La téléphonie mobile pour observer les déplacements de populations
Quand les populations se déplacent, leurs téléphones aussi. Partant de cette hypothèse, une équipe de chercheurs belges et britanniques a cartographié pendant six mois les déplacements des Français en se reposant sur l'activité des antennes téléphoniques. Ils ont ainsi pu observer les densités de population pendant l'année, et notamment pendant les vacances où les côtes atlantique et méditerrannéenne voient leur population nettement augmenter.
D'habitude, ce sont les données satellitaires qui sont régulièrement utilisées pour analyser les mouvements de population mais cela coûte bien plus cher d'autant plus que d'après Pierre Deville, un des auteurs de l'étude qui partage son temps entre l'université catholique de Louvain en Belgique et l'université Northeastern à Boston aux Etats-Unis, les résultats se sont avérés comparables. A fortiori dans des zones urbaines qui comprennent de nombreuses antennes-relais de téléphonie mobile.
"Le gros avantage de notre méthode comparativement aux données satellite ou aux opérations de recensement qui se font en moyenne tous les dix ans, c'est que nous pouvons calculer ces estimations sur un laps de temps très court. Si nous avons les données des opérateurs de téléphonie à notre disposition, on peut capturer en quelques heures une photographie instantanée des densités de populations dans un pays ", explique-t-il à France Info.
Les chercheurs ont récupéré les données totalement anonymes des 20 millions de clients Orange en France. "Nous n'avions aucune données individuelles. Nous ne connaissions pas les connexions entre les tours GSM. Par exemple, si une conversation s'effectuait entre une personne A et une personne B, nous pouvions uniquement voir que l'antenne la plus proche de la personne A était à l'origine d'un appel sans connaître sa destination. Quant à la personne B, nous voyions que l'antenne située à proximité recevait un appel sans connaître son origine" .
Les téléphones se déplacent aussi dans l'urgence
Si Pierre Deville et ses collaborateurs ont choisi la France ou le Portugal comme premiers cobayes géographiques, dont les densités de population sont déjà bien connues, c'est pour mieux étudier d'autres pays en voie de développement en Afrique où ce type de cartographie en quasi-temps réel peut aider les autorités ou les organisations internationales ou humanitaires lors de situations d'urgence
"En cas de désastre, comme un tremblement de terre, de fortes pluies ou même lors d'une guerre, on peut très rapidement collecter ces données et regarder heure par heure ou les gens se déplacent, quels villages se vident ou se remplissent. Cela peut aussi être utile pendant une épidémie car la mobilité humaine est un des facteurs de propagation ", analyse l'universitaire.
Reste à convaincre les opérateurs de téléphonie de l'utilité de leur méthode pour pouvoir récupérer des données. Ces chercheurs travaillent à présent sur le cas de la Namibie.
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