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Enquête : qui sont les nouveaux militants du climat ?

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OEIL MILITANTS CLIMAT
Article rédigé par L'Oeil du 20 heures
France Télévisions
“Ecoterroristes”, “khmers verts” ou encore “hydrofurieux” : autant d’expressions pour tenter de désigner les nouveaux militants de la cause écologiste. L’Oeil du 20h a voulu en savoir plus sur leurs motivations et leurs modes d’action.

“Nous sommes tous des écoterroristes !” Ce jour-là, à Niort, ils se réapproprient l’expression pour la moquer. C’est le ministre de l’Intérieur, qui le premier, les a désignés ainsi, après les événements de Sainte Soline. Il déclarait alors : “il y a eu une grande partie des manifestants violents, qui s’en prenaient aux gendarmes. (...) Cela relève de l’écoterrorisme. La main ferme de l’Etat sera au rendez-vous.” 

Quelques mois plus tard, et à 50 kilomètres des mégabassines à l’origine de heurts avec les forces de l’ordre, 4000 sympathisants écologistes se sont donnés rendez-vous pour soutenir 9 militants anti-bassines lors de leur procès. L’un des prévenus, Julien Leguet, porte-parole du collectif “Bassines non merci”, annonce sans détour : que l’Etat n’ait aucun doute, et que le gouvernement n’ait aucun doute : coupez les têtes et il en repoussera dix. Nous sommes l’hydre qui se bat pour l’eau.”

La lutte contre les mégabassines a fédéré différents collectifs écologistes. Officiellement, ils revendiquent tous le principe de non violence. Pourtant parmi les militants, certains la justifient par l’urgence de la crise climatique. Un jeune homme affirme :”je ne suis absolument pas anti violence. Elle me semble nécessaire dans un monde violent.” Une femme reconnaît “c’est horrible à dire, mais je suis pour ceux qui vont à la confrontation et je les soutiens.” 

42 lieux de lutte écologiste en France

Il y a 3000 fichés S au sein de l’ultra gauche. Avec, parmi eux, des militants écologistes. mais aussi, des groupes antifascistes qui se sont greffés aux manifestations. 

Le ministère de l’intérieur a identifié 42 lieux de tension potentielle sur le territoire, similaires  à Sainte-Soline. Sur les réseaux sociaux, les groupes s’organisent en fonction des luttes locales. Tous ont un mot d’ordre : la prudence. Leurs membres ont recours à des messageries cryptées. Ils recommandent l’usage d’un pseudonyme pour ne pas révéler son identité, y compris entre activistes. 

Rendez-vous à l’Académie du Climat

Nous avons intégré l’une de ces organisations. un groupe, connu pour ses coups d’éclat : aux portes des ministères ou même, lors d’événements sportifs.  Dès le premier message, le ton est donné :  

“Nous allons au devant du plus grand épisode de souffrance et d’injustice dans l’histoire humaine (...) C’est l’opération de sauvetage de la dernière chance et toi tu peux en faire partie”

Rendez-vous nous est donné et pas n’importe où : à l’Académie du Climat. Un bâtiment public, appartenant à la Mairie de Paris, qui laisse ce lieu à disposition des associations. 

Dès les premières minutes de la présentation, le discours se veut radical. Un jeune militant affirme qu’”il faut enfreindre la loi parfois pour faire surgir des lois légitimes. Ce qui est légitime n’est pas toujours légal aujourd’hui . On fait la part entre légalité et légitimité."

En fin de présentation, d’autres activistes interviennent. Parmi eux, une jeune femme condamnée à deux mois de prison avec sursis pour vandalisme lors d’une action coup de poing. Une autre militante vient de sortir de garde à vue et est applaudie. 

Contactée, la mairie de Paris se dit attachée à la liberté d’expression même quand certains propos “peuvent déranger”. Elle précise néanmoins : 

comme pour tout lieu public, la Ville de Paris n’est pas en droit de contrôler les casiers judiciaires des personnes (...). Comme pour tout autre service, à chaque fois que des atteintes aux valeurs de la République sont constatées, la Ville de Paris signale ou engage des actions judiciaires.”

Journée de formation à “la désobéissance civile et l’action directe non violente”

Cette méthode de l’illégalité est assumée par certains militants. Dans plusieurs villes de France, des journées de formation sont même organisées gratuitement. Nous en avons suivi une à Marseille, aux côtés d’une trentaine de nouvelles recrues de la région. Dans le public, il y avait des étudiants, des ouvriers ou des ingénieurs, de 18 à plus de 40 ans.

Au programme : des conseils concrets en cas d’interpellation pour éviter une condamnation. A commencer par le smartphone. “Ne pas prendre son portable. C’est fondamental”, recommande la formatrice. “Une fois qu’ils ont accès à votre portable, ils ont accès à des choses énormes sur tous les militants et militantes avec qui vous avez parlé”

Ici, les formateurs évoquent clairement leur défiance à l’égard des policiers. “Tout ce que vous allez dire sera à charge. Leur but, c’est pas la manifestation de la vérité, leur but, c’est de vous enfoncer. Donc la consigne qu’on donne elle consiste en une phrase. “Je n’ai rien à déclarer.” Du début jusqu’à la fin.”

“En ce moment, on ne passe plus entre les mailles du filet” 

Ces formations sont obligatoires pour rejoindre le collectif. Une précaution, car depuis quelques mois, ses membres se savent observés étroitement par les forces de l’ordre, comme nous le raconte la formatrice. “C’est pas du tout anodin ce qu’on fait . Ca reste de l’illégalité. C’est de la désobéissance civile en fait, donc c’est illégal. On n’a pas le droit de le faire. Parfois on passe entre les mailles du filet, en ce moment on ne passe presque plus entre les mailles du filet”  

Radicalité, action coup de poing, contact parfois violent avec la police… Des méthodes dénoncées par cet ancien responsable militant, joint par téléphone. Il évoque le risque d’engrenage pour les jeunes recrues, qui se retrouvent parfois dépassées par les événements. “Ce qui m'a touché, c'est de voir des jeunes activistes qui s'asseyaient en débrief après, ils n'osaient pas remettre en cause ce qu'on faisait (...) Ça épuise les militants. Les mouvements ne veulent pas communiquer là-dessus mais derrière ça, il y a des gens qui craquent et c'est violent. Donc moi ça me fait assez mal au cœur lorsque je vois effectivement que des gens entre 20 et 30 ans dépressifs. 

Selon nos informations, en 2023, plus de 50 militants écologistes ont été condamnés par la justice française. Quant aux 9 prévenus des mégabassines, ils seront jugés le 28 novembre. 

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