Loi sur le cyberharcèlement : pourquoi la fin de l'anonymat voulue par la majorité est un casse-tête ?

Déjà adopté au Sénat, le projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique arrive mardi à l’Assemblée nationale. Des débats houleux sont à attendre, notamment autour de la levée de l'anonymat sur les réseaux sociaux portée par de nombreux députés de la majorité.
Article rédigé par franceinfo
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Le gouvernement s’est déjà opposé à la mesure de la levée de l'anonymat, mais les députés de la majorité vont tenter de le convaincre. (PASCAL BROCARD / MAXPPP)

Tout le monde est d’accord pour en finir avec l’impunité des cyberharceleurs et des sites pornographiques. Mais la question, c’est comment ? Le texte du projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique arrive en première lecture à l'Assemblée, mercredi 4 octobre, et l'idée de la fin de l'anonymat reste un sujet brûlant.

Composer avec le règlement européen sur la protection des données

Si on était en Chine ou dans les Émirats, ce serait déjà réglé. Dans les démocraties, aucun État n’a encore trouvé de solution vraiment efficace qui respecte la vie privée. Prenons l’exemple du blocage des sites pornographiques aux mineurs. Cela fait deux ans que plusieurs sites sont condamnés. Pourtant, ils restent toujours accessibles à n’importe qui. Il suffit de cliquer sur le bouton "j’ai plus de 18 ans". Pourquoi ? Simplement parce qu’ils attendent qu’on leur donne la méthode officielle.

Or le gouvernement n’est toujours pas prêt. Des solutions sont en test depuis des mois. Mais aucune ne fait l’unanimité. Il y a toujours des craintes d’être fiché. Et il faut que la solution respecte le règlement européen sur la protection des données. Une équation loin d’être simple.

D'autres pays ont jeté l'éponge

La France n’est pas la première à se casser les dents sur le sujet. Après des années de batailles technico-légales, l’Angleterre et l’Australie ont fini par abandonner leurs projets. Ils préfèrent désormais miser sur la prévention.

De plus, les discussions ne concerneront que quelques sites. Rien n'est prévu pour les contenus pornographiques qui peuvent se retrouver sur Télégram, sur Twitter (devenu X), sur des forums comme Discord ou Reddit, des blogs comme Tumblr.

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L'autre sujet emblématique du projet de loi est le bannissement des réseaux sociaux en cas d’infraction. Mais là aussi, on retombe sur un problème de vie privée. On peut facilement bloquer le compte d’une personne en infraction, mais comment lui interdire de se réinscrire avec une autre adresse mail ou un autre pseudo ?

La fin de l'anonymat, pas si simple à appliquer

La question centrale reste de trouver comment relier facilement un compte internet à une personne physique. Certains députés veulent en finir avec l’anonymat. Et obliger à certifier son identité quand on s’inscrit sur un réseau social.

Cependant, là encore, aucun mécanisme n’a fait ses preuves. On ne sait toujours pas, concrètement, quelle procédure sera proposée par le gouvernement. Si on se souvient de la levée de boucliers lors du lancement de l’application Tous Anti-Covid et des multiples faux départs de la carte d’identité numérique, on voit que c’est déjà très compliqué de mettre en œuvre un outil d’identification qui n’est utilisé que par l’État. Alors on imagine le casse-tête s’il doit en plus servir à se connecter à des services étrangers de façon simple et sécurisée.

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