Elie Cohen (économiste) : "Il ne faut jamais oublier que l'Europe n'existe pas comme entité politique décisionnelle"
Elie Cohen, économiste et co-auteur de "La valse européenne" était l'invité de Jean-Paul Chapel dans la matinale de France Info.
Les prévisions de l'OCDE sur la croissance mondiale sont plus optimistes que les derniers chiffres publiés en décembre. La France fait partie des pays qui s'en sortiraient le mieux en 2021. Elie Cohen juge "très intéressant" ce rapport. "Il montre la très grande incertitude des prévisions économiques et en même temps, ce qui est décisif dans la nouvelle prévision économique : l'intensité de la vaccination. Le mot d'ordre qui est martelé c'est : vaccinez ! vaccinez ! vaccinez !"
La vaccination se passe globalement bien selon l'OCDE. "Cette crise agit comme une loupe, selon l'économiste. Les Etats-Unis ont fait bien mieux que l'Europe en période de crise alors qu'on avait l'impression qu'ils l'avaient plutôt mal gérée. Aujourd'hui, la vaccination se déploie bien. Au total, on prévoit un doublement de la perspective de croissance. L'Europe réagit moins bien face à la dimension sanitaire de la crise ainsi que pour la relance de l'activité économique." Les Etats-Unis ont engagé plus de 1 600 milliards d'euros, deux fois plus que le montant prévu pour la relance européenne. "La violence de l'effort de relance aux Etats-Unis est très frappante. En Europe, on a l'impression que l'on en fait trop, que l'on augmente les déficits,...Tout le monde est obsédé par le problème de la dette alors qu'aux Etats-Unis, d'un trait de plume, on décide d'un effort de relance comme on en a jamais connu. On distribue même des chèques aux gens pour qu'ils puissent consommer." Que fait l'Europe ? "Il ne faut jamais oublié que l'Europe n'existe pas comme entité politique décisionnelle. Quand Trump décide de mettre 14 milliards pour le plan vaccination, l'Europe se réunit, délibère et cela prend du temps quand vous devez mettre d'accord 27 pays." Aujourd'hui, pas un seul euro du plan de relance européen n'a encore été dépensé. Elie Cohen le justifie : "Il faut approuver le plan. Sans oublier que la moitié va être versée sous forme de subventions." L'économiste se félicite que "le sujet dont on débat en Europe depuis près de trente ans - est-ce que l'Europe sera une union de transferts ? - a été tranché d'un seul coup avec ce plan".
Co-auteur de "La valse européenne", Elie Cohen avance que l'Europe se transformerait lors de crises. "En étudiant les différentes crises, j'ai découvert qu'elles obéissent à un modèle ternaire. Dans un premier temps, l'Europe déçoit toujours, comme lors de la crise grecque où il n'est pas question d'aider le pays. Puis, l'Europe met en place un plan d'aide qui n'est pas dans les textes européens. Donc, on invente un dispositif tout en précisant bien qu'on le fera une fois mais pas deux. Et en réalité, on va le faire trois fois. Et enfin, on crée une union bancaire." Cas identique avec cette crise : "La santé ne faisait pas partie des compétences européennes, peut-être que l'on va prochainement inventer une union sanitaire", imagine l'économiste.
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