Incendies en Californie : pourquoi feux de forêt et réchauffement climatique forment un cercle vicieux
Des incendies d'une ampleur sans précédent dévastent la côte ouest des Etats-Unis.
Une brume orange plane au-dessus de la tête des habitants de San Francisco. Cette couleur apocalyptique est due aux incendies d'une ampleur inédite qui dévastent l'ouest des Etats-Unis, de l'Etat de Washington au nord, frontalier du Canada, jusqu'à San Diego, à la frontière mexicaine. Quelles sont les conséquences des incendies sur le réchauffement climatique ? Et du réchauffement climatique sur les incendies ? Quelles interactions entre les deux phénomènes ? Eléments de réponse.
Parce que ces incendies libèrent d'importantes quantités de CO2 dans l'atmosphère
Première lien évident : les gigantesques feux qui dévastent la planète contribuent au réchauffement climatique en libérant des tonnes de dioxyde de carbone dans l'atmosphère. "Pour pousser, une forêt absorbe du dioxyde de carbone et le stocke. Lorsque l'incendie détruit cette forêt, tout le CO2 stocké par les arbres est rejeté dans l'atmosphère", explique à franceinfo la climatologue Françoise Vimeux, directrice de recherche à l'Institut de recherche pour le développement. Or, ces rejets ont pesé lourd l'an dernier dans les émissions de carbone.
En 2019, l'ensemble des incendies ont ainsi rejeté un peu plus de 6 gigatonnes de CO2. Un chiffre à comparer à un peu plus de 40 gigatonnes de CO2 émis par les activités humaines sur cette même année.
Françoise Vimeuxà franceinfo
"Autrement dit, les émissions de CO2 par les incendies en 2019 ont été équivalentes à 15% des émissions de CO2 globale", conclut-elle.
Parce que le réchauffement climatique favorise la multiplication des feux de forêt
Parallèlement, le réchauffement climatique favorise les méga-feux "parce qu'il provoque des températures plus élevées sur des périodes plus longues", analyse la climatologue.
Cette chaleur assèche les sols et la végétation. Du coup, les arbres secs s'embrasent plus vite et les départs d'incendie se multiplient. En Australie, c'est ce déficit pluviométrique qui a favorisé les feux l'an dernier.
Françoise Vimeuxà franceinfo
"2019 n'aura pas seulement été la deuxième année la plus chaude enregistrée, elle aura également été l'année des méga-incendies, surenchérit France Culture. En Amazonie d'abord, où près d'un million d'hectares sont partis en fumée ainsi qu'en Sibérie, dans le bassin du Congo et pour conclure l'année, en Australie, où ce sont 10 millions d'hectares qui ont brûlé, entraînant la mort d'un milliard d'animaux, d'une trentaine de personnes ainsi que des dégâts considérables." Et le phénomène devrait s'accentuer : "Avec le changement climatique en cours provoquant des canicules et des sécheresses intensifiées, ces méga-feux vont devenir devenir de plus en plus fréquents", assure la radio publique.
Parce que les forêts qui ont brûlé peinent à se reconstituer
Autre corrélation néfaste : les arbres consumés auraient davantage de mal à se régénérer. "Même si ce n'est pas systématique, le réchauffement climatique amène des facteurs qui sont défavorables au renouvellement des forêts", expose à franceinfo Rémi Savazzi, directeur adjoint à la Défense des forêts contre l'incendie (qui fait partie de l'Office national des forêts).
Les épisodes climatiques extrêmes qui surviennent de plus en plus souvent, avec des épisodes de sécheresse accompagnés de feux plus intenses, ont un impact négatif sur les semenciers et les graines.
Rémi Savazzià franceinfo
Les forêts qui bordent la Méditerranée, pourtant, sont armées pour se régénérer. "Après un incendie, détaille le spécialiste de l'ONF, la nature reprend ses droits. Certains arbres vont bien se reconstituer. Le chêne liège, par exemple. Même s'il a brûlé, il peut rejeter de nouvelles pousses." Mais cette capacité de reconstruction a ses limites : "Si le feu est trop intense, ça peut tuer les feuillus qui, du coup, ne vont pas repousser à partir de leur souche. Et ça peut même affecter les semenciers et les banques de graines qui sont dans le sol."
La fréquence des incendies s'avère particulièrement problématique lorsque les feux se répètent trop rapidement au même endroit, alors que les "arbres ne sont pas assez matures pour assurer la régénération", déplore encore Rémi Savazzi. Avant, en Méditerranée, on avait un retour d'incendie dans un même lieu qui pouvait être espacé de trente à quarante ans. La forêt et la matière organique du sol avaient eu le temps de se reconstituer."
Maintenant, on voit des incendies revenir tous les dix à vingt ans. Du coup, la végétation a beaucoup de mal à se refaire.
Rémi Savazzià franceinfo
"Le changement climatique rend plus vulnérable les écosystèmes, épilogue Françoise Vimeux. Il va par exemple accentuer le stress hydrique, auquel les arbres matures résistent mieux que les arbres jeunes, qui ont davantage besoin d'eau."
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.