Cet article date de plus de huit ans.

Argentine: Obama et l'anniversaire de la «sale guerre» soutenue par Washington

La «guerre sale»: c’est le nom donné en Argentine à la répression menée par la dictature des années 70. En Argentine, la répression, symbolisée par le coup d’Etat de mars 1976, aurait fait quelque 30.000 victimes. Le président Obama rend hommage aux victimes d’une dictature que les USA de l’époque avaient soutenue, sans toutefois excuser l'action de son pays.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le général Ramon Agosti, l'Amiral Emilio Massera autour de Jorge Rafael Videla, chef de la dictature en Argentine au lendemain du coup d'Etat du 28 mars 1976. (AFP)

Barack Obama a qualifié de «période sombre» ces années lors desquelles 30.000 personnes ont été tuées par les forces de sécurité de la dictature argentine mais le président américain, présent à Buenos Aires, s'est abstenu de présenter des excuses officielles pour le soutien apporté par Washington à la dictature qui a occupé le pouvoir de 1976 à 1983. 

Les Etats Unis ont cependant annoncé que de nouveaux documents militaires et du renseignement, liés à la «guerre sale» en Argentine, vont être «déclassifiés». «Le président Obama, à la requête du gouvernement argentin, va annoncer un effort complet pour déclassifier des documents supplémentaires dont, pour la première fois, des documents militaires et du renseignement», a indiqué la Maison Blanche.


En 2002, Washington avait déjà déclassifié 4.000 documents diplomatiques qui mettaient en évidence que plusieurs responsables américains, dont le chef de la diplomatie de l'époque Henry Kissinger, avaient encouragé la répression du régime.

Cette nouvelle salve de déclassification pourrait apporter un éclairage sur l'ampleur de l'implication américaine dans le coup d'Etat et les purges qui ont suivi au milieu des années 1970. Elle pourrait également renseigner sur le rôle de Washington dans l'«opération Condor», nom donné à la campagne d'assassinats et de lutte anti-guérilla dans plusieurs pays d'Amérique latine visant, notamment, communistes et dissidents politiques. 

En Argentine, le souvenir de la dictature est toujours vif. Et la date choisie par Obama pour sa visite, jour anniversaire du coup d’Etat, suscite de vives critiques. Et il n'est pas sur que le tango dansé par le président américain calme les opposants à cette visite. L’artiste Adolfo Perez Esquivel, distingué (comme le président américain) par le prix Nobel de la paix, en 1980 pour sa défense des droits de l’Homme sous la dictature argentine, a ainsi publié une lettre ouverte appelant Obama à «ne pas venir le 24 mars».

Une association de défense des familles de victimes a, elle, déclaré: «Nous n'autoriserons pas que la puissance qui a orchestré l'avènement de dictatures en Amérique latine et l'oppression des peuples à travers le monde puisse se racheter en utilisant la mémoire de nos 30.000 compatriotes assassinés au nom de son projet impérialiste».

Manifestation anti-Kissinger à Washington en 2015. Les manifestants portent une banderole sur laquelle on peut lire «Kissinger criminel de guerre»


Kissinger: «le plus vite vous réussirez, mieux ce sera» 
Les documents déjà ouverts ont montré que Washington avait donné son feu vert au coup d’Etat.  La responsabilité d’Henry Kissinger, le secrétaire d’Etat américain, est particulièrement montrée du doigt. Il aurait affirmé à la dictature argentine: «le plus vite vous réussirez, mieux ce sera », craignant les réactions du Congrès américain face aux violations massives des droits de l’Homme. Selon un article du Guardian, citant diverses sources, «le régime n’aurait pas continué à commettre des atrocités à moins d'avoir l'approbation tacite des États-Unis, dont il dépendait tant sur le plan financier que militaire».

La junte qui a gouverné l’Argentine de 1976 à 1983 est finalement tombée après la défaite militaire subie face aux Anglais, principal allié des Américains, dans la guerre des Malouines.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.