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Le premier tour des régionales a été marqué par un taux d'abstention sans précédent pour un tel scrutin de 53,63%

Protestation, sanction, dépolitisation... les termes ne manquent pas pour expliquer la désaffection des urnes.Mais ni le déni des responsables UMP, qui y voient une sanction des présidents PS sortants, ni les acrobaties des dirigeants socialistes concernant les consignes de vote du Languedoc, ne sont susceptibles d'inverser la tendance.
Article rédigé par Catherine Rougerie
France Télévisions
Publié
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Près d'un électeur sur deux a boudé les urnes lors du premier tour des élections régionales. (AFP - Mychele Daniau)

Protestation, sanction, dépolitisation... les termes ne manquent pas pour expliquer la désaffection des urnes.

Mais ni le déni des responsables UMP, qui y voient une sanction des présidents PS sortants, ni les acrobaties des dirigeants socialistes concernant les consignes de vote du Languedoc, ne sont susceptibles d'inverser la tendance.

L'absence de débats politiques de fond est au contraire l'une des raisons qui expliquent l'abstention. Lors de la campagne, les controverses ont davantage porté sur les affaires "Soumaré" et "Frêche" que sur les oppositions ou même les divergences programmatiques entre gauche et droite. Difficile dès lors pour les électeurs de cerner et donc de trancher entre les listes.

Comme le fait remarquer Brice Teinturier de TNS Sofres dans une interview publiée mardi dans Libération, "le scrutin régional ne se prête pas aux grands débats politiques. Il porte sur des thèmes importants comme les transports, mais dont il est difficile d'identifier les différences entre partis".

C'est un fait. Le débat sur la régionalisation, réveillé par les lois de décentralisation de 1982 a fait long feu. Depuis la mise en oeuvre des conseils régionaux, peu de débats ont porté sur leur fonctionnement et leur champ de compétences. Dans ces conditions pas facile de cadrer l'élection, en clair, de cerner ce sur quoi elle porte, et a fortiori d'identifier les lignes de fracture et les différences entre les projets des forces en présence.

Si on ajoute à ce manque de visibilité de la collectivité et des programmes, un déficit d'incarnation... on aboutit à un terreau propice à la démobilisation.

Crise et impuissance des politiques
Parmi les autres raisons de l'abstention, la crise économique. Outre les milliers de Français pour lesquels le bouclage des fins de mois est une angoisse quotidienne et qui ne sont, de fait, plus en phase avec les rendez-vous électoraux, d'autres citoyens ne croient tout simplement plus au pouvoir des politiques.

"La présidentielle de 2007 avait redonné aux Français le goût d'aller voter. Mais il y avait des enjeux clairs : les programmes de Nicolas Sarkozy et de Ségolène Royal étaient bien identifiés. (...) Le réanchantement de la vie politique n'a duré que le temps de l'élection du président de la République. Et quand est arrivée la crise d'octobre 2008, les français ont renoué avec l'idée que les politiques ne sont pas en mesure de répondre à leurs préoccupations, que l'on est en crise depuis vingt-cinq ans et qu'un vote de plus, surtout pour un scrutin sans enjeu, ne changera rien" explique Brice Teinturier.

Cette explication ne suffit cependant pas. "Je ne crois pas du tout à la thèse de la dépolitisation massive, même si elle progresse effectivement", analyse de son côté le philosophe Marcel Gauchet dans Libération. "Les gens restent très politisés et cette abstention concerne en réalité l'offre politique. Dimanche, loin d'aller à la pêche, ils ont envoyé un message : "je ne vais tout de même pas aller voter pour ces cons-là". Une politisation négative".

Sans aller jusque-là, il n'en reste pas moins que le débat sur la réforme des collectivités territoriales, lancée à quelque mois du scrutin régional, n'a fait qu'ajouter incompréhension et confusion au scepticisme ambiant.

La mort annoncée des conseillers régionaux
C'est sans doute la dernière fois que les Français votent pour les conseillers régionaux. Si la réforme actuellement en débat au sénat est adoptée, ils éliront dès 2014 des "conseillers territoriaux", un élu hybride qui siègera à la fois au département et à la région.

Si le sujet mérite discussion, la date choisie pour en débattre et le zèle déployé par la majorité pour justifier de cette réforme au motif que les exécutifs locaux sont inopérants et coûteux peuvent laisser perplexe.

Mais visiblement pas le Premier ministre François Fillon qui a estimé au contraire que la faible participation du 14 mars rendait "plus nécessaire que jamais, la réforme pour la simplification territoriale".

Message au chef de l'Etat

Même si responsables et candidats UMP s'en défendent, l'abstention constitue bien aussi un avertissement sévère adressé à Nicolas Sarkozy.

Outre les critiques qui se font entendre ici et là, sous couvert d'anonymat chez les élus de la majorité, les promesses non suivies des faits, le rythme effréné des réformes, le style direct et les changements de pied déconcertent même certains des plus fidèles supporters du chef de l'Etat.

Deux exemples. Avant Noël, Nicolas Sarkozy avait dit que les élections régionales avaient une valeur nationale. Fin janvier, il annonçait au contraire que cela ne serait pas le cas.

Le chef de l'Etat avait aussi indiqué qu'il ne s'impliquerait pas dans la campagne. Il a pourtant multiplié les déplacements et les discours dans les régions susceptibles de basculer à droite dans les jours précédents le scrutin.

L'annonce d'un non remaniement sera-t-il lui tenu à l'issue du second tour ?

Et s'il n'use pas de cet acte symbolique, comment démontrera-t-il alors qu'il a entendu le message des Français comme il s'y est engagé ?

L'avenir le dira. Mais la réponse est peut-être à chercher dans les propos des élus de la majorité qui ont participé au "débriefing" du premier tour, organisé lundi matin à l'Elysée.

"C'est le pays des Bisounours !". Le président "est coupé des réalités". "Tout va très bien Madame de la Marquise". "Strabisme présidentielle"... Autant d'expression qui pourraient prêter à sourire si près d'un électeur sur deux n'avait pas déserté les isoloirs dimanche dernier.

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