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Edouard Philippe ne redoute pas une forte majorité à l'Assemblée où il y aura "une opposition tonique"

Le Premier ministre, invité de franceinfo mardi, a déclaré qu'il "ne croit pas du tout que les députés qui choisiront de se placer dans l'opposition seront silencieux". 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Edouard Philippe, Premier ministre. (RADIO FRANCE / JEAN-CHRISTOPHE BOURDILLAT)

Le Premier ministre, Edouard Philippe, invité de franceinfo mardi 13 juin, a réagi aux résultats du premier tour des législatives de dimanche dernier et aux projections données par les sondages. Interrogé sur le score très large obtenu par le parti présidentiel, La République en marche (LREM) et son allié, le MoDem, Edouard Philippe a réfuté le terme de "victoire". Le Premier ministre a dit vouloir afficher de la "prudence" et de "l'humilité vis-à-vis du suffrage des Français".

"On verra ce qu'ils choisissent de dire par leur vote. Les résultats laissent à penser qu'il y aura une majorité, je m'en réjouis pour que le gouvernement puisse mettre en œuvre les orientations et atteindre les objectifs fixés par le président de la République", a déclaré Edouard Philippe. "Je souhaite une majorité stable à l'Assemblée nationale, mais je sais qu'il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs. On verra dimanche soir", a ajouté le Premier ministre.

Pour une "majorité stable à l'Assemblée" 

"La démocratie française repose sur une majorité parlementaire et sur d'autres piliers du pouvoir, le Sénat par exemple", a répondu, mardi, Edouard Philippe à ceux qui s'inquiètent d'une hégémonie de La République en marche à l'Assemblée nationale. "Je n'ai pas entendu les amis que je peux avoir dans le camp des Républicains dire, avant le début de la campagne des législatives, qu'il ne fallait surtout pas qu'ils aient eux une majorité car sinon ils auraient tous les pouvoirs à l'Assemblée et au Sénat et que ce serait un problème pour la démocratie", a-t-il précisé. "Je ne crois pas du tout que les députés qui choisiront de se placer dans l'opposition seront silencieux", a ajouté le Premier ministre. 

"Il faut une majorité stable à l'Assemblée nationale, ensuite il y aura un débat au sein de l'Assemblée parce qu'il y aura des oppositions, et puis il y aura le Sénat, il y aura des discussions. Il y aussi les collectivités territoriales", a-t-il ajouté. "Je ne crois pas que les députés qui choisiront de se placer dans l'opposition seront silencieux, ils seront même extrêmement toniques", a estimé Edouard Philippe.

La dose de proportionnelle, mais aussi le niveau de l'Assemblée 

"Le président de la République s'est engagé et a considéré, je crois à juste titre, qu'il fallait corriger le mode de scrutin actuel en y introduisant une dose de proportionnelle. Je n'ai aucun problème avec ça", a affirmé sur franceinfo, Edouard Philippe. 

"Une dose de proportionnelle à l'Assemblée nationale, ça ne me choque pas, mais c'est utile parce que ça permet d'ouvrir la répartition des sièges à des courants politiques qui ont du mal à franchir le cap démocratique du scrutin majoritaire", a expliqué sur franceinfo le chef du gouvernement, en s'interrogeant sur le niveau auquel fixer les modifications. La dose de proportionnelle est "à regarder dans le détail pour savoir combien de parlementaires restent à l'Assemblée nationale et comment est-ce qu'on organise la nouvelle Assemblée, avec peut-être moins de députés et des modes de scrutin différents pour les désigner".

Le déficit budgétaire passé au crible

Le gouvernement de François Hollande s'est engagé à arriver fin 2017 à un déficit public à moins de 3%. Un engagement qu'a tempéré Edouard Philippe, le Premier ministre, mardi sur franceinfo. "J'espère que le précédent gouvernement a intégré dans le budget 2017 l'ensemble des éléments qu'il a annoncé avant de passer la main", a-t-il déclaré. "Avant de devenir Premier ministre, j'avais des doutes. Maintenant que je suis Premier ministre, j'ai des doutes encore plus sérieux."

