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Ce que l'on sait de l'arrestation d'une délégation du PCF venue observer le déroulement des élections en Turquie

Une sénatrice et deux militants communistes ont été arrêtés dimanche à Agri, dans l'est de la Turquie, alors qu'ils étaient venus comme observateurs des élections à l'invitation d'un parti pro-kurde.

Article rédigé par franceinfo
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Une urne et des bulletins de vote, le 24 juin 2018, à Ankara (Turquie), lors de l'élection présidentielle turque. (ADEM ALTAN / AFP)

Une arrestation aux allures d'incident diplomatique. Une délégation du PCF a été arrêtée, dimanche 24 juin, à Agri, une ville de l'est de la Turquie, où elle était venue mener une mission d'observation, à l'invitation d'un parti pro-kurde, en ce jour d'élections générales en Turquie. Voici ce que l'on sait de cette arrestation.

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Qui sont les membres de cette délégation ? 

Cette délégation du PCF était composée de la sénatrice des Côtes-d'Armor Christine Prunaud, membre de la commission des Affaires étrangères du Sénat, de Hulliya Turan, secrétaire départementale communiste du Bas-Rhin, et de Pascal Torre, membre du secteur des relations internationales du PCF.

Qu'étaient-ils venus faire en Turquie ? 

Les émissaires du PCF étaient sur place pour "une mission d'observation de nature citoyenne" car "il y a eu des doutes lors des précédentes élections sur la sincérité du scrutin", explique à franceinfo Pierre Laurent, le secrétaire national du PCF. Leur mission n'avait donc rien à voir avec celles que peuvent mener les observateurs internationaux dépêchés par les organisations internationales comme l'OSCE.

Le PCF a répondu à un appel du HDP, le Parti démocratique des peuples, principal parti pro-kurde, crédité de 10 à 15% des voix et dont le candidat, Selahattin Demirtas, est emprisonné. Le HDP souhaitait que des observateurs indépendants viennent constater d'éventuelles fraudes pendant le scrutin présidentiel. "On n'a pas du tout caché la raison pour laquelle ils se rendaient sur place", assure le secrétaire national du PCF. 

Plus de 56 millions d'électeurs étaient appelés dimanche à voter pour leur président et leurs députés. Le principal parti d'opposition turc a dénoncé des tentatives de fraude et énuméré plusieurs exemples de tentatives de bourrage d'urnes en faveur de l'alliance dominée par l"AKP, le parti islamo-conservateur au pouvoir.

Quelles sont les circonstances de cette arrestation ? 

"Nous avons été arrêtés à 10h30 et retenus à la gendarmerie jusque 17 heures, à la fin des opérations de vote", raconte à l'AFP l'une des membres de la délégation, Hulliya Turan. "Ils nous ont dit que c'était juste pour une vérification de nos papiers mais on se doutait que c'était notre présence pendant les élections qui les dérangeait. Ils ne nous l'ont pas dit explicitement, jamais", complète la sénatrice Christine Prunaud, auprès de franceinfo. 

"Ils nous ont demandé ce que l'on venait faire ici, qui on était, qui on voyait, pourquoi est-ce qu'on observait les élections alors qu'ici en Turquie tout se passe bien", ajoute-t-elle avant de préciser : "On était toujours tous les trois ensemble dans une salle et ils nous ont laissés nos téléphones. On se disait 'ils nous laissent nos téléphones, qu'est-ce qu'ils veulent vraiment de nous ?' Je pense qu'en fait c'était pour nous mettre la pression."

Les membres de la délégation communiste "sont à leur hôtel actuellement" , précise Pierre Laurent. "Ils ne savent pas s'ils vont à nouveau pouvoir se déplacer ou s'ils vont devoir immédiatement quitter le territoire." 

"J'ai appelé le consulat de France à Ankara, il nous a quand même dit de rester à l'hôtel parce qu'il pouvait y avoir une autre arrestation possible", précise Christine Prunaud à franceinfo. La sénatrice bretonne explique au Télégramme ne pas savoir quand elle pourra prendre l'avion pour rentrer en France. "Mais je vais bien et je suis bien traitée", affirme-t-elle.

Comment se justifient les autorités turques ? 

Les trois Français sont présentés par l'agence officielle turque Anadolu comme des étrangers accusés d'avoir tenté de se faire passer pour des observateurs internationaux. Anadolu a précisé que des procédures judiciaires avaient été engagées à leur encontre. En plus des trois Français, trois Allemands et trois Italiens figuraient, selon l'agence, parmi les personnes interpellées.

Quelle est la réaction du PCF ?

"Cette attitude des autorités turques montre leur grande fébrilité, accuse Pierre Laurent. Ils ont été toute la journée empêchés de mener cette mission. C'était visiblement l'objectif en les retenant de les empêcher d'être présents et d'observer ce qu'il se passait dans les bureaux de vote de la ville."

Le PCF condamne dans un communiqué "ces méthodes, qui ne font que le renforcer résolument à rester aux côtés des démocrates de Turquie qui entendent mettre un terme à la dictature" de Recep Tayyip Erdogan. Le Parti communiste dénonce une volonté du pouvoir turc "d'étouffer toutes les voix qui dénoncent les fraudes massives à l'œuvre".

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