"Dreamers" menacés d'expulsion aux États-Unis : "Je veux grandir dans ce pays, c’est devenu ma maison"
Un an après l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis le 8 novembre 2016, franceinfo s’est rendu à Miami, en Floride, pour rencontrer des "dreamers", ces jeunes sans-papiers menacés d’expulsion par la fin du programme Daca qui leur permet d’étudier et travailler sur le sol américain.
"Erratique, instable… Cet homme est fou, s’exclame Johnny, 66 ans, arrivé de Cuba en 1955. Il faut aider les dreamers ! Il ne peut pas les séparer de leurs familles…" Début septembre, nouveau coup de massue pour les immigrés : l’administration Trump annonce la fin du programme Daca (Deferred Action for Childhood Arrivals) pour mars 2018. Un programme emblématique mis en place en 2012 par Barack Obama, qui met aujourd’hui à l’abri d’une expulsion près de 800 000 jeunes sans papiers arrivés illégalement sur le sol américain avec leurs parents quand ils étaient enfants.
À Little Havana, Trump suscite la défiance
Ce programme leur permet d’étudier, de travailler et d’avoir un permis de conduire aux États-Unis. Et, au passage, de payer des impôts. La perte pour le PIB américain se chiffrerait à plus de 460 milliards de dollars, selon les économistes. Aux États-Unis, ces jeunes ont un surnom : on les appelle les "dreamers", les rêveurs. Au petit matin, sur la 8e rue de Little Havana, un quartier latino de Miami, la musique s’échappe déjà des commerces. L’endroit n’est pas un terrain favorable pour Donald Trump : s’il a bien remporté la Floride devant Hillary Clinton à l’élection présidentielle, la candidate démocrate lui a arraché le comté avec plus 63% des voix.
Sur le bord de la route, Marguerita vend des fleurs dans une petite cabane. Marguerita, 64 ans, vient du Nicaragua. Elle vit aux États-Unis depuis 31 ans et a un statut de résidente. Et a un message pour Donald Trump : "Qu’il change ! Qu’il pense à nous tous ici, qui sommes des êtres humains, comme lui. Qu’il aide le peuple et tous ceux qui veulent étudier, pour rendre sa grandeur à l’Amérique…"
Dans le centre-ville de Miami, nous rencontrons Melissa Taveras, chargée de la communication de la Florida Immigrant Coalition, une association qui vient en aide aux immigrés. "Depuis que le président a fait campagne, explique-t-elle. Nous savons qu’il est anti-immigrés. Il a une approche raciste des questions d’immigration et continue de se comporter comme un candidat qui s’adresse à une base de partisans très resserrée, qui ne représente pas la majorité." Selon l’association, 87% des Américains soutiennent l’idée d’une solution permanente pour les dreamers : 95% d’entre eux, selon la Florida Immigrant Coalition, travaillent ou sont scolarisés.
Ils contribuent énormément à notre pays. Dans le groupe de dreamers avec lequel on travaille, nous avons des chercheurs, des professeurs, des avocats, nous avons les futurs leaders politiques !
Melissa TaverasFlorida Immigrant Coalition
La chargée de communication estime ainsi à 1,6 milliard de dollars le coût du départ des dreamers de l’État de Floride. Laurena Malavet, 21 ans, a bénéficié du programme Daca et étudie les relations publiques à l’Université internationale de Floride. Elle sera diplômée dans quatre mois après quatre ans d’étude. "Je suis arrivée ici à 7 ans, indique-t-elle. Grâce au programme Daca, je peux avoir un permis de conduire. C’est très important, pour moi c’est comme une carte d’identité. Cela a changé ma vie !" Aussi, quand Donald Trump a annoncé la fin du programme, elle a eu l’impression de revenir à la case départ. "C’est comme si, soupire-t-elle, je n’avais aucun papier pour vivre dans le pays. Sans savoir où je serai demain. C’est à cette menace que nous sommes confrontés."
Laurena a tenu à répondre aux questions de franceinfo en anglais. Parce qu’elle a grandi aux États-Unis, que la langue qu’elle a parlé la majeure partie de sa vie. "C’est ma langue principale, explique l’étudiante. Je parle espagnol à la maison mais je m’exprime mieux en anglais." "J’ai grandi en me disant que j’étais américaine, continue Laurena. Je veux continuer à grandir dans ce pays qui est devenu ma maison, et la seule que je connaisse." "Si je suis expulsée, conclut-elle, je vais être envoyée dans un pays, que je ne connais pas. Ce ne sera pas chez moi : nous sommes américains !"
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