Eric Heyer (OFCE) : "La dette est vue comme un instrument, pas comme un objectif".
Eric Heyer, directeur du département analyse et prévision à l'OFCE, était l’invité de Stéphane Dépinoy ce vendredi 15 avril.
Invité de Stéphane Dépinoy sur Franceinfo ce vendredi, Eric Heyer est revenu sur le sujet qui parait la « grande oubliée » de la campagne, la dette. D’après lui, nous sommes dans un moment "technique" où la dette est importante, mais ne coûte pas cher : "Ça nous coûte trois fois moins cher alors qu’elle est deux fois plus importante". S’il affirme que s’endetter n’est pour le moment pas "très douloureux", il prévient que ce n’est pas une raison pour faire n’importe quoi : "On a deux possibilités, la première, c’est utiliser ces dix ans où les taux d’intérêts sont faibles pour se débarrasser de la dette (…), soit on dit, c’est l’occasion pour investir dans des enjeux de demain". Parmi ces enjeux, il cite en premier lieu la transition écologique ou la lutte contre les dépendances révélées durant la crise du COVID et la guerre en Ukraine : "La dette est vue comme un instrument, pas comme un objectif". S’il admet qu’il n’y a pas d’argent magique, il souligne que l’important n’est pas combien on dépense mais comment. Il met l’accent notamment sur la qualité des actifs et la bonne utilisation de l’argent public : "Certainement pas pour soutenir la consommation d’aujourd’hui, mais plutôt soutenir l’investissement de demain".
Pour Eric Heyer, l’inflation était déjà présente avant la guerre en Ukraine avec la crise COVID. Il rappelle que les prix avaient baissé en 2020 (20 dollars le baril) des suites des chocs d’offre et de demande simultanés : "C’est d’abord les effets de la demande qui l’emportent puis les effets de l’offre qui arrivent". Lorsque les effets d’offre se sont fait sentir, les prix sont repartis à la hausse : "La demande est repartie beaucoup plus qu’attendue et donc beaucoup de demande avec une offre presque plate, là c’est les prix qui réaugmentent très fortement" explique-t-il. Cette dernière augmentation a été accentuée par la crise en Ukraine qui frappe les ménages les plus modestes : "L’Ukraine, c’est de l’énergie et de l’alimentaire (…), l’énergie comme l’alimentaire, c’est un bien de première nécessité et donc ça touche énormément les ménages modestes dans leur panier".
Pour faire face à ces hausses de prix pour les ménages, Eric Heyer prévient que des hausses de salaire, qui représentent un coût pour les entreprises, pourraient alimenter une spirale inflationniste : "Si les entreprises répercutent ce coût dans leurs prix, finalement, on n’aura rien gagné". Dans un contexte où la banque centrale pourrait relever ses taux et donc casser l’investissement et la croissance, il appelle l’Etat, à court terme, à financer la perte de pouvoir d’achat des ménages via des aides ciblées : "Il va falloir essayer de distinguer ceux qui ont le choix et ceux qui n’ont pas le choix, ceux qui ont les moyens et ceux qui n’ont pas les moyens et faire du ciblage". Le directeur du département analyse et prévision à l'OFCE conclut en prévoyant un risque de hausses de prix durable : "On peut avoir un début difficile de quinquennat".
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