L'as de la tagua, l'ivoire végétal, au Panama
Il vous accueille d'abord de son air bourru. On croit même un moment qu'on va repartir bredouille. Puis peu à peu, Michel Lecumberry se raconte, ses sept années passées seul avec son chien, Eider, un petit berger des Pyrénées, sur un voilier dans l'Atlantique, des longs fleuves africains jusqu'aux fjords du Canada.
Il jette l'ancre un peu par hasard au Panama, dans l'extraordinaire archipel des San Blas, 365 îles coralliennes à l'eau cristalline.
Quelques-unes sont habitées par les Amérindiens Kunas, dont il partagera l'existence pendant trois années. "Encore aujourd'hui, raconte-t-il, leurs traditions sont véhiculées par des chants psalmodiés, deux à trois fois par semaine dans chacun des 31 villages. Ce sont des chefs coutumiers qui transmettent ces traditions. Malheureusement, c'est en train de se perdre à cause de l'invasion des touristes ."
Après cette expérience, il y a une dizaine d'années, Michel Lecumberry s'installe sur la terre ferme, dans une petite maison du village de Portobelo, dans le nord-est du Panama, cinq siècles après Christophe Colomb.
Ses fenêtres donnent directement sur les canons et les fortifications du vieux fort San Jeronimo. Le Français a écrit un livre sur l'incroyable destinée de Portobelo. "De cette baie magnifique, la couronne espagnole faisait transporter toutes les richesses d'Amérique centrale et du Sud vers Cadix et Séville, comme l'argent extrait des mines de Potosi, en Bolivie. Au XVe siècle, Portobelo était un port aussi important que Vera Cruz ."
Michel Lecumberry est né pendant la guerre. Il a grandi à Bayonne, puis entamé des études supérieures à Paris, qu'il abandonnera. Il monte ensuite sa boîte et connaît de grands succès avec d'ingénieux systèmes d'appareillage pour les personnes handicapées, qu'il met au point et commercialise avec un associé. Avant de tout plaquer il y a 20 ans.
Aujourd'hui, dans sa maison toute simple de Portobelo, le Français a ouvert avec sa compagne, Coco, une Toulousaine, un petit magasin où il propose des bijoux et des pendentifs qu'il a appris à sculpter dans la tagua, l'ivoire végétal, avec une tribu, les Emberàs.
"C'est une graine de palmier assez grosse, à l'intérieur blanc et très dur, raconte-t-il. Jusqu'à l'arrivée du plastique dans les années 30, cela a permis durant des siècles de fabriquer des boutons, qu'on trouvait dans les merceries. "
Michel Lecumberry vend même une partie de sa petite production dans quelques magasins chics de la capitale. Si vous cherchez bien sur ses présentoirs, vous y trouverez même la croix basque, "Lauburu". Michel Lecumberry est fier de ses origines. Son seul regret, au fond, est de ne pas avoir appris la langue basque. Il n'est jamais trop tard.
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Son blog
Retrouvez ce portrait dans la Tribune Bordeaux, actualités de Bordeaux et de la région Aquitaine
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