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En route vers Paris 2024. Cycle menstruel et performance

Cécilia Berder, membre de l’équipe de France d’escrime, est en pleine sélection pour les JO de Tokyo. Elle nous fait vivre de l’intérieur le quotidien d’un athlète de haut niveau.

Article rédigé par franceinfo, Cécilia Berder
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
L'équipe de France de sabre en plein cri de guerre aux championnats d'Europe 2019. (BIZZI TEAM)

Les règles, les "ragnanas", la zone rouge, les menstruations, la période, avoir ses lunes ou être indisposée... Chacun appelle cela comme il le souhaite, une chose est sûre, encore aujourd'hui, tabous et idées reçues entourent le cycle menstruel.

En effet, douleur, saignement, prise de poids, carence en fer, poitrine tendue, rétention d'eau ou jambes lourdes peuvent être des symptômes qui accompagnent les femmes durant leur cycle.

Mais l'équipe de football féminine des États-Unis a commencé à casser cette image de femme fragile qui ne peut pas s'entrainer. Durant la dernière coupe du monde, remportée par les Américaines, une application leur permettait d'ajuster, en fonction de leur cycle, alimentation et entraînement. Petit inconvénient malgré tout, toutes les joueuses recevaient les mêmes préconisations.

L'étude Empow'her

Deux chercheuses de l'INSEP, Juliana Antero et Alice Meignié, veulent aller plus loin et changer la donne, en utilisant la spécificité féminine de manière avantageuse avec le projet Empow’her (Exploring Menstrual Periods OWomen athletes to Escalate Ranking). Elles sont parties du constat de l'existence d'une très grande lacune scientifique. Très peu d'études sur les femmes dans le sport ont été réalisées car la variable du cycle et ses fluctuations hormonales peuvent interférer dans les résultats d'une étude scientifique.

Dans le cadre du projet Empow'her, les sportives remplissent chaque matin un questionnaire tout au long de leur cycle, avec des questions sur le sommeil, leur état d'esprit, leurs éventuels symptômes ou leur fatigue. Chaque athlète reçoit une montre connectée. Elles sont monitorées 24 heures sur 24. Des prélèvements salivaires sont réalisés pour établir un profil hormonal. Enfin, un test de performance est créé en collaboration avec les entraîneurs. Leur approche consiste à analyser l'athlète sur le terrain en étant non invasif.

Un contexte d'individualisation

Grâce aux résultats collectés, les chercheuses seront capables d'analyser et d'aménager les entraînements en fonction du cycle des sportives. L'enjeu principal consiste à individualiser les résultats, car chaque femme a sa problématique au sein d'un même sport. Pour l'instant, une trentaine d'athlètes sont étudiées dans les sports d'aviron, de cyclisme et d'escrime.

Les chercheuses ont l'ambition d'aller plus loin et de faire des liens avec les autres pôles de l'INSEP (nutrition, sommeil, psychologie, sociologie...) pour créer à terme une cellule autour de l'ahlète féminine.

En fonction des résultats de l'étude, les chercheuses seront en mesure de créer des synergies avec l'entraînement. Pour certaines athlètes, il sera peut être avantageux, durant la semaine prémenstruelle (la semaine qui précède les règles), de travailler l'endurance. Pour une autre, la période sera peut-être propice à rechercher l'explosivité, alors que pour sa collègue, durant une certaine période du cycle, le risque de blessure est plus important, et il est alors utile d'aménager la pratique.

Les scientifiques en sont persuadées: ces petites améliorations de la performance peuvent transformer une 2ème place en 1ère place. Pour certaines athlètes, le résultat trouvé montrera peut-être que le cycle menstruel n'a aucun effet sur la performance. Et cela sera déjà un résultat intéressant pour s'affranchir des idées reçues.

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