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Avec Palmyre, la liste des charniers de Daech s'allonge

Un nouveau charnier, abritant plus d'une quarantaine de corps, a été découvert dans la ville antique de Palmyre libérée le 24 mars 2016 par l'armée syrienne. Comme à Tikrit, Ramadi ou à Sinjar, les revers infligés à Daech dans son expansion territoriale par la multitude de ses adversaires donnent, à chaque fois, la mesure des massacres perpétrés par les terroristes.
Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 10min
Exhumation des restes de corps d'un charnier à Ramadi (Irak), le 26 janvier 2016, au lendemain de la découverte de la fosse commune. Les victimes ont été exécutées par Daech. (MOADH AL-DULAIMI / AFP AFP / AFP)

Daech multiplie les exactions dans les régions sous son contrôle en Irak comme en Syrie voisine, où le groupe djihadiste est impliqué dans la guerre depuis 2013. La découverte de charniers est devenue systématique après la libération des villes occupées par les terroristes. 

A Palmyre, en Syrie, libérée le 24 mars 2016
L'armée syrienne a découvert 45 corps dans une fosse commune à Palmyre, ville du centre du pays reprise récemment aux terroristes islamistes de Daech, selon des sources militaires qui ont annoncé l'information le 2 avril 2016. Il s'agirait de civils et de militaires faits prisonniers par l'organisation.

Aucun autre charnier n'aurait été localisé, précise-t-ton. Selon l'agence de presse Sana, la fosse, qui se trouve dans le nord-est de la ville, renfermait surtout des corps de femmes et d'enfants, dont certains ont été décapités.  

En 2015, lorsque la ville est tombée aux mains des djihadistes, la presse syrienne a fait état de 400 exécutions et l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), proche de l'opposition, a lui aussi parlé d'un massacre. L'armée syrienne, appuyée au sol par le Hezbollah libanais et les forces spéciales russes et soutenue par l'aviation russe, est entré dans la ville antique de Palmyre, à 205 km à l'est de Damas, le 24 mars 2016.

La cité avait été prise par Daech le 21 mai 2015. Le 27 mars, l'armée syrienne a totalement reconquis la ville de Palmyre après plusieurs de combats. Les djihadistes se replient désormais vers leurs fiefs de Raqqa et Deir Ezzor, plus au nord. 

Malgré les horreurs de la guerre en Syrie qui a fait plus de 270.000 morts depuis mars 2011, les annonces de découvertes de charniers sont rares dans ce pays.


A Ramadi, en Irak, le 8 décembre 2015
Le 26 janvier 2016, la police a annoncé que les forces irakiennes ont découvert à Ramadi, dans l'ouest de l'Irak, un charnier contenant au moins 18 corps de personnes exécutées par Daech. Mais elle s'attend à exhumer environ le double. Quelques jours plus tôt, le 8 décembre 2015, les forces irakiennes, avec le soutien de la coalition, avais repris un quartier-clé de la ville sunnite avant de rentrer, quinze jours plus tard, dans le centre-ville.

A la fin du mois, les derniers combattants du groupe terroriste quittaient un complexe gouvernemental stratégique de Ramadi. L'organisation ultraradicale, qui s'est emparée en 2014 de plusieurs régions d'Irak, perdait ainsi fin décembre le contrôle de la localité, chef-lieu de la grande province occidentale d'Al-Anbar, frontalière de la Syrie. 

La ville sunnite, située à 100 km à l'ouest de Bagdad, avait été conquise le 17 mai 2015 par Daech après une vaste offensive et une retraite chaotique des forces irakiennes.
 

Les combattants kurdes (Peshmergas) dans les ruines de Sinjar, en Irak, le 14 novembre 2015, au lendemain de la reconquête de la ville. 

 (Andrea DiCenzo / NurPhoto)

 


A Sinjar, en Irak, libérée le 13 novembre 2015
Les forces kurdes irakiennes appuyées par des frappes aériennes de la coalition reprennent aux djihadistes Sinjar, dans le nord de l'Irak, le 13 novembre 2015, coupant une route stratégique de communication utilisée par les terroristes entre l'Irak et la Syrie voisine. 

L'EI s'était emparée de Sinjar en août 2014, menant une série de massacres, d'enlèvements et de viols contre la minorité yazidie, qui constituait la majorité de sa population et considérée comme hérétique par les djihadistes. L'ONU avait décrit cette attaque comme une «tentative de génocide».Les découvertes macabres se multiplieront après la libération de la ville. Notamment le 2 février et le 7 février 2015, où la mise au jour de charniers dans le nord de l'Irak sont rendus publics.

Ainsi, les restes des corps de 23 hommes yazidis, tués par des djihadistes de Daech, avaient été jetés dans une fosse commune découverte le vendredi 6 février 2015 près du village de Bardiyane, sur la base d'une information donnée par un habitant du secteur, selon un porte-parole du ministère des Martyrs de la région autonome du Kurdistan irakien. Il avait alors précisé que les victimes avaient toutes été tuées par balles et que certaines avaient les mains attachées. 

Le dimanche précédent (1er février 2015), des combattants kurdes avaient également découvert les restes des corps de 25 Yazidis (hommes, enfants et femmes) dans un charnier situé plus au sud, dans le secteur du Mont Sinjar, un fief de cette communauté. 

