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"Sex machine", papillon et armes à feu... Le centre-ville de Cleveland chamboulé par la convention républicaine

A défaut de pouvoir approcher la salle où se déroule la convention républicaine, inaccessible sans invitation, de nombreux manifestants ont investi la place du centre-ville de Cleveland. Francetv info a passé l'après-midi au milieu de cette foule hétéroclite.

Article rédigé par Mathieu Dehlinger - Envoyé spécial à Cleveland (Etats-Unis),
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Marni Halasa manifeste en marge de la convention républicaine, à Cleveland (Etats-Unis), le 20 juillet 2016. (MATHIEU DEHLINGER / FRANCETV INFO)

Avec son flamboyant veston décoré d'un patchwork de drapeaux américains, son imposant chapeau d'oncle Sam et son improbable poupée gonflable, Terry passe difficilement inaperçu au milieu de la foule de Public Square, à Cleveland (Etats-Unis). Ce quinquagénaire anti-Trump est venu avec un message pour le moins direct à l'attention du milliardaire : "Petites mains, esprit étroit = gros trou du c**." "C'est un raciste, un bigot, un misogyne", explique-t-il.

Avec mon costume de dingue, j'essaye d'avoir l'air aussi ridicule que la situation politique actuelle, mais ce n'est pas facile.

Terry, manifestant anti-Trump

à francetv info

Comme lui, de nombreux manifestants ont bravé le soleil de plomb et la chaleur étouffante pour se rassembler sur la principale place du centre-ville de Cleveland (Etats-Unis), transformée en lieu de défense de toutes les causes, y compris les plus folles, durant la convention républicaine.

A quelques centaines de mètres de la salle où Donald Trump a été investi, les passants peuvent admirer une fresque à la gloire du milliardaire, voir des manifestants ostensiblement et lourdement armés ou encore entendre un suprémaciste blanc défendre l'idée d'un "Etat ethnique". Il y est également possible d'écouter des amoureux du capitalisme dénoncer la taxation - "du vol" - et le socialisme - "ça craint" -, recevoir un guide pour "aller au paradis depuis la convention", mais aussi croiser Vermin Supreme, un anarchiste loufoque et ancien candidat aux primaires libertariennes, sorte d'étrange Gandalf, en veston de cuir et cravate, muni d'une énorme brosse à dents à la main et d'une botte sur la tête. Quoi de plus normal ?

Vermin Supreme, ancien candidat aux primaires libertariennes déambule en marge de la convention républicaine, à Cleveland (Etats-Unis), le 20 juillet 2016. (MATHIEU DEHLINGER / FRANCETV INFO)

Le face-à-face entre pro et anti-Trump

Dans cette foule disparate, les anti-Trump tentent de donner de la voix. Certains jouent la carte de la simplicité, comme Sondos Mishal, une lycéenne voilée de 17 ans. Elle est simplement venue sur la place pour "montrer aux gens qui sont les musulmans". "Donald Trump joue sur la peur, estime la jeune fille. On nous fait passer pour des terroristes, alors qu'on est juste des Américains normaux."

Pour d'autres, "la révolution est sexy". "C'est le nom de mon organisation à New York, j'aide des activistes à trouver des idées pour mener leurs mouvements", explique Marni Halasa. Pour éviter de passer inaperçue, cette femme de 50 ans est venue déguisée… en papillon, avec ce message pour les électeurs : "Laissez la démocratie s'envoler, laissez tomber Trump ! (...) J'ai ressenti le besoin de venir ici pour protester contre cet homme sexiste, raciste, xénophobe… Il va créer le chaos !"

L'endroit est aussi le rendez-vous des anti-Clinton. Comme Kenny Welch, beaucoup portent le même tee-shirt, édité par un site à tendance complotiste, qui appelle à mettre l'ancienne secrétaire d'Etat en prison. "Elle est corrompue, juge cet homme de 53 ans. Regardez l'affaire de ses e-mails, le FBI a trouvé plein de choses et elle n'a pas été poursuivie. Si vous ou moi avions fait la même chose, nous aurions perdu notre job et nous aurions été incarcérés."

Une place bouillonnante

Les deux faces de la politique américaine se croisent, souvent sans anicroche. Mais les tensions ne sont jamais loin. A la tribune, installée par la municipalité, une femme disserte sur les maladies mentales quand elle est violemment interrompue. "Les femmes en cuisine ! Les femmes en cuisine !, hurle un homme. On devrait interdire aux femmes de servir dans l'armée." La réponse de l'oratrice ne se fait pas attendre : "Ferme ta put*** de gueule ! Est-ce que tu sais comment tuer des gens à mains nues ? Parce que moi, oui !"

La police, présente en nombre, surveille depuis chaque recoin de la place pour éviter tout débordement. Mais elle finit par s'interposer quand s'avance l'Eglise baptiste de Westboro, organisation notoirement homophobe. "Arrêtez d'être un pécheur et obéissez à Jésus", ordonne-t-elle sur ses pancartes. Ce mercredi, la réponse était pacifique. En face, un homme a tenté d'étouffer le bruit des slogans en jouant de sa "sex machine". Rien d'indécent : derrière ce nom se cache un cor aux couleurs de l'arc-en-ciel, tout simplement.

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