Japon : des chercheurs assurent qu'on peut apaiser sa colère en déchirant une feuille de papier

Ils ont testé des pratiques ancestrales de purification de l'esprit et affirment que déchiqueter une feuille de papier, sur laquelle on a rapidement rédigé ses différents ressentiments, permet de réduire son exaspération.
Article rédigé par Yann Rousseau
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Dans une étude, deux groupes écrivent les raisons de leur colère sur une feuille et ceux qui peuvent ensuite la déchirer sont moins énervés. Photo d'illustration. (GETTY IMAGES)

Des chercheurs de l'université de Nagoya viennent juste de publier, mi-avril, les conclusions de leur étude dans la revue spécialisée Scientific Reports. Ce sont des spécialistes de psychologie et de sciences cognitives. Ils se sont intéressés à de très vieilles pratiques japonaises remontant au XVIe siècle. Ils ont notamment voulu comprendre les rites qui étaient pratiqués à l'époque dans un sanctuaire de la préfecture d'Aichi, près de Nagoya. Dans ce sanctuaire, qui s'appelle Hiyoshi jinja, les seigneurs de la région organisaient chaque année un grand festival où la population était invitée à se débarrasser de tous ses ressentiments de l'année. Ces derniers utilisaient une sorte d'assiette sur laquelle ils inscrivaient les raisons de leur colère. Et, après quelques prières, ils détruisaient cette assiette pour, en quelque sorte, se purifier l'esprit.

Les chercheurs de l'Université de Nagoya ont essayé de comprendre si ce rite était vraiment efficace. Ils ont mobilisé des dizaines d'élèves pour essayer de reproduire cette pratique et mesurer en direct l'évolution du taux d'angoisse de leurs cobayes. Les professeurs ont d'abord demandé à leurs élèves de rédiger une petite dissertation sur des enjeux de société, comme, par exemple, le fait de fumer en public, dans la rue, ce qui ne se fait pas au Japon. Ensuite, un professeur a ramassé les copies et il les a notées de manière très sévère. Il a inscrit des commentaires assez durs, comme : "Je ne comprends pas qu'une personne éduquée puisse écrire ce genre de choses". Les copies ont été redistribuées aux élèves et ils ont tous eu deux minutes pour lire les commentaires désagréables qui avaient été ajoutés. Puis, les chercheurs leur ont demandé d'expliquer sur une feuille comment ils se sentaient à la lecture de leurs copies corrigées.

Un effet apaisant sur le cerveau

À la fin de l'expérience, une moitié des élèves a été invitée à froisser la feuille où ils avaient retranscrit leurs sentiments, leurs émotions et à la jeter à la poubelle. L'autre moitié, par contre, a dû conserver cette feuille sur son bureau. Résultat, le niveau de colère entre ces deux groupes est différent. Les professeurs ont donné des questionnaires très précis pour pouvoir mesurer leur niveau de colère au fil de l'expérience. Et le groupe qui avait jeté son papier à la poubelle avait retrouvé, à la fin du test, à peu près, le même niveau d'angoisse qu'il avait au début de l'expérience. Par contre, le groupe qui a dû garder la feuille avec les émotions sur son bureau a vu son niveau de colère rester très haut à la fin de l'expérience. Les chercheurs en ont conclu que le fait de formaliser son ressentiment sur un papier et d'ensuite détruire ce papier avait bien un effet apaisant sur le cerveau. Comme si on avait, en quelque sorte, géré le problème.

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