États-Unis : afin de se prémunir contre la désinformation, la Californie impose une éducation aux médias pour tous les élèves

À partir du 1er janvier 2024, les écoles californiennes, de la primaire jusqu’au lycée, auront l’obligation de mettre en place une éducation aux médias, avec l’ambition d’aider les élèves à reconnaître les fake news et à ne pas se laisser happer par la désinformation.
Article rédigé par Loïc Pialat
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Photo d'illustration. (FREDERIC CIROU / MAXPPP)

Des cours d'éducation aux médias vont être dispensés dans les écoles californiennes, à partir du 1er janvier 2024. Il ne s'agira pas de cours hebdomadaires. L’idée est de disséminer l’enseignement à travers différentes matières, en l’occurrence l’anglais - l'équivalent du français chez nous -, les mathématiques, l’histoire et les sciences, tout au long de la scolarité.

C’est assez rare pour le signaler, le projet de loi "AB 873" a été approuvé par les républicains comme les démocrates. Signée en octobre dernier par le gouverneur, la mesure vise à rendre les élèves capables d'identifier, dans différents médias, des informations ou des données fabriquées, qui relèvent de la manipulation. Quand les Américains parlent des médias, ils parlent de la presse, de la télévision, de la radio, mais aussi très naturellement des "social media", les réseaux sociaux en français.

Trop de confiance, trop d'influence

Un sondage de 2022 du Pew Research Center révèle que les adultes de moins de 30 ans font autant confiance aux informations trouvées sur les réseaux sociaux, qu’à celles données par les médias traditionnels. Repérer la désinformation paraît donc plus que jamais d’actualité.

C’est ce qu’explique Marc Berman, le membre de l’Assemblée qui a porté le projet de loi en début d’année. Il cite une étude de l’université de Stanford, selon laquelle 82% de collégiens ne parvenaient pas à distinguer un article d’une publicité. De même, une vidéo, supposée illustrer la fraude électorale aux États-Unis, a été montrée à des lycéens. La vidéo avait en fait été tournée en Russie, mais elle a trompé un lycéen sur deux, qui a considéré qu’il s’agissait d’une preuve. L’élu démocrate explique qu’il a vu "l’impact de la désinformation dans le monde réel" et comment "elle influence la façon dont les gens votent", ou les pousse à renverser la démocratie.

Question urgente pour les associations

La loi ne convainc pas tout le monde. La Hoover Institution, centre de recherches conservateur, se demande déjà si les enseignants ont vraiment la légitimité pour parler de désinformation, alors que beaucoup d’adultes en sont eux aussi victimes. Autre reproche : faut-il une loi pour enseigner ce qui n’est finalement qu’une forme d’esprit critique ? C’est pourtant ce qu’on attend de l’école, en plus d’apprendre à lire, écrire et compter. 
 
La Californie n'est pas le seul État à avoir légiféré sur le sujet. L’Illinois, le Texas, la Floride, le New Jersey et le Delaware ont instauré des mesures similaires. Selon l’association Media Literacy Now, 18 États, sur les 50 qui constituent l’Union, se sont penchés sur la question. Media Literacy Now alerte les législatures locales sur l’importance de former les enfants à la désinformation. L’association américaine de psychologie s'est jointe à cette mise en garde, surtout pour préparer les plus jeunes aux risques multiples posées par les réseaux sociaux. En Californie, la loi n’a pas prévu de budget pour la formation des enseignants ou l'incorporation des bibliothécaires au cursus. Ce n'est pas un problème, dit-on du côté du législateur, ce sont des détails que les élus pourront ajuster. La priorité, c’était d’avoir le texte prêt rapidement pour former les élèves sans attendre.

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