Sommes-nous moins efficaces au travail depuis la crise sanitaire ?

Une nouvelle étude se penche sur la perte de la productivité en France, qui est plus importante que dans les autres pays européens.
Article rédigé par Sarah Lemoine
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Pourquoi la productivité du travail a nettement baissé depuis la fin 2019 ? Une étude cite la forte hausse de l’apprentissage, et la baisse du chômage. Ces embauches d’apprentis et de personnes moins qualifiées ont pesé sur la productivité du travail à hauteur de 2,6 points. (Illustration) (HINTERHAUS PRODUCTIONS / STONE RF / GETTY IMAGES)

C’est une question sur laquelle les économistes s’arrachent les cheveux. Pourquoi la productivité du travail a nettement baissé depuis la fin 2019 ? Ce phénomène va-t-il durer ? La Banque de France vient de publier une analyse.

franceinfo : D’abord, c’est quoi la productivité du travail ?

Sarah Lemoine : La productivité du travail, ça sert à mesurer l’efficacité moyenne par travailleur pour produire des biens et des services. Pour la calculer, on prend la richesse produite, et on la divise par le nombre de personnes en emploi. Tout simplement.

Or, fin 2019, la productivité du travail a commencé à flancher. Elle s’est écroulée pendant la crise sanitaire, avant de se redresser, mais pas du tout à son niveau antérieur. Selon la Banque de France, la productivité du travail a reculé de 8,5% par rapport à ce qu’on aurait pu s’attendre, si on était resté sur la dynamique d’avant covid.

Quelles sont les causes identifiées ?

L’étude cite la forte hausse de l’apprentissage. Grâce aux aides de l’Etat, les entreprises ont massivement recruté des apprentis. 500.000 de plus, environ, depuis 2019. "Dans les statistiques, les apprentis sont comptabilisés par l’Insee comme des travailleurs à plein temps, alors que dans les faits, ils consacrent 25% de leur temps à se former et qu’ils sont moins expérimentés. Ils sont donc moins productifs en moyenne que l’ensemble des salariés", souligne l’économiste Bruno Ducoudré.

Ensuite, il y a la baisse du chômage. Elle s’est traduite par le retour à l’emploi de personnes moins qualifiées, ou éloignées depuis un certain temps du marché du travail. L’un dans l’autre, ces embauches d’apprentis et de personnes moins qualifiées ont pesé sur la productivité du travail à hauteur de 2,6 points. Avec des effets relativement durables. Mais le taux de chômage a baissé, et il y a plus de personnes en emploi, ce qui est très positif, car cela soutient les capacités productives de l’ensemble de l’économie à moyen terme.

Est-ce que la Banque de France identifie d’autres raisons ?

Il y a le phénomène de rétention de main-d’œuvre, c’est-à-dire lorsque les entreprises conservent leurs salariés, malgré une baisse de leur activité ou parce qu’elles ont du mal à recruter. Cela pèse sur le recul de la productivité du travail à hauteur de 1,7% selon la Banque de France.

Après, il y a beaucoup de points d’interrogation. Des facteurs que les économistes n’arrivent pas à expliquer ou chiffrer. Parmi les pistes débattues, l’absentéisme, l’effet du télétravail, le coût de l’énergie, ou bien les entreprises qui ont survécu grâce aux aides pendant la crise sanitaire, alors qu’elles auraient dû mettre la clé sous la porte.

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