ce que peut être aujourd’hui une grande force du mouvement, de façon à ce que d’autres viennent vers nous." L’histoire ne lui donnera pas raison.

François Hollande et l'ancienne ministre du Travail, Martine Aubry, lancent le mouvement Combat pour l'espoir à gauche, lors d'une conférence de presse en avril 1993 à Paris. (GERARD FOUET / AFP)

Ainsi, Emmanuel Macron apparaît vraiment comme un président au parcours atypique. Ce qui frappe c’est le peu de temps écoulé entre le début de son engagement politique et son élection. En dehors de Charles de Gaulle et de George Pompidou, tous les autres présidents ont eu de nombreuses années de vie politique derrière eux avant d’accéder à l’Élysée, preuve que la politique est devenue un métier pour beaucoup. Il y a encore quelques semaines, Emmanuel Macron affirmait : "Je ne serai plus en politique dans 20 ans". Est-ce que ce sera le cas ? L’avenir nous le dira.

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