En Suisse, un "escape game" retrace le parcours des migrants pour sensibiliser les lycéens
Au lycée Emilie-Gourd de Genève, un professeur d'histoire a eu l'idée d'inventer un jeu d'évasion afin de sensibiliser ses élèves aux enjeux de la migration. L'objectif ici : rejoindre l'Europe depuis la Libye.
Comment sensibiliser les plus jeunes aux enjeux de la migration ? Tout simplement en leur proposant de devenir eux-mêmes des candidats à l’exil, le temps d’un escape game. C’est la solution imaginée par un professeur d’histoire-géographie à Genève. Tout se déroule dans les locaux du lycée Emilie-Gourd. Dans des salles entièrement modifiées pour les besoins de l’expérience. Les élèves commencent la session dans une tente de bédouins, comme s'ils étaient en Libye. Point de départ du périple : ils ont pour mission de gagner l’Europe.
Très vite, de faux passeurs s’en mêlent et volent l’argent des joueurs, avant de les conduire dans une prison lugubre au sous-sol de l’école. Mais ça, les quatre élèves/migrants ne le savent pas, puisqu’on leur a mis une cagoule sur la tête. Il faudra quelques minutes au petit groupe pour reprendre ses esprits. Et résoudre les premières énigmes pour sortir de cette geôle qui tente d’imiter les vraies prisons clandestines libyennes dans lesquelles s’entassent des milliers de migrants dans des conditions sordides.
Heureusement, les joueurs peuvent compter sur l’aide d’ONG qui vont les guider, pendant leur périple. Rien n’est laissé au hasard. Même pas les douaniers, qui attendent les participants dès qu’ils croient être enfin parvenus dans leur nouvelle terre d’accueil : "Est-ce que vous êtes bien tous passés par l'Italie ?" lance un faux douanier, avant de passer des menottes aux joueurs qui lui répondent favorablement. Les joueurs sont en effet arrêté en vertu des accords de Dublin qui stipulent que c’est le pays d’entrée en Europe qui est responsable de la procédure d’asile.
Un mélange des genres malsain ?
Dit comme ça, cet escape game semble un peu bizarre, voire franchement déplacé. Mais tout a été fait pour éviter de brouiller les pistes entre divertissement et sensibilisation.
Plusieurs organisations comme SOS Méditerranée mais aussi le HCR, le Haut Commissariat pour les réfugiés, qui a son siège à Genève, sont venus tester le jeu. Ils ont proposé leur expertise pour rendre l’expérience plus réaliste. Car l’idée, c’est bien d’apprendre quelque chose aux élèves. En tout cas plus que s’ils étaient restés en classe explique, David Pillonel, le professeur d’histoire à l’origine de l’escape game :
Il y a un potentiel pédagogique énorme dans un "escape game". Entre les décors, le faux sang, l'odeur... L'immersion permet un apprentissage par l'émotion et par le ressenti. Cela permet de toucher plus facilement les élèves.
David Pillonel, professeurfranceinfo
Quant aux joueurs, on sent effectivement que le jeu les a marqué. "J'ai trouvé cela très intéressant, abonde Andrina. On se retrouve dans une vraie situation de stress. Bien sûr, c'est rien comparé à ce que vivent vraiment les gens, mais ça nous permet de comprendre toutes les étapes de leurs parcours".
Depuis deux ans, environ 500 élèves ont déjà vécu l’expérience. On ne sait pas combien vont avoir envie de postuler à des organisations comme le HCR après cela. Mais l'un des jeunes qui a participé à la conception du jeu a, lui, déjà trouvé du travail dans un escape game de Genève.
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