Le FBI reconnaît des "erreurs scientifiques" dans près de 300 affaires judiciaires
Le département de la Justice américain et la police fédérale ont reconnu que leurs experts scientifiques avaient remis des rapports erronés depuis des décennies.
Le département de la Justice américain et le FBI ont reconnu des erreurs scientifiques dans près de 300 affaires judiciaires, dans un communiqué publié dimanche 19 avril. La police fédérale confirme ainsi les conclusions de l'Association nationale des avocats de la défense criminelle (NACDL) et de l'organisation judiciaire Innocence Project, chargée d'innocenter des personnes condamnées à tort. Ces deux organisations ont mis en cause les méthodes des scientifiques formés par le FBI. Elles mènent actuellement une longue enquête, lancée en 2012 avec le soutien du FBI (en anglais), sur plus de 2 000 affaires jugées entre les années 1970 et 1999.
Mais quelles sont exactement les fautes reprochées au FBI ?
Des erreurs d'analyses au microscope
Dans son communiqué, le département de la Justice admet l'existence d'"erreurs de scientifiques du FBI dans l'analyse de cheveux au microscope ou de rapports de laboratoires". Dans de nombreuses affaires criminelles, les experts fédéraux ont en effet identifié les suspects en comparant leurs cheveux avec ceux retrouvés sur la scène du crime, rapporte le Washington Post (en anglais). Une méthode imprécise, vivement critiquée dans le rapport d'Innocence Project, qui doit être rendu public lundi 20 avril.
"Le recours à l'analyse de cheveux au microscope par le FBI pour incriminer des accusés, durant une trentaine d'années, est un désastre total", a ainsi estimé Peter Neufeld, co-fondateur d'Innocence Project. La police fédérale "emploie désormais les analyses ADN mitochondrial (transmis par la mère) des cheveux en plus des analyses au microscope", afin d'éviter toute erreur, a-t-elle toutefois précisé dans son communiqué.
Des témoignages erronés de la part des experts scientifiques
Non seulement les preuves apportées par le FBI étaient parfois fausses, mais des experts de la police fédérale ont livré des témoignages erronés lorsqu'ils étaient appelés à la barre. Selon le rapport d'Innocence Project, 26 sur 28 scientifiques fédéraux ont "exagéré" leurs résultats de façon à avantager les procureurs, entre les années 1970 et 1999. Sur les 268 affaires étudiées jusqu'ici, 257 reposent en partie sur des témoignages imprécis ou faux, soit 95% des procès affectés, souligne le Washington Post.
Alors que l'exactitude des analyses judiciaires n'a jamais été formellement prouvée, comme le rappelle le quotidien américain dans un dossier (en anglais), les enquêteurs ont souvent présenté leurs conclusions comme sûres à 100 %. Ils auraient appuyé leurs conclusions sur des statistiques incomplètes ou erronées, tirées de leurs analyses.
"Il est capital que le FBI identifie et s'occupe des éléments qui ont permis à ce problème d'envergure de se produire et de se poursuivre pendant plus d'une décennie", ont écrit des membres du Congrès dans une lettre au directeur du Bureau, le 27 mars dernier. D'autant que les experts dont le travail est actuellement remis en question ont formé entre 500 et 1 000 scientifiques locaux, selon le Washington Post.
Des condamnations à mort qui pourraient être remises en cause
Les erreurs du FBI sont d'autant plus problématiques que, dans 32 cas, le verdict du procès était la condamnation à mort. Selon le Washington Post, 14 de ces prisonniers ont déjà été exécutés ou sont décédés en prison. Ces verdicts ne reposaient toutefois pas uniquement sur les preuves du FBI.
Les avocats de la défense et les procureurs de 46 Etats doivent néanmoins être notifiés, pour déterminer si les erreurs de la police fédérale sont suffisantes pour permettre aux détenus de faire appel. En juillet 2013, 27 condamnations à mort avaient déjà été réexaminées par le FBI, après un premier bilan d'Innocence Project et de la NACDL, rappelle le Daily Mail (en anglais).
Le département de la Justice a promis de faire en sorte que "les accusés concernés soient mis au courant des erreurs passées et que justice soit faite dans chacun des cas", dans son communiqué. Il a en outre affirmé qu'il s'assurerait "de l'exactitude des futures analyses de cheveux, ainsi que de l'application de la plus grande rigueur dans les analyses criminelles".
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