Guerre entre Israël et le Hamas : cent jours de guerre

Après 100 jours de guerre les Israéliens doivent faire face aux pressions psychologiques que le Hamas exerce en utilisant les otages qu’ils détiennent toujours. Pendant que les habitants de Gaza s’installent dans la survie, sourds aux appels des groupes armés qui poursuivent leur stratégie de résistance.
Article rédigé par Etienne Monin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Des manifestants réclament des négociations pour la libération des otages, à Tel-Aviv (Israël) le 16 décembre 2023 (ILIA YEFIMOVICH / DPA)

Dimanche 14 janvier, après les célébrations des 100 jours pour les otages et leurs familles, le Hamas a publié sur sa chaîne Télégram un abominable quiz en trois vidéos afin d'annoncer au goutte à goutte la mort de deux otages, deux hommes, tués, d'après l'organisation, par les frappes israéliennes. Des faits rapidement démentis par l'armée israélienne. "Le Hamas militarise les réseaux sociaux", affirmait Daniel Haragi, porte-parole de l'armée israélienne.

Le Hamas avait déjà publié des vidéos d'otages, mais c'est la première fois qu'il pousse la torture psychologique aussi loin. Yossi Schneider a déjà subi cette méthode. Il est le grand cousin de ce bébé Kfir, enlevé à 9 mois, et qui aurait dû souffler sa première bougie d'anniversaire cette semaine. Dans une vidéo, le Hamas annonce à son père, lui aussi otage, que le bébé, sa mère, et son frère sont tous décédés.

Les proches cultivent quand même l'espoir. Ils ont malgré tout fêté le premier anniversaire du plus jeune otage. Mais cette nouvelle communication et l'enlisement des négociations créent une tension supplémentaire.

"Trop c'est trop. Je ne veux plus parler calmement. Je veux hurler. Rendez-moi ma famille."

Yossi Schneider, grand cousin de Kfir

Yoav Gallant, le ministre israélien de la Défense, estime que sans pression militaire, il n'y aura pas d'avancée sur le sort des otages.

Des convois de médicaments entrés à Gaza

Cette semaine, un accord, passé lors de la trêve d'après les médias Israéliens, a été appliqué. Des convois de médicaments sont entrés dans la bande de Gaza. D'après le Hamas, une partie doit aller aux hôpitaux de l'enclave et une partie aux otages israéliens, qui doivent recevoir des médicaments gérés par le centre de crise du ministère des affaires étrangères. "La liste a été reduite à 45 otages. il y a eu des liberations et des morts", déclarait Philippe Lalliot, directeur du centre de crise, invité de France Inter lundi 15 janvier.

Cette semaine, L'Union européenne a ajouté le chef politique du Hamas Yahya Sinouar sur la liste des "terroristes" dont les avoirs peuvent être gelés. Les ministres européens des Affaires étrangères ont également annoncé un nouveau régime de sanctions contre le Hamas. 

La bande de Gaza est à genoux. 

C'est l'autre moyen utilisé par les groupes combattants à Gaza, pour signifier, avec le langage des armes, que la résistance continue.  

Voilà le message d'Abu Obeida, le porte-parole de la branche armée du Hamas. Après plusieurs messages audios, dimanche, son visage caché derrière un keffieh rouge est apparu sur les écrans. Abu Obeida fait l'apologie du Palestinien, arme principale pour la résistance, qui permettra d'après lui de tenir dans les combats sur la durée. 

Cette vision romantique du Palestinien se heurte à la réalité du terrain. Après 100 jours de guerre, Gaza est brisée. Au nord, les habitants sont dans la survie. Au sud, ils sont dans le dénuement. Eux aussi prisonniers d'un affrontement qu'ils subissent. Nabil s'est installé cette semaine dans la ville de Rafah. 

"Tout le monde veut retourner chez eux."

Nabil, déplacé à Rafah

L'intensité des destructions et des privations est telle qu'elle est en train de contaminer l'énorme machine de l'ONU. L'aide humanitaire est au bord de la rupture. Elle entre au compte-goutte. Et elle ne passe presque pas dans la partie nord contrôlée par l'armée israélienne, qui ne facilite pas la tâche des services d'Andrea de Domenico, le responsable de la coordination humanitaire pour la Palestine. "C'est une operation d'une complication inimaginable", estime-t-il.

Cet empoisonnement progressif touche aussi la Cisjordanie occupée. L'armée israélienne a bouclé certaines villes, elle filtre la circulation sur les routes, et les Palestiniens ne sont plus autorisés à entrer en Israël pour travailler. 130 000 familles sont touchées. Nadia en fait partie. Elle habite Bethléem : "Maintenant il n'y a pas d'espoir", déplore-t-elle.  

Dans ce contexte, l'ébullition progressive de la région continue. Le porte-parole des Houthis au Yémen Ansarullah annonce une nouvelle frappe qui a touché un bateau Américain. Les gardiens de la révolution iranienne revendiquent un tir de missile sur un bâtiment du Kurdistan dans lequel se seraient trouvés des agents du Mossad d'après l'Iran.

Yaëlle Ifrah, ancienne conseillère à la Knesset, estime que la manipulation par le Hamas des vidéos d'otages est "une arme de destruction massive de la société israélienne, qui détruit de l'intérieur, et la cohésion et le consensus national. L'opinion publique en ce moment est exactement séparée en deux, entre ceux qui souhaitent à tout prix détruire le Hamas, et ceux qui disent qu'il faut arrêter la guerre, et libérer les otages."
 

Dans cet épisode : Thibault Lefèvre, Sonia Devillers
Technique : Selim Gheribi
Réalisation : Pauline Pennanec'h, Etienne Monin

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