«Trois charniers ont été localisés - deux dans le secteur de Hardan et un troisième à Snouni (qui contient les 25 personnes issues de la minorité yazidie)», expliquera quelques jours plus tard Myasser Haji Saleh, un responsable local de la région de Sinjar. «Les principales fosses communes se trouvent dans le centre de Sinjar et dans des secteurs toujours sous contrôle de l'EI (groupe Etat islamique)», ajoute-t-il. 

La découverte d'un autre charnier entouré de mines, où se trouveraient les restes de plus de 120 personnes assassinées par Daech dans le nord de l'Irak, près de Sinjar est annoncée le 28 novembre 2015. Il s'agit alors du sixième découvert à proximité de la localité depuis que le groupe djihadiste en a été chassé mi-novembre 2015. Un autre charnier, localisé dans la zone et abritant les corps de dizaines de femmes exécutées par Daech, est également répertorié.



Les véhicules des forces irakiennes le 1er avril 2015, au lendemain de la reconquête de Tikrit, jusqu'ici aux mains des terroristes de Daech. (AHMAD AL-RUBAYE / AFP)


A Tikrit, en Irak, libérée le 31 mars 2015 
Les restes de 470 corps ont été exhumés des fosses communes découvertes autour de la ville irakienne de Tikrit, où EI a été accusé d'avoir massacré de nombreuses recrues en 2014, annonçait jeudi 28 mai 2015 la ministre de la Santé. «Nous avons exhumé les corps de 470 martyrs de Speicher», précisera Adila Hammoud au cours d'une conférence de presse à Bagdad. 

Jusqu'à 1.700 combattants, principalement des membres de milices chiites, auraient trouvé la mort dans le «massacre de Speicher», cette base militaire située à la limite nord de Tikrit d'où avaient été enlevées, puis exécuté des recrues essentiellement chiites aux premiers jours de l'offensive des djihadistes sunnites de l'EI sur le nord de l'Irak en juin 2014.

Les autorités irakiennes ont commencé à fouiller les alentours à la recherche de charniers après la reconquête de la ville le 31 mars 2015. C'est à cette date que les forces gouvernementales irakiennes annoncent la reprise de Tikrit, bastion de l'ancien président Saddam Hussein, à 160 km au nord de Bagdad.

La bataille de Tikrit, facilitée par le fait qu'une grande partie de ses 200.000 habitants avaient quitté la ville, a mobilisé des milliers de soldats, policiers et miliciens. Téhéran et Washington se sont également impliqués dans la reconquête de ce chef-lieu majoritairement sunnite de la province de Salaheddine, au Nord, pris par l'EI le 11 juin 2015.


Dans la province de Daïr az Zour, en Syrie
Plus de 230 victimes présumées du groupe Etat islamique ont été découvertes dans un charnier dans l'est de la Syrie, dans la province de Daïr az Zour, rapportait mercredi 17 décembre 2015 l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Il s'agirait de membres de la tribu d'Al Cheitaat, qui combattait les djihadistes.

Leur mort porterait à plus de 900 le nombre de membres de la tribu d'Al Cheitaat (environ 70. 000 au total) tués par les djihadistes, précisait alors l'OSDH. Ce chiffre s'ajoute aux 700 personnes exécutées en août 2015, en grande majorité des civils. Les djihadistes de Daech contrôlent presque l'intégralité de la province de Daïr az Zour, frontalière d'une région d'Irak également sous le joug des islamistes extrémistes.

Après la reconquête de Palmyre, le régime syrien estime que la province doit être l'une de ses prochaines étapes. 

Un enfant à vélo dans les rues de Daïr az Zour, dans l'est de la Syrie. Il passe devant un mur où est écrit en arabe «L'Etat islamique en Irak et au Levant» le 16 février 2014. 
 (REUTERS/Khalil Ashawi)


Dans la province d'Anbar, en Irak
Deux charniers sont découverts le jeudi 30 octobre 2014, contenant les corps d'une partie des 300 membres de la tribu sunnite Albou Nimr que les terroristes avait enlevé quelques jours plus tôt. Daech avait exécuté au moins 220 Irakiens en représailles à l'action d'une tribu qui s'était opposée à la prise par les djihadistes de territoires à l'ouest de Bagdad. Les otages, des hommes âgés de 18 à 55 ans, ont été abattus à bout portant, rapportent des témoins. 

Un charnier, abritant 70 corps, a été ainsi mis au jour près de la ville de Hit dans la province d'Anbar, important bastion sunnite, selon des témoins. Presque toutes les victimes étaient membres de la police ou de la milice Sahoua (Réveil) qui lutte contre l'organisation terroriste, créée avec le soutien du gouvernement américain pour lutter contre Al Qaïda en 2006-2007. 

Un autre charnier contenant les corps de 150 hommes de la tribu Albou Nimr est également découvert près de la ville de Ramadi, également dans la province d'Anbar. 

Après la macabre découverte, le grand ayatollah Ali Sistani, le plus haut dignitaire chiite d'Irak, avait appelé le gouvernement irakien à aider les tribus sunnites qui luttent contre Daech. Certains sunnites, qui se sentent marginalisés depuis la chute de l'ancien président irakien Saddam Hussein, se sont rangés du côté de l'EI, mais d'autres ont décidé de lutter contre. Quitte à en payer le prix fort.

 

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