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Venezuela : pour survivre, le président Maduro "dépend de l'armée, qui accapare de plus en plus le pouvoir politique"

Des centaines de milliers de manifestants anti-Maduro ont défilé dans plusieurs villes du Venezuela mercredi. Si la crise s'aggrave, elle aura des répercussions à plus grande échelle, prévient le spécialiste de l'Amérique latine Gabriel Estrada.

Article rédigé par franceinfo
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Des manifestants anti-Maduro défilent, à Caracas, au Venezuela, le 19 avril 2017. (CARLOS BECERRA / AFP)

Les manifestations de partisans et d'opposants au président Nicolas Maduro se multiplient au Venezuela, et ont fait au moins trois morts mercredi 19 avril. Gabriel Estrada, directeur exécutif de l’Observatoire politique de l’Amérique latine et des Caraïbes de Sciences Po (OPALC), a estimé jeudi 20 avril sur franceinfo, que si elle continuait à s'aggraver, la crise dans le pays risquait d'avoir "un impact certain sur la région andine et caraïbe".

franceinfo : Le Venezuela peut-il, à terme, basculer dans une guerre civile ?

Gabriel Estrada : Sur le plan social, oui, certains chercheurs l'estiment. Hier (mercredi, ndlr), dans une tribune publiée dans le quotidien argentin La Nacion, deux spécialistes de l'Amérique latine disent que si le Venezuela veut sortir de cette crise, il faudra non seulement que des élections aient lieu, mais il faudra aussi penser à un mécanisme de réparation semblable à ce qui a eu lieu en Afrique du Sud, lorsque Nelson Mandela et le Congrès national africain ont pris le pouvoir, étant donné l'état de détresse économique et sociale.

Qui est l'opposition à Nicolas Maduro ? La droite ? Ou est-ce trop réducteur ?

Je pense qu'il est trop réducteur de dire cela. Aujourd'hui, le gouvernement chaviste est structurellement impopulaire, ce qui n'était jamais arrivé jusqu'à présent. Le chavisme avait une légitimité électorale. Il avait toujours remporté les élections, jusqu'en décembre 2015. Le problème est que les mécanismes prévus par la Constitution permettent une révocation du président. L'année 2016 a été accaparée par cette discussion : il s'agissait de savoir s'il devait y avoir ou non un référendum révocatoire. Le pouvoir a tout fait pour éviter que ce référendum ait lieu. Aujourd'hui, l'opposition demande des élections anticipées.

Donc le pouvoir chavisme est clairement dans une dérive autoritaire, aujourd'hui ?

Surtout, il dépend de l'armée pour survivre. Il ne faut pas oublier que, mardi, le chef des armées, le ministre de la Défense, a déclaré sa loyauté au président. L'armée accapare de plus en plus le pouvoir politique, mais aussi économique. S'il y a une division, si une fraction de cette armée décide de prendre fait et cause pour l'opposition, il est clair que le gouvernement chaviste verrait ses jours comptés.

Onze pays latino-américains ont demandé, cette semaine, au Venezuela, le respect de la démocratie et du droit à manifester. Ont-ils un rôle à jouer dans cette crise ?

Je le crois. D'autant que cette crise a aussi des conséquences régionales. On l'a déjà vu avec la Colombie. Caracas a décidé de fermer la frontière avec ce pays voisin. Si la crise continue à s'aggraver au Venezuela, elle aura un impact certain sur la région andine et caraïbe.

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