C'est dans ma tête. Après le Covid : une pauvreté en hausse
Le Secours populaire alerte sur la montée de la misère et multiplie les initiatives pour venir en aide aux personnes confrontées à des situations de détresse. Toute une partie de la population de notre pays est fragilisée : 30% des Français, actuellement, souligne la psychanalyste Claude Halmos, ne sont jamais sûrs de faire trois repas par jour.
Le Secours populaire a présenté la semaine dernière la 15e édition du baromètre de la pauvreté qu’il réalise, chaque année, avec l’institut IPSOS. Et ce baromètre montre que le Covid a fragilisé toute une partie de la population française.
La psychanalyste Claude Halmos est la marraine de la campagne sur la précarité post-Covid que lance, en cette rentrée, le Secours populaire, elle évoque aujourd'hui cette nouvelle fragilisation de toute une partie de la population française.
franceinfo : Que représente cette fragilisation, pour ceux qu’elle touche ?
Claude Halmos : Les chiffres du sondage IPSOS font réfléchir : 55% des Français disent avoir, dans leur entourage, au moins une personne confrontée à la pauvreté.
32% des Français ont du mal à payer le loyer, ou l’emprunt de leur logement (dernier rempart, on le sait, contre la précarité). Et 29% à avoir une mutuelle, pour se soigner.
30% des Français ne peuvent pas se procurer une nourriture saine pour faire trois repas par jour ; 1 sur 4 doit se restreindre sur les quantités, 1 sur 5 doit sauter des repas. Et c’est le cas notamment de 34% des moins de 35 ans.Tout cela provoque des souffrances physiques que l’on connaît ; mais aussi des souffrances psychiques, dont on ne mesure pas suffisamment la gravité.
Vous pouvez nous expliquer cette gravité ?
Le psychisme a, comme le corps, besoin pour fonctionner d’un certain nombre d’apports. Un être humain peut donc supporter, un certain temps, un certain degré de privations. Mais il ne peut pas vivre en étant, en permanence, privé de désir, de plaisir, de sentiment de sécurité, et de possibilité d’espoir. Or les 30% des Français, par exemple, qui ne sont jamais sûrs de faire trois repas par jour, n’ont aucune sécurité, et aucun droit non plus au désir et au plaisir : quand on n’est même pas sûr de pouvoir calmer sa faim, on ne se demande pas ce que l’on aurait du plaisir à manger.
Ce qui veut dire qu’ils sont soumis non seulement à des carences alimentaires qui mettent leur santé physique en danger, mais à des carences psychologiques qui hypothèquent leur santé psychique. Et celle de leurs enfants.
Parmi les gens qui vivent sous le seuil de pauvreté, 62% de ceux qui sont parents se privent de nourriture pour leurs enfants. Or les enfants, perçoivent toujours, inconsciemment, tout. Vous imaginez leur culpabilité ?
Que peut-on faire ?
La bonne nouvelle de ce baromètre 2021 est que 65% des Français se disent prêts à aider. Il faut donc qu’ils passent à l’action. Les associations comme le Secours populaire ont besoin de dons ; pour soutenir les familles matériellement, mais aussi psychologiquement. Parce que, plus la solidarité est générale, plus les personnes touchées peuvent, en comprenant que le problème, lui aussi, est général, et qu’elles ne sont donc pas responsables de leur situation, sortir de la honte qui les isole et qui les ronge.
Et ce que je peux ajouter, c’est qu’en aidant les autres, on s’aide aussi soi-même. Permettre à d’autres de retrouver de l’espoir, c’est remettre aussi, pour soi-même, l’espoir en marche. Et, au sortir d’une période qui a été si difficile pour tout le monde, nous en avons tous besoin.
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