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C'est dans ma tête. La retraite dans les têtes : début de la fin ou commencement ?

Comment les retraités vivent-ils leur retraite ? Pour la psychanalyste Claude Halmos, l'image que l'on se fait de la retraite n'a pas changé depuis un siècle. Et le silence quasi général autour de la dimension psychologique de cette partie de la vie n'aide pas à changer la donne. 

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Comment partir plus tôt à la retraite ? (JOEL SAGET / AFP)

Un colloque sur la réforme des retraites a eu lieu, le 11 mars dernier à Paris, à l’Hôtel de Lassay et, par ailleurs, l’âge du départ à la retraite ne cesse, on le sait, de faire débat. Avec la psychanalyste Claude Halmos, au-delà des problèmes matériels, et de leur importance, nous revenons aujourd'hui sur la façon dont les retraités vivent leur retraite.

franceinfo : Comment expliquer que la retraite soit, selon les personnes, vécue de façon si différente ?

Claude Halmos : Je crois qu’il faut d’abord distinguer deux catégories de retraités : ceux - très nombreux - qui touchent une retraite si faible, qu’elle leur permet seulement de survivre. Leurs motivations psychologiques passent donc au second plan. Et ceux dont la retraite est suffisante pour qu’ils puissent vivre. Mais qui ne sont pas aidés, sur le plan psychologique, autant qu’ils pourraient l’être.      

Pourquoi ce silence quasi général sur la dimension psychologique liée à la retraite ? 

La dimension psychologique de la retraite est un sujet que l’on aborde peu : les magazines réservés aux "seniors" sont quasiment les seuls à en parler. Et c’est dommage parce que ce silence contribue à ce que l’on continue à avoir de la retraite la même image qu’il y a un siècle ; et surtout empêche que les futurs retraités y réfléchissent en amont.

Ce qui serait nécessaire, parce qu’ils arrivent aujourd’hui à la retraite beaucoup plus jeunes (dans leurs corps et leurs tête), qu’ils ne l’étaient autrefois, et avec, surtout, beaucoup plus d’années à vivre. La retraite ne devrait donc pas être pour eux le "début de la fin", qu’elle était autrefois, mais au contraire le début d’une période qu’ils pourraient vivre pleinement.          

Pourquoi la retraite est-elle difficile à vivre pour certaines personnes ?          

Pour des raisons très diverses, et toujours très complexes. Le travail est ce qui donne à chacun une identité sociale. Et, beaucoup de gens ont l’impression, quand ils ne travaillent plus, qu’ils ne sont plus rien. Surtout s’ils avaient - pour échapper à une vie personnelle que, du fait de leur histoire, ils avaient du mal à vivre - surinvesti leur travail.

Quand ils ne travaillent plus, leur difficulté à vivre les rattrape. Et puis la liberté est souvent, même si l’on en a rêvé, difficile à vivre. On est maître de son temps ; avec la possibilité de réaliser ses désirs, et le plaisir que cela peut procurer. Si on ne l’a jamais fait (parce que, du fait de l’éducation que l’on avait reçue, on ne se l’autorisait pas), cela peut être angoissant.        

Comment pourrait-on aider les gens dans ce domaine ?      

On pourrait les aider en considérant la retraite comme une période à part entière de la vie, et en leur donnant la possibilité de s’y préparer psychologiquement. On pourrait, par exemple organiser, dans les entreprises, des groupes de réflexion pour que les futurs retraités puissent mettre leurs questionnements en commun, évoquer leurs difficultés et leurs craintes. Mais aussi comprendre la capacité que cette période leur donne, d’œuvrer à la fois pour eux-mêmes en explorant des domaines qu’ils n’ont jamais pu explorer avant, et pour les autres en les aidant, et en leur transmettant ce qu’ils savent.

Et ce serait très utile, parce que les retraités, qui souffrent souvent de ne pas recevoir davantage des autres, méconnaissent généralement tout ce qu’eux-mêmes seraient capables de leur apporter.                              

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