Le Premier ministre a annoncé que le gouvernement avait demandé à la Cour des comptes d'effectuer un audit. Son avis est attendu au 1er juillet prochain. La Cour des comptes nous dira si la France était "sur une trajectoire qui permettait d'arriver à 2,8% ou si nous étions au-dessus". "Je crains que ce ne soit probable et je pense même que c'est un risque extrêmement fort et je m'en désole", a ajouté Edouard Philippe. Avant de prendre toute décision, Edouard Philippe attend donc l'état des lieux de la Cour des comptes. "Il faudra ensuite regarder comment on passe la fin de l'année et comment on construit." Quant à un possible collectif budgétaire, "ce n'est pas l'objectif d'en faire un au mois de juillet et je pense qu'il n'y en aura pas", a-t-il précisé. 

La presse et Bayrou : "Il n'est plus citoyen"

Edouard Philippe a estimé que l'appel téléphonique passé par François Bayrou à un journaliste de Radio France pour exprimer son mécontentement à propos d'une enquête journalistique en cours sur le MoDem n'était pas une bonne pratique. "Quand on est ministre, on ne peut plus réagir comme quand on est un simple citoyen", a tranché le Premier ministre. "Il se trouve que quand on est ministre, on n'est plus simplement un homme animé par ses passions, sa mauvaise humeur ou son indignation. Je pense qu'il [François Bayrou, NDLR] a parfaitement conscience de ça", a dit Edouard Philippe. Le Premier ministre a ajouté avoir rappelé à ses ministres la nécessité de "penser à cette question de l'exemplarité"

Par ailleurs, interrogé sur la plainte contre X déposée par le ministère du Travail pour vol et recel de documents, après la publication dans Libération d'informations présentées comme des pistes de la future réforme du code du travail, le Premier ministre a adressé une mise en garde à l'administration. "C'est le message clair, ferme que nous avons voulu adresser et ce n'est en aucun cas un message dirigé contre la presse, qui a évidemment non seulement un devoir d'information, mais une envie légitime d'informer. Il ne s'agit pas de brimer la presse. Je ne la critique pas", a insisté Edouard Philippe. 

Le Premier ministre a mis en garde les fonctionnaires, qui ont "des droits et des obligations". "Balancer dans la nature des documents qui ne sont pas des documents officiels, validés, c'est vouloir nuire à un process dans lequel nous sommes engagés de discussions respectueuses avec les organisations syndicales et patronales et ça n'est pas acceptable", a prévenu Edouard Philippe.

Le "bon endroit" pour discuter du Code du travail

Appelé à préciser les pistes du gouvernement pour réformer le Code du travail, le Premier ministre a mis en avant les discussions engagées avec les partenaires sociaux. "On cherche par cette réforme à définir le bon endroit de discussion. Je crois à la négociation, à la discussion, je crois que c'est extrêmement efficace pour avancer. La question qu'on se pose c'est 'faut-il discuter dans l'entreprise ou dans la branche ?'", a-t-il expliqué.

La possibilité de définir à l'avance dans un contrat de travail les causes de licenciement sera-t-elle incluse dans les ordonnances qui vont être prises ? "On verra", a répondu Edouard Philippe."Je ne vais pas préempter systématiquement les sujets. Sinon, au moment où je vous répondrais, je vous dirais implicitement que les discussions que nous avons avec les organisations patronales et syndicales n'ont aucune espèce d'utilité. Je suis extrêmement attaché au process parce que je pense que c'est la condition sine qua non d'une discussion respectueuse et intelligente avec les organisations", a-t-il ajouté pour justifier son refus de répondre plus précisément. Le Premier ministre a insisté sur le fait qu'il a "déjà exprimé que toute une série de règles relatives au contrat de travail n'avaient pas vocation à être discutées dans l'entreprise. Le nombre de CDD, la durée du CDD, le fait que le CDI est le contrat de droit commun".

Qatar : "la France parle à tout le monde"  

Interrogé sur la mise au ban du Qatar par plusieurs de ses voisins du Golfe, Edouard Philippe a précisé que la position de la France consistait à "parler à tous les pays de cette région".

"Quand vous avez des oppositions frontales qui s'organisent et qui se développent à toute vitesse, je ne pense pas que ce soit sain pour la stabilité de la région, pour les intérêts de l'Union européenne et plus généralement pour les intérêts des démocraties occidentales." Le Premier ministre a estimé que cette position a pour but d'éviter "toute logique d'escalade"

Regardez l'intégralité de l'entretien du Premier ministre, Edouard Philippe, sur franceinfo,  mardi 13 juin 2017.

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