Taxe Tobin : Nicolas Sarkozy se rend à Berlin pour convaincre Angela Merkel
La volonté de Nicolas Sarkozy d'instaurer une taxe sur les transactions financières - la taxe Tobin qu'il décriait en 1999 - devrait être au coeur de ses discussions avec la chancelière allemande Angela Merkel qu'il retrouve ce lundi à Berlin.
A la veille du déplacement du chef de l'Etat en Allemagne, lundi 9 janvier, Berlin avait sèchement rappelé que sa position était "inchangée" sur la taxe Tobin. "Le but est d'aboutir à l'instauration d'une taxe sur les transactions financières dans l'Union européenne", avait déclaré le porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Seibert.
Les autorités allemandes privilégient un consensus au niveau de l'UE, ou au moins de la zone euro, de peur de plomber la compétitivité de la place financière de Francfort.
Au niveau européen, le premier ministre britannique, David Cameron, a estimé dimanche que la France était dans son droit avec ce projet mais il a prévenu qu'il bloquerait l'instauration d'une taxe Tobin si elle n'était pas suivie au niveau mondial.
Un texte devant le Parlement dès février ?
A trois mois et demi du premier tour de la présidentielle, le gouvernement affiche sa détermination à instaurer de manière unilatérale cette taxe sur les transactions financières, idée relancée par M. Sarkozy. Un projet de loi pourrait être présenté au Parlement dès février, selon les propos du secrétaire d'Etat au Logement, Benoist Apparu, dimanche 8 janvier 2011, sur Radio J.
"Ce n'est pas parce que les financiers disent 'non, on ne veut pas être taxés' qu'on va les écouter", a-t-il ajouté.
Dans un communiqué publié vendredi 5 décembre, l'association Paris Europlace, qui regroupe l'ensemble des acteurs de la place financière française avait manifesté "son opposition à la mise en place d'une taxe sur les transactions financières qui, si elle n'était pas européenne, affaiblirait l'économie française".
Ségolène Royal : "qu'il la fasse"
Invitée à l'émission les "4V" sur France 2, Ségolène Royal, qui faisait sa rentrée après son échec aux primaires socialistes, a affirmé lundi matin : "pensons d'abord aux Français, si M. Sarkozy peut convaincre ses homologues allemands, et bien qu'il le fasse".
Arnaud Montebourg avait quant à lui déclaré, sur France 3, qu'il voterait le projet de loi. Le député PS de Saône-et-Loire juge toutefois incongru de le présenter aujourd'hui, alors même que M. Sarkozy et le gouvernement déclaraient jusqu'ici que ce n'était pas possible justement du fait d'une absence d'accord européen.
D'autres au Parti socialiste ont critiqué ce projet le voyant comme une simple intention électoraliste qui n'aurait aucune portée concrète.
"Nous attendons la capacité de Nicolas Sarkozy à convaincre ses partenaires européens, puisque tout le monde sait que c'est évidemment au niveau européen qu'il faut mettre en oeuvre cette taxe", a déclaré Manuel Valls, directeur de la communication de François Hollande. Le député de l'Essonne a ajouté qu'il attendait "de voir ce qui est de l'ordre de l'annonce" et ce qu'est "la réalité".
Le député socialiste Julien Dray s'est montré "prudent", sur ce projet de taxe à la seule initiative de la France. "Le problème n'est pas d'être pour ou contre" mais de "savoir si elle sera, dans ses modalités, une véritable taxe sur les transactions financières et quelle sera son ampleur".
"Il ne faudrait pas, a dit M. Dray, qu'elle soit un gadget, quelque chose qui soit votée mais inapplicable, qui soit de l'ordre de la gesticulation".
A droite, Dominique de Villepin a lui aussi estimé, sur Canal+, qu'une instauration unilatérale allait pénaliser le système bancaire français. "Il ne faut pas mélanger le calendrier électoral et l'intérêt national, c'est ce que fait aujourd'hui le gouvernement, c'est de mélanger les deux", a regretté le candidat de République solidaire à la présidentielle.
Le monde de la finance opposé à cette taxe
Outil destiné, à la fois, à lutter contre la spéculation et à apporter de nouvelles ressources fiscales, la taxe Tobin, du nom de l'économiste américain qui l'a imaginée au début des années 1970, consiste à appliquer aux transactions financières une imposition à un taux très faible, de l'ordre de 0,1% ou moins.
Les banques et les opérateurs boursiers sont opposés à une telle mesure, de même que les Etats-Unis. La Grande-Bretagne, la Banque centrale européenne (BCE) sont contre toute taxe qui ne s'appliquerait pas mondialement.
Ce débat intervient à trois mois et demi du premier tour de la présidentielle en France, au moment où la zone euro suscite de nouvelles inquiétudes. Les Bourses européennes ont toutes clôturé dans le rouge vendredi, à l'exception de Londres.
Le président de la République, qui n'est pas encore officiellement candidat à sa succession, rencontre ce lundi à Berlin la chancelière allemande Angela Merkel, pour harmoniser les positions française et allemande avant un sommet européen à la fin du mois.
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