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Les coulisses de la tribune de Nicolas Sarkozy sur l'Europe

L'ex-chef d'Etat a écrit une tribune dans "Le Point". Un coup médiatique savamment orchestré.

Article rédigé par Violaine Jaussent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
L'ancien président de la République Nicolas Sarkozy à Nice (Alpes-Maritimes), le 10 mars 2014. (VALERY HACHE / AFP)

"La tribune a été bouclée dans le plus grand secret." Plusieurs médias, dont Le Point lui-même, racontent, jeudi 22 mai, comment l'ex-président de la République Nicolas Sarkozy a rédigé une tribune sur l'Europe publiée dans l'hebdomadaire, à trois jours des élections en France.

Un texte minutieusement préparé

Pourquoi Nicolas Sarkozy a-t-il pris la plume ? L'élément déclencheur est la tribune de François Hollande publiée le 8 mai dans Le Monde, intitulée L'Europe que je veux, affirment Europe 1 et RTL. Cette tribune a été prise comme un contre-exemple de ce qu'il ne fallait pas faire, expliquent des fidèles de l'ancien président à Europe 1.

Président de l'Union européenne au second semestre 2008, au plus fort de la crise, Nicolas Sarkozy tenait à rappeler, en publiant cette tribune, qu'il a toute la légitimité nécessaire pour s'exprimer sur l'Europe. L'ancien président s'attaque au manque de leadership du couple franco-allemand, il prône un espace Schengen 2, s'attaque à l'Europe des 28, mais aussi à la Commission...

Le Point avait justement envie de l'interviewer sur ces sujets et a donc sollicité Nicolas Sarkozy. "L'ancien président a d'emblée rejeté toute idée d'une interview, mais confessé travailler à un texte. Il ignorait alors s'il allait le publier. Quelques jours plus tard, nous apprenons (...) qu'il est désormais favorable à sa publication. Vendredi 16 mai, le principe est définitivement arrêté", indique l'hebdomadaire jeudi sur son site internet.

Une poignée de proches mis dans la confidence

"Seule une poignée d'anciens collaborateurs et quelques politiques, comme François Baroin, ont eu le privilège de la lire avant publication dans Le Point. Mais ceux qui ont été mis dans la confidence avaient ordre de se taire. (...) Il fallait maintenir le doute sur cette publication pour garder l'effet de surprise. Les derniers détails ont été calés la semaine dernière", affirme Europe 1.

"Ce texte très personnel, Nicolas Sarkozy l'a rédigé lui-même avec quelques conseillers, comme l'ancien Monsieur Europe de l'Elysée Fabien Raynaud", précise de son côté Le Parisien (article payant). "Les personnes mises au parfum se comptent sur les doigts d'une main : Michel Gaudin le directeur de cabinet de Sarkozy et Véronique Waché sa conseillère presse", affirme Le Point.

"Au Point, pour maintenir le suspense le plus longtemps possible, nous fabriquons une fausse couverture et le fichier numérique des six pages maquettées du texte porte le nom de 'Interview Gerhard Schröder'", poursuit l'hebdomadaire. Puis Le Point met en place un plan de communication à l'intention des médias, pour diffuser sa une.

L'ex-président a aussi fait relire sa copie à la chancelière allemande, selon Europe 1. "Nicolas Sarkozy a fait envoyer sa tribune directement à Angela Merkel pour qu'elle ne la découvre pas en ligne sur le site allemand de Die Welt", indique la radio.

Une date de publication choisie avec soin

En appelant à la mobilisation pour les élections européennes, à trois jours du scrutin, Nicolas Sarkozy montre qu'il intervient parce que la situation est grave. "En petit comité, l'ancien président est très sévère sur la faiblesse du couple franco-allemand et la discrétion de son successeur dans la campagne", relève Le Parisien.

"Il n'a pas pu s'empêcher d'intervenir", souligne la journaliste Alba Ventura sur RTL. Le choix est tout de même risqué, estime-t-elle. "Il faut que ses propositions soient validées par les urnes. Sa parole risque d'en prendre un sacré coup si Marine Le Pen arrive en tête dimanche", ajoute-t-elle. Mais elle reconnaît que Nicolas Sarkozy sait tourner la situation à son avantage : "Il dira que cette tribune, c'est pour alimenter le débat." "Il n'écrit pas pour dans trois jours, il écrit pour dans trois ans", conclut-elle.

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