Philippe Petitcolin (Safran) : "En France, le chômage partiel nous a permis de résister à la crise et de maintenir l’emploi"
Leader mondial des moteurs d’avion et des équipements d’aviation, comment va le groupe industriel français Safran ? Philippe Petitcolin, directeur général du groupe, était l’invité de Jean-Paul Chapel dans ":l’éco".
Avant d’évoquer la santé économique du groupe qu’il dirige, Philippe Petitcolin a livré son ressenti sur l’assassinat du professeur Samuel Paty, au matin de l’hommage national qui lui est rendu : "J’ai beaucoup de chagrin. Mon premier métier a été celui de professeur. C’est comme ça que j’ai démarré dans la vie professionnelle donc oui, cela me touche beaucoup."
Sur le champ économique, la crise du COVID-19 a un impact important sur le secteur de l’aéronautique. Quelles conséquences pour Safran ? "Pour notre entreprise, c’est une baisse de notre chiffre d’affaire de plus de 30 % depuis début 2020, dont -42 % au troisième semestre" explique-t-il. "Malgré cela, nous sommes profitables, car nous avons une bonne gestion. Cela se traduit toutefois malheureusement à l’international par des baisses d’emploi : nous étions quasiment 100000 personnes employées au niveau mondial, et nous sommes descendus à 80000." Toutefois, en France, les effectifs ont très faiblement diminué, s'élevant aujourd’hui à 44000 employées, contre un peu plus de 45000 avant la crise : "Les mesures que le gouvernement français a mis en œuvre, extrêmement généreuses pour les entreprises, nous a permis de résister et de maintenir l’emploi, ce qui s’est traduit par un taux de chômage partiel extrêmement important. Dans certains sites, nous étions à plus de 60 % de chômage partiel. Aujourd’hui, nous venons de signer avec l’ensemble de nos syndicats un accord d’Activité Partielle de Longue Durée (APLD) qui nous permet d’avoir recours au chômage partiel jusqu’à 40 % de notre activité » déclare Philippe Petitcolin, qui dit espérer que ce taux sera suffisant : "Avec la deuxième vague en Europe, j’espère que l’on pourra tenir. L’aéronautique civil est un marché mondial, qui reprend très bien en Asie. Des avions redécollent, il y aujourd’hui 12000 à 13000 vols domestiques par jour en Chine, qui est à 95/98 % de l’activité avant la crise. Les États-Unis sont à -40 %, l’Inde à – 46 % et l’Europe la semaine dernière était à -52 %... Et je crains que les prochaines semaines aggravent ce chiffre." Mais faut-il que les effectifs menacés dans le secteur se reconvertissent ailleurs ? "Ce n’est pas du tout ce que nous cherchons. Lorsque l’on regarde les grandes études, la baisse de l’activité de l’aéronautique civil par rapport à ce qu’elle était prévue avant la crise n’est que de – 2% : on parle de 41000 avions à fabriquer dans les 20 ans qui viennent au lieu de 43000. C’est une faible diminution."
"Nous dépensons entre 300 et 500 millions par an pour notamment trouver des moteurs moins consommateurs en carburants"
Et quel est l’impact du défi climatique, marqué notamment par un refus de prendre l’avion chez de nombreux jeunes, réfractaires à utiliser un moyen de transport très polluant ? "Ce phénomène a principalement lieu en Europe, mais pas du tout en ailleurs où les gens sont ravis de voyager" explique Philippe Petitcolin, qui dit être toutefois motivé à construire un avion qui ne pollue pas : "Nous savons que la décarbonation est essentielle pour garantir l’avenir de notre industrie. Nous dépensons entre 300 et 500 millions par an en recherche et en innovation pour travailler notamment sur des moteurs moins consommateurs en carburants, et pouvant brûler des carburants dits synthétiques et de l’hydrogène. Nous sommes en train de travailler avec des avionneurs pour préparer la nouvelle génération de moteur. Nous saurons d’ici 2025-2027 avec quel carburant ils voleront. Pparmi les candidats possibles pour remplacer les carburants fossiles d’aujourd’hui, il y a des biocarburants (donc issus de la biomasse), mais aussi des carburants synthétiques, et peut être même à l’hydrogène."
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